Chapitre 42

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[La qualité photo est médiocre, mais je vous présente ce soir le crayonné d'un nouveau dessin de notre chevalier préféré, Cassien !]

Lyssandre ne tenait pas en place.

Cassien le vit successivement fourrager dans des liasses entières de documents officiels, parcourir quelques registres, faire les cent pas à travers la pièce, puis revenir à sa place, au bout de la table.

— Mon roi, l'interpella le chevalier.

— Qu'y a-t-il ?

Lyssandre avait parlé trop fort, trop vite, comme s'il attendait une urgence, une nouvelle. Le pire était passé, le calme était retombé sur le château, et le roi n'aurait jamais pensé que la suite puisse être plus douloureuse encore que le cours brut des événements. L'attaque de Déalym, le passage dans le recueil, l'incendie qui avait réduit celui-ci en cendres, le discours qu'il avait tenu face à l'ennemi, puis la bataille, les morts, la blessure qui aurait pu lui coûter la vie, la fin des combats, les aveux d'Elénaure, la mort de Willow et celle de la reine. Tant de choses s'étaient succédé et le fil impitoyable sur lequel Lyssandre avait évolué l'avait également écarté de ses émotions. Anesthésié, son cerveau avait privilégié les actions à court terme et non les états d'âme du jeune monarque.

— Vous devriez vous...

— Je vais bien, je vous en remercie.

Le chevalier ne cilla pas. Ce comportement, cette manière de s'exprimer cassante, brutale, comme si Lyssandre refusait d'entendre, ne lui ressemblait pas.

— Votre cousin a été pris en charge par les médecins du palais. Leur nombre est insuffisant et ils sont surchargés par le nombre de blessés, mais...

Le regard de Lyssandre s'était durci et ses épaules, sous la toilette que le roi avait enfilé dans la précipitation, étaient tendues.

— Mais il est entre les mains d'un excellent médecin. Des renforts arriveront probablement dans la nuit pour soutenir les médecins royaux. Ils apporteront également le nécessaire aux reconstructions les plus urgentes.

Les dégâts avaient été importants. Lyssandre ne s'y était pas attardé, trop obnubilé par d'autres préoccupations pour s'en soucier. Il fallait avant tout s'assurer que les fondations tenaient bons et que l'incendie qui s'était déclarée à plusieurs endroits dans la cour et dans quelques couloirs n'ait pas fait d'importants dommages. Les foyers avaient été maîtrisés, mais le risque d'un effondrement n'était pas à exclure.

Cela s'inscrivait dans la longue liste d'impératifs qui attendait Lyssandre et qui lui paraissait, déjà, bien secondaire. Il avait espéré que son règne se poursuive sur des bases moins dramatiques et désormais qu'il pouvait s'illustrer autrement, en reconstruisant, en agissant comme le ferait un roi, il s'y répugnait. Une conduite contradictoire, paradoxale même, que le chevalier ne prit pas la peine de déplorer. Son rôle s'arrêtait bien avant ces détails de logistique, c'était le domaine d'autres que lui, mais Lyssandre s'était opposé à ce qu'on l'approche. Un de ses ministres avait bien essayé, mais sa tentative avait été rejetée par le souverain d'un seul geste.

— Quant aux corps des disparus, ils ont été rassemblés dans la cour, Sire. Ils seront inhumés ou rendus à leurs familles, des demandes ont déjà été formulés pour le transfert. Quant aux victimes de plus haut prestige, elles...

— Silence ! s'exclama Lyssandre. Je ne demande à personne de comprendre, mais vous... En ce qui vous concerne, j'aimerais que vous respectiez mon deuil, chevalier.

Longue vie au roi [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant