Nos Années Volées ▬ Tome ✯ ©

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Adélaïde

La soirée s'est terminée tard. Très tard. Je n'arriverai même pas à donner une heure précise : j'ai arrêté de regarder l'horloge après minuit, lorsqu'une partie des invités ont pris congé, un peu à contrecœur. Je crois que certains ont eu peur de se réveiller pour se rendre compte que tout ceci n'était que le fruit de leur imagination. Les mots rassurants de ma mère n'ont pas eu l'air d'avoir eu beaucoup d'effet sur leurs traits attristés. Les inviter à revenir le lendemain a, par contre, paru les aider un peu plus à quitter le « domicile » familial.

Sacré domicile... Je ne sais pas si j'arriverais un jour à me repérer dans ce dédale de couloirs et ces innombrables pièces aux fonctions identiques. Heureusement, je peux compter sur ma voisine de chambre pour retrouver le chemin du lit qui est le mien. En tout cas, j'imagine que c'est elle qui m'a conduite jusque-là : je suis tellement crevée de cette courte nuit qu'il me faut du temps pour remettre les événements d'hier soir dans le bon ordre. Un temps considérablement long durant lequel je garde les yeux fermés. Avec un peu de chance, peut-être arriverais-je à m'endormir encore quelques heures.

Ou pas : j'abandonne ma tentative à peine quelques secondes plus tard. J'ai envie de profiter de cette journée, la première d'une nouvelle vie. Celle que je considère comme la première d'une nouvelle famille en tout cas. Je me jette sous la douche et arrive à en apprécier les quelques minutes. Les premières neiges de décembre ne devraient pas tarder à arriver. C'est du moins ce que j'espère, car j'ai toujours adoré la période de fête de fin d'a...

Noël me revient de plein fouet. C'est une évidence à laquelle je n'ai pas eu le temps de penser. J'en viens à craindre cette fête que j'ai toujours adorée. Ai-je seulement envie de la fêter ?

Je sors cette question de ma tête en même temps que je quitte la douche. Je n'ai pas envie de penser à ça maintenant, je sais que d'autres choses viendront occuper mon esprit dans les prochains jours. Le personnel doit être averti aujourd'hui de la grande nouvelle et je rencontre le Premier Ministre demain matin. Moi, rencontrer un Premier Ministre ? C'est si insensé !

Je ris face à l'étrangeté de la scène qui se joue dans mon esprit. Je ne regrette pas la décision prise, mais je me demande dans quoi est-ce que j'ai bien pu me fourrer. Il est sûr que j'ignore réellement à quoi m'attendre et ce que je vais devoir entreprendre au cours des prochaines semaines, des prochains mois.

J'enfile ce que j'ai sur la main, après avoir ouvert une caisse pleine de vêtements et venue tout droit de l'entrepôt visité la veille. Ce n'est d'ailleurs que ce matin que j'ai remarqué les quelques cartons qui contiennent les affaires que j'ai décidé de garder, remplis en grande partie par des vêtements et des livres.

Maintenant que je suis prête, je n'ai aucune idée de ce que je suis « autorisée » à faire. Je n'ai plus Toby et Thomas qui font le pied de guerre devant ma porte, je ne peux donc pas leur demander conseil ou la suite des événements. Je pourrais bien me faufiler dans le couloir en espérant trouver l'un d'entre eux, peut-être même Aiden, mais ça me semble trop risqué. Je regarde l'heure, en espérant que ça pourrait me donner une piste : il est bientôt onze heures. Si je n'ai pas envie d'attendre ni de sortir par peur de me faire prendre, il ne me reste plus qu'une solution : me faufiler dans la chambre de Lilianna grâce à la porte qui relie nos deux chambres. Je tourne la poignée de la porte avec précaution dans l'espoir de ne pas la réveiller avec mes gestes qui, je le sais, peuvent parfois être un peu brusques. Je finis par souffler de soulagement lorsque je l'aperçois sur le bord de son lit, les yeux encore endormis.

— Excuse-moi d'arriver dans ta chambre comme ça, je la salue d'un sourire, mais je ne savais pas quoi faire.

— Ce n'est rien, j'ai l'habitude que des gens débarquent dans ma chambre, m'explique-t-elle sereinement.