[On passe à l'encrage de ce dessin. J'ai apprécié la pose (issue d'une référence), très royale à mon goût]
Lyssandre avait rejoint le poste des gardes, bien à l'abri dans le ventre de la tour sud-est.
Oppressé par le peu d'espace, il avait orchestré la défense du château au côté de ceux habilités à le faire. Le chevalier de Soann et le sien s'étaient rapidement mêlés à cette danse, à cette chorégraphie minutieuse dans laquelle se mêlait gardes et la poignée de soldats présents, sans oublier quelques apprentis qui avaient atteint l'âge requis. Priam avait insisté pour participer, avait presque imploré son cousin, au point où celui-ci avait cédé. L'adolescent rejoindrait Willow dans sa tour et serait chargé de calmer ses peurs, d'apaiser ses angoisses.
Car la tempête noircissait l'horizon et les orages grondaient déjà dans le lointain.
Cette tempête s'appelait Déalym et elle ne les épargnerait pas.
Priam était l'un des rares à connaître l'existence de la princesse. Il trompait son ennui à l'occasion et ils se comprenaient sans un mot. Les deux maudits, les deux damnés.
Les deux subissaient l'oubli à leur manière. Priam aurait souhaité être oublié, Willow l'était déjà.
Les dernières minutes qui précédèrent l'affrontement furent les plus longues. Il restait à Lyssandre juste assez d'air pour ne pas s'asphyxier. Il lança les derniers ordres, chercha à s'assurer des derniers préparatifs :
— Les hommes sont-ils prêts ? Les archers sont-ils tous en place ? Pensez-vous que la porte tiendra ?
— Les hommes sont en place, la défense est organisée, Sire. Pour ce qui est de la porte, j'ai peur qu'elle ne soit pas faite pour essuyer un assaut d'une telle ampleur, répondit le chevalier de Soann, qui ne prononçait pas un mot plus haut que l'autre.
Pour cause, le palais n'avait plus été attaqué depuis une petite éternité. Les combats se bornaient aux limites de Farétal, comme si la forêt avait été conçue pour abriter toute cette violence et ne surtout pas la laisser déteindre sur le reste des deux Royaumes. Halev avait parfois, au cours de son histoire, fait l'objet de pareils épisodes, mais le palais avait été épargné de mémoire d'homme.
Lyssandre observait, dans l'interstice creusé à même le mur, l'ennemi qui progressait. Bientôt, trop vite, il fut au pied du château. La bouche sèche, le roi se sentait étranger au spectacle auquel il assistait. Il faisait office de spectateur, d'un œil extérieur porté sur les événements. L'ennemi patientait, prêt à éventrer la porte et à vider l'enceinte qu'elle gardait de sa substance. Jusqu'à y trouver le souverain, jusqu'à ce que la tête de celui-ci roule dans la poussière. Lyssandre s'imagina une atmosphère plus étouffante encore que celle qui le privait de son souffle, une odeur semblable à celle d'Arkal. Un mélange de sang, de braises ardentes, de cris et de mort. Déalym rapporterait alors à son tyran la tête coupée de Lyssandre. Loajess serait enfin défaite.
Lyssandre ne pouvait s'empêcher d'établir un rapprochement avec le champ de bataille et le château. Deux attaques en l'espace de quelques jours, comme si le mal gangrénait Loajess et pourrissait ses terres. Il se pencha pour saisir, malgré la hauteur de la tour, les visages des soldats ennemis. Leurs armures étaient moins lourdes que celles portées par les gardes et, sans prétendre posséder la moindre compétence en la matière, le roi se doutait que cela leur conférait un avantage important. Les chances de réussite déclinaient à vue d'œil.
— Rendez-nous votre roi ! beugla ce qui devait être un général ennemi.
L'agitation qui sévissait entre les murs s'apaisa brusquement. Même les hommes de Lyssandre se turent pour tendre l'oreille. Devant la porte, le cavalier leva son épée avant de poursuivre d'une voix tonitruante.
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Longue vie au roi [BxB]
Fantasy« Longue vie au roi ! » Jamais Lyssandre n'oubliera ces clameurs. Le trône lui est promis à la mort de son père et ce cadeau empoisonné ne se refuse pas. Hanté par le souvenir des défunts et par la mémoire d'un frère auquel il a volé la place, Lyss...