Chapitre XIX

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Au nom de mon cœur,

Je marcherais,

Pour ceux qui m'ont précédée,

Je marcherais.

Au nom de mon cœur,

Je marcherais,

Pour l'espoir du monde,

Je me lèverais...

Cette simple comptine que j'avais appris enfant était vite devenue une des chansons que nous préférions, moi et mes sœurs. Tout le monde connaissait cette comptine, chez les elfes ! À voix grave et basse, le timbre de la voix à peine plus fort qu'un bruissement de feuilles, la comptine semblait plus solennelle, plus... Sensée.

Assise sur un banc de pierre décoré de chèvrefeuille, je fredonnai distraitement en creusant un trou dans la terre de la pointe de mes chaussures. Mauvaise habitude, mais c'était plus fort que moi. À côté de moi, une jeune femme de mon âge à la longue tresse marron, à la beauté pétrifiante et aux yeux d'un vert plus pur que l'émeraude savourait le vent sur ses joues.

- Ça faisait longtemps que tu n'étais pas venue ici, commenta-t-elle.

- Hmm-hmm, me contentai-je d'acquiescer.

- La dernière fois, c'était après ta rencontre avec cet elfe là, comment s'appelle-t-il déjà ?

- Legolas, marmonnai-je à contrecœur.

- Ah oui. Plutôt beau garçon d'ailleurs-

- Calie ! M'indignai-je. Tu es déjà fiancée !

Elle éclata d'un rire cristallin.

- Et je t'en remercie ! Mais ça ne m'empêche pas d'être objective !

- Aimerais-tu que Beren lorgne d'autres filles ?

- Oh, il n'en aurait pas le temps, répondit-elle simplement. Je les aurais toutes tuées avant. Et puis de toutes manières, c'est toi qui décides de ce que nous faisons ou non.

- Ce qui ne t'empêches pas de n'en faire qu'à ta tête.

Je poussai un soupir, me levai. Le ciel était d'un gris qui précédait les orages, la couleur que je lui préférais. La terre sous mes pieds était ferme et légèrement humide. Calie appuya ses coudes sur ses cuisses, posa son menton dans sa paume.

- Que se passe-t-il cette fois-ci ? Demanda-t-elle.

- Je vais mourir.

C'était plus facile à dire que je ne le pensais.

- Oh. C'est possible ?

- Je ne sais pas. Mais on parle de la Mort, là.

- Je sais. On prend le thé ensemble tous les septièmes mercredis du mois.

Elle sourit, se leva et s'avança pour faire face au balcon de pierre blanche qui surplombait une rivière claire et chantante.

- Veux-tu que je prenne le contrôle ? Me proposa-t-elle.

- Non. C'est pire que tout quand c'est toi qui le fait.

- C'est pour ton bien, tu sais.

- Je sais, murmurai-je affectueusement. Et je t'en remercie infiniment. Mais il faut que je m'en occupe. Seule.

- Tu ne sais pas te battre.

Je hochais la tête.

- Je ne compte pas me laisser faire, si c'est ce que tu penses.

Trois paires d'yeux... BleuesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant