Secrets de la terre

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1. Enfermer Denis Robert dans le coffre de ma voiture

2. L'amener dans un endroit qu'il ne connait pas, loin de la ville (Forêt? Rivage du lac?)

3. L'immobiliser en l'attachant à un arbre (corde de bateau? baillons?)

4. Attendre qu'il implore la pitié (ma partie favorite!)

5. Couper sa graine, lentement

6. L'écorcher vivant (scie? couteau?)

7. Le garder vivant jusqu'à la fin

8. L'étouffer avec son pénis

9. Coudre sa bouche fermée

10. Creuser un trou

11. L'enterrer

12. Effacer toutes traces de mon passage


Exactement ce que je pensais. Je n'ai rien négligé. Rien. Pas un seul détail. Chaque étape a été planifiée, révisée, exécutée avec précision. C'est pour ça qu'ils m'ont engagés.

Pourtant...

Pourtant, personne n'a remarqué sa disparition. Personne n'a ouvert d'enquête. Personne n'a dit quoique ce soit hors de l'ordinaire à propos de ce gros lard inutile. C'est impossible. Absolument impossible. Je n'ai pas commis un crime parfait non plus! À moins que...

Est-il encore vivant? S'est-il échappé? Quelqu'un est-il venu le déterrer? Même à cela, ne serait-il pas revenu en ville, ne serait-il pas allé porter plainte à la police? Avait-il trop peur de revenir? Sa famille n'a-t-elle pas remarqué sa disparition?

C'est impossible, je l'ai écorché vivant! Je lui ai coupé la graine! Je l'ai enterré!

S'il s'est échappé...

Merde.

Ils vont me blâmer pour tout! La compagnie va faire faillite à cause de moi! Ils vont m'amener en cours! Il va falloir que je trouve une excuse, un alibi, quelque chose!

Merde. Merde... Merde!

Je n'avais pas planifié ça. Je planifie toujours tout! Quel inconvénient! Maintenant il va falloir que je me déplace jusqu'à la forêt, que je le déterre, que je salisse mes vêtements, que je vérifie si le corps est là, ET que je me trouve un alibi pour la soirée... Je déteste les inconvénients...

***

Il stationne son camion à l'orée de la forêt, à l'écart d'où il avait laissé la sale peste, au cas où quelqu'un passerait par là. Il déteste se faire poser des questions, et si son camion est trop proche de la scène de crime, il pourrait se faire prendre. Il claque la porte de son véhicule et se met en marche vers l'endroit où il espère déterrer le corps de larve de Denis Robert, dépouillé de sa peau, sa queue enfoncée au fin fond de sa gorge. Il prend un certain temps à se rendre à la clairière où il avait enterré Denis. Quand il y arrive finalement, une forte lueur rouge éclaire la forêt. La pénombre va s'installer bientôt. Ne voulant pas travailler dans le noir, il se jette sur ses genoux et entreprend de creuser le ventre du sol de ses mains nues. Comme un animal affamé, il éviscère le sol à la recherche de ce qu'il y avait enfoui. Ses jointures se mettent à saigner à force de heurter les roches et les cailloux, mais la seule chose qui compte pour lui est de s'assurer que Denis est six pieds sous terre... et qu'avec lui repose le secret de la compagnie, secret que sa grande gueule aurait probablement révélé si on ne l'avait pas engagé. Soudain, il frappe quelque chose qui n'était pas de la terre. Un corps froid qui dégage une odeur atroce. Le corps de Denis Robert, en pleine décomposition. La terreur pure se lit encore sur son visage, même si son corps a été grugé et déformé par la mort. Le coupable prend un moment pour se délecter de son travail, se régaler du résultat de son dur labeur. Un sourire moqueur se dessine sur ses lèvres. Il sait qu'il n'était pas obligé de faire tout ça. Il n'est jamais obligé de mettre autant de travail pour tuer ses cibles pour respecter son contrat. Il le fait parce qu'il aime ça. Il aime entendre les cris de ses victimes, les entendrent implorer la pitié. Il veut rendre la mort de ses victimes le plus pénible possible. C'est ce qu'il aime le plus au monde. Il adore torturer ses victimes, il adore sentir un couteau fraîchement aiguisé découper la chair, pénétrer l'abdomen. Ces délicieuses pensées lui donnent une idée. Une idée qui rendrait ce meurtre le plus amusant qu'il a commis.

Il baisse ses pantalons, l'air triomphant. «Au moins je l'ai, la mienne» Il ricane fort en éclaboussant le corps en décomposition de Denis de son urine. «Je voulais te faire un dernier petit cadeau avant de te laisser pourrir!» Le jet de pipi continu de souiller le cadavre, mélangeant l'odeur de décomposition à celle de l'urine.

Ses pantalons maintenant remontés, le meurtrier repousse la terre humide sur sa victime pour le recouvrir. La dernière chose qu'il voit avant de complètement ensevelir la pourriture est le rouge vibrant de sa cravate. Avec précaution, il compacte la terre et parsème l'endroit qu'il venait de creuser de feuilles mortes pour recouvrir les traces de sa présence. Une couleuvre se déplace au-dessus de la dépouille enterrée de Denis. Seuls quelques rayons de lumière illuminent le bois à présent et, ne tenant pas particulièrement à se perdre dans la forêt, il décide de retourner vers son camion.

***

Mais pourquoi, alors? Pourquoi personne n'a fait de plaintes? Je sais qu'il a une conjointe, des collègues, une famille! Peut-être que je devrais arrêter de me poser des questions. De toute façon, il n'y a aucune manière que qui que ce soit découvre que je suis le coupable. En plus, il n'était qu'un sale porc. Les gens de son entourage me remercieraient probablement. Je sais que la compagnie va me remercier.

Je devrais nettoyer mon camion. Avec l'aspirateur. Avec de l'eau de javelle. Il serait vraiment dommage de me faire prendre aux dépourvues après tant de préparation, tant d'efforts. Surtout si c'est à cause d'une petite tache de sang, ou d'un cheveu.

***

Il conduit sur la longue route sinueuse qui mène à son village, se demandant encore pourquoi rien ne s'est produit. Il n'est pas fou! Il a vu le corps en décomposition de Denis Robert dans la terre! Il doit y avoir une explication rationnelle pour le manque de réaction auprès de ses proches! Il continue à se questionner.

« Tabarnak d'osti de crisse! »

En freinant d'un coup sec, des jurons et des obscénités sortent de la bouche du meurtrier.

Un homme, seul, se tient au beau milieu de la route, immobile. « Non. Non. C'est impossible. NON! C'est impossible! » Il fronce les sourcils, s'approche de son pare-brise embué pour essayer de mieux voir. « C'est impossible... C'est impossible! » L'homme devant lui est pâle et ses yeux sont vitreux... Il semble perdu. « Mais... mais... » Son regard est vide. Il est identique à l'homme qu'il vient d'enterrer dans les entrailles de la terre... Il est identique à cet homme qui se fait dévorer par les vers, à cet homme qu'il vient d'asperger d'urine.

Attachée à son cou... une cravate rouge sang.

1139 mots

OuroborosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant