À Minuit [Promised Neverland]

Prologue.

     November 2045
  
    C'était si vide.
     La vie à l'orphelinat était devenue compliquée pour Ray, mais surtout pour Emma. Celle-ci se morfondait dans son coin depuis le départ de Norman quelques jours plus tôt et rien ne s'était arrangé: Ray avait abandonné le peu d'espoir qu'il avait et la survie des orphelins avec. De plus, il n'avait même plus la force de parler ni même de lire, la plupart du temps il s'endormait en pleine lecture. La rousse aussi avait perdu sa vivacité et sa bonne humeur, elle souriait bien sûr mais toujours avec une pointe de tristesse et de nostalgie.

     L' enfant s'était laissée tomber sur le lit de l'infirmerie après l'abandon de Ray. Son cœur lui faisait souffrir le martyr et sa respiration se ralentissait petit à petit que le temps passé. Ses oreilles bourdonnaient tandis que sa vision perdait de sa clarté. Tout son corps était engourdi, si elle pouvait rester dans cette position jusqu'à ce qu'on vienne la donner à manger aux démons, elle le ferait sans hésiter.
     C'était Norman qui l'aidait à rester forte. C'était Norman qui lui donnait la force d'avancer. Mais il est maintenant vain, en train de se faire déguster par ces créatures infectes. L'orpheline doutait à présent, sans ses deux amis, elle ne savait plus quoi faire. La fillette se recroquevilla sur elle-même, pensait à tout cela n'arangeait rien à ses afflictions.
     Isabella apparut devant elle, la dominant par sa grandeur mais aussi par sa force, ou plutôt sa froideur suite aux événements. Emma releva la tête, surprise de ne pas l'avoir vu plutôt.
    « -J'ai frappé avant d'entrer. Déclara-elle. Mais tu n'as pas dû m'entendre.
     L'intérressée fronça les sourcils, se méfiant de la suite du monologue de sa tutrice. Cette dernière, tout en se jetant sur Emma pour l'embrasser, continua d'une voix faussement compatissante:
   -Ma pauvre Emma... Je comprends ton désarroi. Ce doit être affreusement dur.
     Elle resserra son étreinte.
   -Norman est mort...- Sa voix traînait sur le mot "mort"- Et Ray n'est plus qu'une loque. Tu te retouves seule et désemparée. Privée de tes ailes... Face à l'abîme... Et sans personne à qui te raccrocher.
     La suite faillit lui faire recracher son repas. Le sourire de sa tutrice qu'elle réussissait à ressentir même de dos et son ton mesquin accumulés la dégoutaient.
   -Je devine l'amère détresse qui t'envahit. Votre grand projet d'évasion est réduit à néant.
    La trentenaire déposa un baiser plein de fausses bonnes attention sur son cuire chevelu.
    - Ne laisse pas de vaines espérances te miner. Résigne toi, c'est la seule chose à faire. Une fois que tu auras lâché prise, tu te sentiras beaucoup mieux.
     Pour la première fois, Emma envisagait l'idée d'écoutait sa mère et de tout laisser tomber. Au fond, elle en avait envie de vivre ses derniers mois heureuse avec Ray, Don, Gilda, Phil et tous les autres.
    -Ce sera une délivrance. La résistance engendre la souffrance. L'acceptation t'en délivrera.
     Et puis de toute façon, si elle ne meurt pas dévorée, autre chose lui prendra sa vie un jour ou l'autre...
    Les bras qui se veulent sûrement réconfortant rapprocha la tête de le jeune fille près de son sein.
    -Et puis, tu sais, Emma... Si tu le souhaites ... Je suis prête à recommander ta candidature à un poste de Maman.
   -Un poste de Maman ?
   -Bien sûr. Affirma-t-elle en lui offrant son plus beau sourire
    La proposition la tentait néanmoins, l'idée d'envoyer des centaines d'enfants en pâture au démons ne l'enchantait pas.
   - Tu pourras ainsi parvenir à l'âge adulte... Mettre un enfant au monde... Et si l'on t'en reconnaît les capacités, revenir ici en tant que Maman ou Sœur. Tu es spéciale, Emma. Je suis donc tout à fait prête à intercéder en ta faveur.
     Comme si elle allait accepter ! Des larmes perlèrent aux coins de ses yeux émeraude. La désespérée le voulait en réalité. Isabella avait l'air heureuse alors pourquoi ne pourrait-elle pas elle aussi atteindre à cette forme de bonheur. Voir ses enfants grandir et s'épanouir, mourant sans souffrir après une vie courte mais sans problème. Et puis, faire évader une bonne partie des futures enfants sous sa charge pourrait être un plan plus rationnel que ceux qu'ils eurent déjà appliquer.
    -Je t'assure, mieux vaut prendre cette offre en considération. Accepte les choses comme elles son, tu t'épargneras bien des tourments.
    Sa main douce caressa son visage et se posa contre la joue rosé de l'enfant.
   -Cet idéal puéril, ce projet irréalisable, cette évasion impossible, cette vaine rebellion contre la réalité. Tire un trait sur tout ça. Devenir Maman est la meilleure solution.
    Il ne faut pas renoncer, non.
    Il y aura toujours de l'espoir.
   -Je... J'accepte.
    Maman la délivra de ses bras et lui sourit sincèrement pour la première fois pendant leur dialogue.
  -Tu as fait le bon choix, ma chérie... Tu verras, maintenant tout ira mieux.  »
    Sur ce, la jeune femme quitta la pièce, montrant un visage plein de tristesse et de remords, laissant Emma, seule, pleurant toutes les larmes de son corps.
    Norman, Ray...
    J'espère qu'un jour, vous me pardonnerez.