Chapitre XVII

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Il. N'y. Avait. Qu'à. Moi. Que. Ça. Arrivait.

J'étais maudite, damnée, je manquais de mots pour décrire ma condition. Mortifiée, je me retournai lentement, priant pour que ce ne soit qu'un cauchemar. J'avais dû mal me réveiller ce matin.

Je sautai les dernières marches qui restaient, me retournai avec un sourire. Zut. Le prince Legolas nous regardait tout les deux, son regard passant de l'amoureux de ma sœur à moi. Il ne semblait pas heureux, mais pas fâché non plus. Il s'adressa à Aggur avec une voix calme.

- Pourriez-vous nous laisser seuls, s'il vous plaît ?

Alors qu'Aggur hochait la tête et commençait à s'éloigner, j'arrondissai mes yeux pour lui faire comprendre de ne pas me laisser seule. Il me répondit par un signe de tête d'encouragement et disparut par une porte, quittant la salle.

Il allait me tuer.

M'armant de courage, je me tournai vers le prince qui me dévisageait à présent. C'était particulièrement désagréable, alors je le coupai :

- Vous souhaitiez me parler ?

Silence. Qu'il cesse de me regarder ainsi ! Je savais que j'étais laide, ce n'était pas la peine de me le rappeler !

- Je me souviens de vous, à présent.

Le prince avait parlé ! Je haussai un sourcil.

- Je vous demande pardon ?

- Il y a cent-cinquante ans de ça, vous et votre famille êtes passés par notre royaume. J'étais jeune, mais je me souviens de vous. De la façon dont vous nous regardiez.

- Ah, marmonnai-je, mal à l'aise. Oui. Ma patronne disait souvent que j'avais l'air de vouloir tuer les gens.

- Pourquoi ne m'aviez-vous pas dit que vous êtes-

- Il y a beaucoup de choses que nous ne nous sommes pas dit, Prince Legolas, et pour cause, nous nous connaissons depuis quelques jours à peine, répliquai-je, glaciale. Je n'ai pas pour habitude de raconter ma vie entière à des inconnus.

- Nous sommes du même rang, continua-t-il.

- Pas tout à fait. Souhaitez-vous que nous en discutions ? Je suis actuellement déchue, donc inférieure hiérarchiquement, mais une fois que cela sera réglé, je serais sur le trône et donc reine, ce qui fera que je serais un rang au-dessus de vous mais cela est égal, et puis qu'est-ce que cela change que je sois fille de ferme ou reine des Montagnes Bleues, vous ne m'aimeriez pas de toutes façons et oh pour l'amour des Valars, nous ne sommes pas ici pour discuter échelle hiérarchique !

A son air un peu perdu, je me rendis compte de l'absurdité de ma tirade et de la longueur de ma phrase. Je repris mon souffle, me pinçant l'arrête du nez.

- Votre père vous a-t-il rapporté notre échange ?

- Oui.

- Bien, vous savez donc dans quel m... Pétrin je suis.

Je soupirai.

- Qu'en pensez-vous ?

Il parut surpris de ma question. Il ne devait pas avoir l'habitude qu'on lui demande son avis.

- Je pense... Que vous ne pouvez pas partir.

- Mais je ne peux pas rester non plus.

- Vous vous feriez tuer.

- Probablement.

- Pourquoi en ont-ils après vous ?

- Je ne peux pas vous le dire.

- Je ne peux pas vous aider, alors.

- Vous ne le pouvez pas de toutes manières.

Il haussa un sourcil. Zut, j'avais été trop mordante. Non, je devais être une gamine un peu perdue, pas moi. Il risquait de se méfier de moi.

- M'aider serait désobéir à votre roi, lui rappelai-je.

Il parut soudain comprendre.

- Vous saviez que mon père ne vous protégerait pas.

- J'espérais me tromper. Voyez-vous, en temps qu'ainée, je dois tout prévoir. Chaque éventualité, chaque possibilité. J'ai déjà prévu des milliers de situations possibles, toutes dirigées par des variables que je peux choisir ou non. Ça paraît un peu compliqué dit comme ça, mais en vérité, c'est très simple. Votre père ne m'acceptera pas ici. Je dois quitter ce royaume.

- Et vous comptez sur moi pour protéger vos sœurs.

J'acquiesçai.

- Si je ne revenais pas, vous devrez les conduire à notre royaume et les aider à reprendre le trône. Je dois m'occuper des assassins de mes parents. Et je ne peux pas avoir de l'aide de quiconque.

- Combien sont-ils ?

- Beaucoup.

- Savez-vous vous battre ?

- J'ai mes propres techniques.

- Ce n'est pas suffisant.

- Peut-être. Mais qu'en savez-vous ?

- Vous venez de le confirmer.

- Je suis responsable de ce que je dis, pas de ce que vous comprennez. Ai-je d'autres choix ?

Il ne répondit pas. Je poussai un soupir.

- J'ai encore des tas de choses à vous demander. Mais avant tout, savez-vous où je peux trouver des explosifs ?

Publié le 25 août 2019

Trois paires d'yeux... BleuesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant