Chapitre 7

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Ryan savait pourquoi il avait accepté d'aider Tristan. C'était de la folie, il en avait conscience, mais il n'avait pas pu s'en empêcher. Ce n'était pas par charité, loin de là. Ce n'était pas non plus parce qu'il croyait en lui ou qu'il voulait le défier, comme le pensaient ses amis. La vraie raison était beaucoup plus sombre...Il avait une dette envers Alexis. Il le savait, s'il l'avait aidé, soutenu lorsqu'il en avait besoin, son ami serait encore en vie. Mais il avait été égoïste, incapable de voir sa douleur, qu'il avait minimisée. S'il avait été présent cette nuit-là, il le savait, il n'y aurait jamais eu d'accident. Alors, il avait rappelé Tristan la veille et lui avait confirmé qu'il était prêt à l'entraîner pour la Grande Dictée. Il allait devoir être ferme, ne pas se laisser dominer. Mais il s'en sentait capable : il avait l'habitude des élèves difficiles avec le métier qu'il exerçait. Il devait simplement se persuader que Tristan était un élève comme les autres...Cette tâche allait sans doute être la plus difficile de toutes.

Il soupira et enfouit son visage dans ses mains. Il avait au départ voulu aider Tristan pour prouver à ses proches qu'il n'avait aucun lien avec Alexis. Il s'était lourdement trompé. Le passé l'avait rattrapé et il n'avait pour le moment aucun moyen de lui échapper. Tristan n'était pas seulement renfermé, il était dangereux. Ryan avait sous-estimé les conséquences du secret de cette famille. Le silence des parents Dumont avait causé des ravages considérables...

Mardi 17 mars. La Grande Dictée avait lieu dans un mois, le 16 avril. Ryan allait devoir tenir jusqu'à cette date, supporter pendant un mois le masque glacial de Tristan. Ensuite, il pourrait s'en libérer. Tenir, il devait tenir.

Il secoua la tête. Les rédactions de l'adolescent l'avaient ébranlé à un point qu'il n'avait pas imaginé. Il savait que Tristan allait mal ; il n'avait pas soupçonné que son mal serait aussi grave. Les mots que son élève avait écrits étaient comme gravés au fer rouge dans son esprit, il les voyait danser même lorsqu'il avait les yeux fermés. Depuis qu'il avait lu les copies, une question ne cessait de tourner dans sa tête : Tristan serait-il capable de commettre les actes qu'il avait écrits ? Il frissonna à cette pensée. La description de la préméditation du meurtre n'était pas seulement bien écrite, elle était aussi extrêmement réaliste. Les termes employés plongeaient le lecteur dans l'esprit du meurtrier de manière glaçante. Il secoua la tête : il ne devait pas confondre fiction et réalité.

Le cœur battant, il jeta un coup d'œil à sa montre. 17 h. Il déglutit. Tristan arrivait dans une heure. Lorsqu'il l'avait appelé pour lui confirmer son aide, ils avaient décidé ensemble l'heure et les jours d'entraînement. Tristan viendrait donc chez lui toutes les semaines pendant un mois le mardi, le jeudi et le samedi à 18 h. Plus les secondes défilaient, plus Ryan sentait l'angoisse s'abattre sur lui. Il se souvenait de la phrase sèche et rapide que Mme Dumont lui avait dite le jour des funérailles d'Alexis : « Il n'est pas au courant. ». C'était à la fois une affirmation et un avertissement. Ryan avait frissonné, mais s'était contenté d'acquiescer. Sur le moment, il s'était demandé de qui elle parlait. Il n'avait jamais accordé beaucoup d'attention au frère de son ami et il avait supposé qu'il s'agissait du père d'Alexis – qui n'était pas venu à l'enterrement. Il n'avait pas cherché à en savoir davantage. A présent, il comprenait mieux.

17 h 45. Ryan frissonna. Son cœur battait au rythme des secondes, il était incapable de penser à autre chose qu'à la venue de Tristan. Se montrer ferme. Sûr de soi. Voire sévère. Surtout, ne pas se laisser impressionner.

Il ne frémit pas lorsque son interphone sonna à 18 h. Tristan était d'une ponctualité surprenante, un aspect que Ryan appréciait. Il lui ouvrit la porte de l'immeuble et attendit d'entendre ses pas sur le palier pour ouvrir sa porte. Ils échangèrent un bref hochement de tête sans sourire, puis Ryan s'écarta pour laisser passer l'adolescent.

Le secret des Dumont [La Grande Dictée 2e jet]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant