Prologue

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Il était une fois... une femme d'une beauté sans pareille. Son sourire illuminait la journée de tous les passants, sa silhouette était d'une élégance sans faille, et sa douce voix était une vraie mélodie pour tous ceux qui la côtoyaient. Elle avait toutes les qualités du monde : l'intelligence, la bonté, la bravoure... C'était donc sans surprise que le futur roi jeta son dévolu sur elle. Ainsi, à la tête du royaume aux côtés de son mari, la demoiselle était promise à un avenir radieux.

Du moins... c'était ce que les sujets prédisaient. Peut-être était-ce dû à une routine, une envie de défi, ou à ce sentiment qui faisait que les humains ne se contentaient jamais de ce qu'ils avaient, mais le roi se lassa vite de sa bien-aimée, et ne se priva pas de satisfaire ses envies chez d'autres prétendantes. La reine était dévastée. Mais elle ne pouvait rien laisser paraître. Son devoir était de rester présentable, dévouée et généreuse auprès du royaume, même si cela impliquait de se sentir bafouée et humiliée intérieurement.

Comment était-ce possible ? Pourquoi cela lui arrivait-il à elle ? Après tant d'années de gentillesse, de bons services, pourquoi se retrouvait-elle enfermée dans cette vie terne ? Avait-elle fait une erreur quelque part ? Voilà les questions qui trottaient dans son esprit, encore et encore, sans qu'elle ne pût y trouver de réponses. Après tout, elle n'estimait pas mériter ce genre de traitement. On lui avait sans cesse répété qu'elle aurait très certainement un futur merveilleux. Qu'elle avait tout pour elle.

Et la voilà, à se morfondre dans son château sans vie, à attendre un mari qui jamais ne serait à elle. Et à faire semblant. Pour sauver la face. Pour ne pas se sentir injustement ridiculisée devant tous ses sujets.

Mais un beau jour, une pensée fit son apparition. Rien ne l'empêchait de retourner la situation à son avantage. Pendant tout ce temps, elle n'osait rien faire par peur du regard des autres. Et cette situation, en plus de la rendre malheureuse, profitait à ce vil manipulateur qu'elle appelait « époux ». Néanmoins, ce n'était pas lui qui l'avait enfermée dans ce mensonge. C'étaient ses sentiments. Sa peur. Elle s'était elle-même liée les mains, et pour qui ? Pour tout le monde excepté elle.

C'est alors qu'elle prit la décision la plus importante de sa vie. Plus de souffrance. Plus de sanglots étouffés dans l'oreiller. Pour une fois, elle allait faire ce qu'elle voulait. Ce qui était le mieux pour elle. Et tant pis pour les conséquences.

Ce soir-là, elle alla voir son mari dans la chambre à coucher. La pièce baignait dans la lumière du clair de lune et de celle des bougies, créant une atmosphère menaçante. Vêtue d'une robe victorienne rouge sang, la reine se tint debout, fière, devant son mari. Dans ses mains, elle tenait précieusement un petit coffre doré.

-Pourquoi avez-vous demandé à me voir, ma chère et tendre ? s'enquit le roi.

La reine pencha légèrement la tête de côté, et un sourire apparut sur son visage. Elle dévisagea son époux avec bienveillance, avant de s'approcher doucement de lui.

-Je souhaitais partager avec vous un nouveau jeu de cartes que j'ai moi-même confectionné cet après-midi.

-Est-ce vraiment le cas ? J'en suis époustouflé. Il me tarde de le découvrir.

-Laissez-moi vous faire part des règles. Mais avant tout, il est de mon devoir de vous présenter les cartes.

La reine ouvrit le coffret, et en sortit avec précaution un jeu composé de neuf cartes. Leur dos était aussi rouge que la robe de leur créatrice, et orné d'arabesques dorées. Sur chacune des faces étaient dessinés avec le plus grand soin différents personnages, leur seul point commun étant que tous portaient des masques. Leurs noms respectifs étaient inscrits au bas de la carte correspondante. La reine montra alors les cartes une par une, tout en chantant un air que le roi n'avait encore jamais entendu jusqu'à ce jour.

Le Voleur car tu m'as pris mon cœur

Le Prisonnier car tu m'as enfermée dans ma peur

Le Magicien car tout n'était qu'illusion

L'Erudit car tes belles paroles me donnent raison

L'Oracle car notre avenir ne vaut rien

Le Valet car ta protection resserre mes liens

Le Joker car tu arbores ce faux sourire

Le Bourreau car tu crois pouvoir me trahir

Nul ne sut ce qu'il advint au roi ce soir-là. Mais à partir du lendemain, il resta introuvable. La reine prit alors les commandes du royaume, et aucun ne trouva rien à redire. Elle dirigea la contrée d'une main de fer, mais de manière toujours juste, et était adulée par ses sujets. De temps en temps, ces derniers se demandaient ce que la reine ressentait face à la disparition si soudaine de son mari. Mais les soldats pouvaient l'affirmer, sans aucun doute : son regard était impénétrable. Ses yeux restaient vides, même si, de temps en temps, l'un ou l'autre pensait y apercevoir une lueur étrange. Une lueur sombre et... machiavélique.

A présent, il ne reste que la Reine...

Queen of Cards (Version française)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant