CHAPITRE 1: LAMENTATIONS

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Et le barman lui dit ces quelques mots après avoir appelé la police: "Voici donc ce qu'est la vie ! Ressens le vent, écoutes cette odeur qui n'est plus, revois là l'espace d'un instant, les larmes n'y changeront rien, elle n'est plus là ; adieu son humeur joyeuse, adieu sa joie étincelante, adieu ses caprices enfantins, au revoir son air d'angoisse qu'elle cachait si bien ; pourquoi donc bon Dieu, pourquoi donc elle ? Elle n'avait demandé qu'à vivre, juste ça, entourée d'amour, plein d'amour, mais à jamais elle ne l'aura sur cette terre, du moins la nôtre, terre maudite."

Et c'est couché près d'elle, en larmes et morves qu'il eut la force de dire : "te souviens-tu ? De ton regard, de ton sourire dentaire ? Oh ma belle, je m'en souviens, je ne m'en défais jamais. Dieu, merci à toi, merci à toi de nous avoir donné la possibilité de rêver, de nous avoir donné la possibilité de pouvoir, l'instant d'une nuit paisible, vivre dans un nouveau monde, un monde où les morts ne sont plus morts, un monde où les sensations que l'on ressent sont toutes aussi vraies que celles de cette vie, cette belle vie pourtant au regard de tes oeuvres ; maintenant, et ce jusqu'à ma mort je ne te reverrai qu'en rêve."

"Je pleure, je crie, je réclame ta présence. Que mon coeur est si brisé, que mon coeur est si attristé, comment es-tu partie ? Qui t'a fait donc partir ? Qui a pu donc faire cela ? Tuer la beauté, tuer une âme innocente, serait-ce ton corps que je pleure ? Il se peut bien, jamais encore Dieu n'avait envoyé une si belle créature sur terre. Mais comment avait-il donc écrit ton histoire ? J'ai du mal à croire que ceci provient de lui, j'ai du mal à croire que cette histoire est de lui ; le diable en est surement pour quelque chose ; non ! Il est la cause de tout, de toute ta vie, venais-tu donc du diable ? Le diable souvent prend des apparences auxquelles l'on ne s'y attend point, il nous montre la beauté telle que notre pauvre cœur le désire, loin de la promesse d'une vie éternelle que Dieu pourrait nous offrir. Vivons-nous du présent ou du futur ? Oh ma belle, et voici que je me mets même à douter, que tu me manques déjà.".

Durant ces lamentations interminables, une voiture de police vint à arriver sur les lieux du crime, trouvant les deux hommes près du corps de la jeune fille. Tandis que le barman donnait sa déposition à la police, expliquant qu'il ne connaissait pas personnellement la victime si ce n'est qu'elle fréquentait depuis un certain temps son bar au dernier étage de l'immeuble devant lequel elle rendu l'âme, c'est alors qu'Adriano, toujours couché près du corps de la jeune fille et refusant d'écouter l'un des policiers lui demandant de s'écarter, se tourna et arracha l'arme du policier. Épris de colère et de haine, il se mit à courir tout en criant "VENGEANCE".

"Posez votre arme et les mains en l'air ! Plus un pas sinon je tire !". Alors qu'Adriano s'acharnait à y aller, le policier qui interrogeait le barman n'eut d'autre choix que de tirer sur le genou d'Adriano de sorte à l'immobiliser : "Lâchez pour la dernière fois votre arme, et je ne le vous le répéterai plus, lâchez-moi votre arme !!".

"Je l'ai vu !!!", s'écria-t-il en pleure, " J'ai vu sa pauvre âme s'en aller ! Elle ne voulait qu'amour autour d'elle, elle ne voulait que sincérité, m'entendez-vous ! Elle ne voulait que joie, m'écoutez-vous ? je suis le premier à qui elle sourit sur cette terre, j'en suis également le dernier ; je suis le premier qu'elle aima, j'en suis également le dernier ; je suis celui qui voulait faire partie de son monde, je suis celui qui voulait la connaitre, je suis celui qui croyait en elle, même durant ses derniers moments ; que ne m'avait-elle pas dit de sa vision du monde ? Que vous avait-elle dis à vous ? La connaissiez-vous ? Connaissiez-vous ne serait-ce que son sourire ? À quoi pouvait ressembler sa joie lorsqu'elle se sentait aimée, entourée de ses siens ? Vous ne seriez jamais de ses siens ? Oh ma belle ! Regarde donc ce que tu me fais, on tire sur moi, je pleure des larmes, je pleure du sang, mon cœur s'emballe. Etais-tu de Dieu ? Etais-tu du diable ? Comment le Seigneur a donc pu te livrer à un sort pareil ? Mourir de trois balles en plein cœur sans qu'aucunes d'elles ne t'abattent sur le champ ? Le seigneur mon Dieu, le seigneur ton Dieu, le seigneur notre Dieu est-il celui-là qui t'a promis à une fin si tragique ! Je ne sais point, mais peu m'importe, je te vengerai !".

Fort depuis, le policier s'était jeté sur lui après qu'il eût lâché l'arme et le conduisait vers la voiture de police tandis que le corps de la jeune Matilda était transporté vers l'ambulance déjà présente sur les lieux.

La petite foule présente restait abasourdie par la beauté de cette innocente jeune fille qui venait de quitter ce monde : "Comment a-t-elle pu mourir !", "Par qui le diable l'a-t-elle condamnée !", "Même morte la joie demeure sur son visage."... etc.

Des lamentations, des déceptions, voilà ce qu'on pouvait ressentir. Nul ne pouvait rester indifférent en voyant le corps de ce qui semble avoir été la plus belle créature jamais envoyée sur terre être transporté sans vie vers l'ambulance.

"Pitié ! Pitié !", criait Adriano en étant transporté de force vers la voiture de police, "Ne me séparez pas d'elle quand elle a le plus besoin de moi ! Quel genre d'humain êtes-vous ? Je vous dirai tout ce que je sais, tout ce que je sais sur cette fille, qui était-elle ? D'où venait-elle ? Où partait-elle ? Avec qui voulait-t'elle mourir ? Comment voulais-t'elle mourir ? De quelle sorte d'âme était-t elle faite !".

Le policier, fort agacé par les cris perpétuels et comprenant à quel point la perte de cette fille qu'il trouvait d'ores et déjà singulière à ses yeux affectait le jeune Adriano, décida de le conduire dans l'ambulance où la pauvre jeune fille avait été déposée au préalable. "Alors que s'est-il passé ? Qu'avez-vous donc vu ? Que connaissez-vous de la victime ? À vous voir elle ne vous est pas si étrangère !". Regardant le policier avec un visage des plus glacials, tous deux de part et d'autre de la jeune Matilda recouverte par un drap noir, il trouva la force après un moment de dire : "Vous n'écoutez donc rien, abruti que vous êtes ! Avez-vous déjà vu une personne survivre plusieurs minutes d'une balle au coeur ? Elle si ! Dieu ou je ne sais qui ou quoi lui a donné cette maudite force pour qu'elle puisse, après que je sois descendu auprès d'elle, me faire le dernier de ses si merveilleux sourires et me dire à jamais". Regardant Matilda, "Vous ne verrez jamais son sourire ! Vous le savez pourtant, mais cela ne vous blesse guère à vous voir. Vous ne versez aucune larme ! Son corps plein de sang ne reste-t-il donc pas si beau, n'avez-vous donc aucune idée de la beauté d'âme qu'elle pouvait être vivante ? Pourquoi suis-je le seul à pleurer tout mon intérieur ? Pourquoi ma très chère? Ne manques-tu donc à personne ?". Adriano était pourtant loin de se douter du chagrin que ressentait Mr Alex Jefferson. Qui plus que lui fut blessé par cette mort, cette double mort comme il l'eut ressenti. Mr Alex avait perdu un mois plus tôt sa petite liserle comme il aimait si bien l'appeler, son unique fille que Dieu, le semble-t-il, lui avait offerte : Ashley Jefferson s'appelait-elle.

"Pô !". Ainsi résonna l'arme à feu d'Alex, tout en larme. La balle frôla de peu l'orielle gauche d'Adriano avant d'aller briser la vitre se trouvant derrière lui : "Ecoute moi bien jeune homme. Bon, mauvais, tueur, beau, laid, saint..., la mort est le salut qui nous attend tous ! Maintenant tu cesses de te lamenter et tu me dis tout ce que tu sais avant que je ne me mette moi aussi à me lamenter de la vie sur son cadavre et le tien à côté ! Oui, je le sais crétin ! Je ne verrai jamais son sourire, je ne la verrai jamais déambuler de joie, chuchotant aux oiseaux de vie ses objectifs, ce qu'elle aime ou a pu aimer de sa vie. Je ne saurai jamais, ou du moins l'on ne saura jamais ce qu'elle aurait pu réparer de ce monde malade, de ce monde où la vie se vend pour de l'argent; mais, je peux, l'on peut, veiller à ce que justice soit faite. Que celui ou celle ou ceux qui lui a/ont ôté la vie paye(nt) son/leurs acte(s). Alors, tais-toi maintenant et dis-moi ce que tu sais, ce que tu as vu, entendu". Alex, fort bien qu'il le cachait, désirait savoir qui a été cette fille, cette innocente qui alla si tôt retrouver l'au-delà, comme sa bien-aimée Ashley un mois plus tôt. "Il m'apparaît également que cette innocente jeune fille est une de tes connaissances, parle-moi donc d'elle ; cela contribuerait à faire avancer l'enquête".

Regardant depuis tout ce temps la pauvre jeune fille les larmes aux yeux, Adriano regarda de nouveau Mr Alex et fit un sourire, un de ces sourires profonds de soulagement ; voir enfin ce jeune policier de 40 ans exprimer par un écoulement continuel tout son mal intérieur devant la disparition dramatique et sauvage de la jeune fille le fit pousser ces derniers mots : "Je ne vous dirai pas juste ce qui s'est passé ce soir, ce que j'ai vu, entendu ou encore perçu ; mais mieux encore Mr... (regardant son nom inscrit sur le badge)... Alex, je vous raconterai son histoire. D'abord, elle s'appelait...". Alors qu'il s'apprêtait à terminer sa phrase, il fut épris d'une pulsion intérieure. Comment la nommer au passé, elle qui, bien que morte depuis des heures, reste encore à trente-sept degré Celsius, la peau plus fraiche qu'aucun vivant actuel, belle plus que jamais et accompagnée d'un de ses plus beaux sourires aux lèvres. Adriano revit alors le temps de sa phrase et termina sa phrase : "Elle s'appelle MATILDA".

LA BELLE MATILDAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant