~La beauté du ciel~

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Tu avais pour habitude de venir dans ce parc, tous les jours aux alentours de seize heures, et à chaque fois, tu faisais la même chose, tu t'assaillais sur la même balançoire, et tu regardais le ciel.

Je n'ai aucune idée de ce que le ciel pouvait bien te raconter, mais tu adorais le regarder, les yeux rêveurs.

Moi aussi je venais dans ce même parc, tous les jours aux alentours de seize heures, et à chaque fois, je faisais la même chose, je m'assaillais sur un banc non loin de toi, et je t'observais.

Tu me fascinais, tu avais cette façon de regarder le monde qui m'obsédais, tu contemplais chaque chose que tu voyais comme si c'était la dernière fois que tu pouvais la regarder. Tu avais cette façon de regarder les gens comme si la personne était une pierre précieuse que tu avais peur d'abîmer, tu faisais en sorte que cette personne se sente unique et aimée, comme si tu savais ce que c'était de ne pas l'être et que tu faisais tout pour que ça n'arrive à personne que tu connaisses.

J'aurais aimé voir le monde comme tu le voyais.

Mais certaines personnes n'aimaient pas cette vision du monde, ces gens te trouvaient bizarre, parce que même si tu regardais les autres comme l'une des sept merveilles du monde, on avait l'impression que tu lisais dans les pensées.

C'est vrai, à chaque fois, tu devinais ce que ton interlocuteur allait dire, tu lui coupais l'herbe sous le pied et prononçais à voix haute ce qu'il s'apprêtait à énoncer.

Tu sais comment sont certaines personnes face à la différence, elles sont cruelles ...

Les gens ont commencé à dire des tas de choses sur toi, tellement de rumeurs circulaient à ton sujet.

Mais moi, je t'ai tellement observé que j'ai fini par comprendre, je savais pourquoi tu devinais les pensées. Tu le lisais dans les yeux, car les yeux eux ne mentent jamais, ils sont, les fenêtres qui permettent de sonder l'âme.

Tu plongeais ton regard dans celui des gens, tu lisais dans leurs cœurs et annonçais à voix haute la phrase qu'ils s'apprêtaient à dire.

Tu voyais le monde comme personne ne le voyait...

Tu savais regarder infiniment plus loin que n'importe qui.

Ton physique aussi, reflétait une autre vision du monde. Tu avais une peau de miel sans aucune imperfection, qui exprimait une telle douceur que l'on doutait qu'elle soit réelle, un nez fin et des lèvres rosées, mais c'est surtout tes yeux, qui rendaient ton visage si pur, de grand yeux bruns encadrés de cils noirs qui semblaient toujours surpris par la beauté de l'univers.

Je t'observais depuis plusieurs mois déjà, toujours assis sur ce banc et toi sur cette balançoire. J'avais toujours des écouteurs vissés dans l'oreille et les mains dans les poches, et toi tu regardais toujours le ciel.

Tout de toi m'obsédait, tu me fascinais à un point inimaginable.

Mais les gens te trouvaient bizarre, c'est vrai, personne n'est à l'aise en parlant à quelqu'un qui devine vos dires.

Les gens t'ont délaissé, plus personne ne venait te parler...

Je voyais bien que tu en souffrais, tu ne regardais plus le ciel comme avant, tu ne le regardais plus à ta manière, tu le regardais comme s'il t'avait volé quelque chose que tu voulais reprendre.

Tu me faisais de la peine, je ne reconnaissais plus ton regard, et le léger sourire en coin que tu abordais habituellement avait disparu, mais ce n'est pas pour autant que tu arrêtais de regarder le ciel, bien au contraire.

Je voulais revoir cette lueur dans ton regard, cette petite étincelle qui m'intriguait tant.

Il fallait que je me décide à venir te voir, et c'est ce que j'ai fait. Après plusieurs jours à chercher cette étincelle en vain, j'ai retiré mes écouteurs de mes oreilles et je me suis approché des balançoires. Je me suis assis sur celle qui était à côté de la tienne, et j'ai cherché ton regard. Tu as enfin quitté le ciel des yeux et les as plantés dans les miens, je m'apprêtais à ouvrir la bouche pour parler, quand tu m'as devancé :

La beauté du ciel [OS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant