Parmi toutes les créatures avec lesquelles l'homme entretient une alliance, il en est une où il n'est pas permis de douter quant à la nature des rapports qu'ils entretiennent tous deux et qui pourtant subsiste lorsque l'on contemple l'élevage et les conditions que supportent certaines de ces créatures et qui me laisse entrevoir, en ces peuples amassés dans des camps attendant la mort, la soumission de l'un par l'autre. C'est véritablement avec le chien que l'on comprend le sens du mot apprivoiser et il n'est pas d'autres espèces avec laquelle l'homme entretiennent une relation plus amicale et platonique. Comme beaucoup d'homme, j'ai moi même un chien que j'affectionne particulièrement. Un deerhound qui se nomme Monsieur Moustache.
Monsieur Moustache se nomme ainsi à cause d'une caractéristique singulière qui le différencie des autres deerhound. En effet ces derniers portent, en général, une légère moustache mais c'est certainement par leur bouc qu'ils s'attirent le plus de distinction ; pas Monsieur Moustache.
Monsieur Moustache, vous l'aurez deviné, n'a pas un bouc très prononcé, je dirais même qu'il est en dessous de ce qu'exige sa race.
Cependant, ce qui lui fait défaut au menton il le compense largement au dessus des lèvres par une prodigieuse et abondante moustache, d'où son nom. Quant au Monsieur, il est imposé non seulement par la noblesse émanant de l'animal en lui même, mais aussi par la noblesse de la lignée de Monsieur Moustache dont les ancêtres se sont distingués par leur prouesse mais aussi par leur proximité avec l'Histoire. En effet bien que le wolfhound demeure la race de chien associée aux rois, il n'en est pas un, de roi, qui n'ait pas possédé ou cherché à posséder, à un moment donné, un individu appartenant, non pas à la race des deerhounds, mais bien à la lignée de Monsieur Moustache, et cela pour l'accompagner lors des traités ou pendant les batailles, tant elle est exceptionnelle.
Vous seriez bien naïf de me croire en cette dernière partie car en réalité c'est une diversion visant à cacher la véritable raison qui me pousse à user de cette appellation, exagérée pour un animal, et qui n'est autre qu'un amour irraisonné ; ainsi qu'un profond respect pour mon compagnon. Mais je n'ai pas totalement menti quand j'ai prétendu qu'il appartenait à une noble lignée. Monsieur Moustache n'est pas un deerhound comme les autres. Certes il se distingue de par sa fabuleuse moustache mais il existe d'autres caractéristiques qui le distinguent des autres individus de son espèce et qu'il doit exclusivement à son père qui fut le chien de mon oncle.
Les origines du père de Monsieur Moustache demeurent, comme celles de sa race, lointaines et mystérieuses. En effet, mon oncle l'eut découvert lorsqu'il avait une soixantaine d'année en pratiquant la chasse à courre. Il était partie en forêt et ses chiens, qui avaient poursuivi un cerf, s'étaient vus devancer par un chien sorti de nul part et ayant foudroyé le cerf en un temps record. L'animal fut sans maître et mon oncle, impressionné par les performances de ce dernier, résolut de l'adopter. C'est là l'histoire qu'il nous a conté, et elle demeure étrangement pauvre étant donné l'amour immense qu'il avait prodigué à l'animal.
J'ai toujours admiré le regard que portait mon oncle envers son chien et le traitement très respectueux qu'il avait toujours eu à son égard. Mais il y avait quelque chose d'étrange dans la manière qu'il avait à demeurer très évasif et radin sur les détails de sa rencontre avec l'animal. En réalité, je n'ai jamais pu en tirer plus que cette ligne précédemment citée puisque mon oncle taisait systématiquement tout ce qui était lié, de près ou de loin, à l'origine de son chien et qui pourtant suscitait bien des curiosités de par ses caractéristiques exceptionnelles.
Le deerhound, littéralement chien de chasse à cerf, est une espèce ancienne qui remonte, on dit, jusqu'à l'antiquité et descendrait du lévrier celte, lui même originaire de l'Asie.
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Deerhound
Short StoryLa nouvelle se présente comme une errance horrifique au milieu des bois étranges des montagnes noires. La couverture est tirée du travail de Z.Beksiński que je vous encourage, si vous ne le connaissiez pas, à découvrir tant son oeuvre est magnifiqu...