II - Chapitre 1

241 30 15
                                    

Jeremy

Un an plus tard

 
Ayant principalement vécu en Corse et ayant passé deux ans en Afrique et au Moyen-Orient, je me considérais plutôt habitué aux fortes chaleurs. Pourtant, aujourd'hui, alors que j'arpentais un petit pont au milieu des collines afghanes avec des kilos d'équipements à porter, je commençais à croire que ce n'était encore rien et je doutais même que quiconque pût être réellement habitué à une telle température. De plus, la sécheresse et la poussière rendait l'air difficile à respirer, mais tout cela ne devait pas avoir la moindre influence sur nos comportements. Nous étions des soldats professionnels, entraînés et aguerris, prêts à mourir pour accomplir notre mission.

Un grésillement sorti de mon oreillette avant que la voix d'un des soldats de mon escouade posté en amont me parvînt.

– Convoi avec passagers en approche. Terminé.

– Bien reçu. Terminé.

Je me tournai face à un autre soldat du côté opposé du pont et nous échangeâmes un signe de tête pour nous préparer à l'arrivée du véhicule et au contrôle que nous effectuerions. Le véhicule en question était une camionnette marron dont l'avant était en ferraille et l'arrière en toile. Nous lui fîmes signe de s'arrêter à notre hauteur dès qu'elle monta sur le pont et elle commença à ralentir. Sachant qu'elle pouvait à tout moment accélérer de nouveau, se caractérisant immédiatement comme suspecte, mon collègue et moi gardâmes une distance de sécurité jusqu'à ce que la camionnette fût complètement à l'arrêt. Notre traducteur arriva ensuite et posa les questions habituelles au conducteur. Ce dernier ne paraissait pas particulièrement nerveux et répondit avec naturel.

– Ils viennent d'un petit village près de Lashkar Gah et ils voyagent jusqu'à Mazar-i-Sharif. Il y a 8 passagers, que des femmes, et des poules. Les femmes vont rejoindre leurs maris qui ont trouvé du travail en ville.

Je hochai la tête. Pour le moment, rien d'étrange.

– Surveille-le pendant qu'on contrôle les passagers, ordonnai-je au traducteur.

Nous allâmes à l'arrière du véhicule et ouvrirent les battants de toile. Comme d'après les dires du conducteur, nous comptâmes 8 femmes et quelques poules. Néanmoins, nous gardions à l'esprit que notre cible, le chef d'un groupe de Talibans très cherché après avoir déjà mené plusieurs assauts envers des soldats, qu'ils fussent américains, britanniques ou français, pouvait être déguisé en femme pour voyager plus discrètement.

Nous les fîmes sortir du véhicule et se mettre en ligne pour procéder à un contrôle plus précis. Chacun à un bout de la ligne, nous passions plusieurs secondes sur chaque visage ou plutôt chaque yeux, les femmes portant toutes des burqas noires ou bleu marines. Lorsque j'arrivai face à la troisième femme, plus grande que les autres, il ne me fallut qu'un regard pour reconnaître en réalité un homme à ses sourcils et ses traits sévères. Nous brandîmes simultanément nos armes, mais l'impact de deux balles contre mon gilet me fit reculer et tomber à terre avant que je ne pusse tirer moi-même. J'eus le souffle coupé et la vision floue pendant plusieurs longues secondes avant de revenir à moi.

Depuis, mon collègue l'avait en joue, mais le taliban avait passé son bras autour du cou d'une femme et avait placé son arme au niveau de sa tempe.

– Homme à terre ! cria mon collègue. Cible en joue. Il porte une burqa noire et menace une femme.

Tous les soldats de mon escouade étaient en alerte et notre médecin se précipita vers moi. Il comprit vite que je n'avais pas été directement touché et m'aida à me redresser pour retrouver mon souffle plus rapidement.

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant