27. Mets fin à mes souffrances.

1.6K 173 4
                                    

Nous marchâmes le long des rues de cette ville que je ne connaissais pas. Armelle avait réussi à enchanter tout le commissariat, pour qu'on pût sortir de celui-ci sans qu'on nous remarquât. Elle m'avait prévenu que si je tentais de prendre la fuite, elle s'en prendrait à Lucas. Je surveillai constamment ses poches, espérant que Lucas soit toujours vivant à l'intérieur. Je n'arrivais pas à comprendre comment il avait pu atterrir à l'intérieur de ce cube.

- C'est toi qui l'as mis dedans ? demandai-je à Armelle, alors que nous traversions la route.

- Même pas !

- Bah comment il est entré dedans ?

- Il l'a voulu.

- Quoi ?

- Je lui ai proposé un deal : soit il se donnait à moi, et il se sacrifiait dans ce petit cube, tout en étant à ma merci, soit je te tuais.

- T'es vraiment horrible..

- Je sais, sourit-elle.

Nous passâmes à côté d'un couple d'amoureux qui poussait une poussette où se trouvait une petite fille habillée en rose avec des couettes. Je me disais qu'ils devaient vivre la belle vie. Ils ne se rendaient même pas compte que moi, la personne qui venait de passer à côté d'eux, était en train de vivre les événements les plus marquants de sa vie, soumis aux exigences d'une occultiste aussi tarée que sadique. Elle avait nos vies entre ses mains, et pourtant, elle nous tuait pas. Elle avait envie de jouer. Elle adorait jouer.

Nous arrivâmes dans un parc, nommé "Breumoncq Parc". Je trouvai ce nom très moche. Le "cq" à la fin du nom du parc me faisait penser à "coq", allez savoir pourquoi.

Nous marchâmes dans le parc, tournant à plusieurs reprises, avant de marcher cette fois-ci, sur le gazon, en direction d'un endroit interdit au public. Nous arrivâmes devant une petite cabane, fermée à clé. Clé qu'avait Armelle, bien évidemment.

Elle ouvrit la porte, et me fit signe d'entrer en premier. Je ne protestai pas et pénétrai à l'intérieur. Elle éclaira la pièce grâce à un interrupteur situé juste à l'entrée. La pièce était petite. Il n'y avait rien, seulement un trou au centre de celle-ci. Je ne pus apercevoir le fond, tellement il était profond.

- Il n'y a pas de fond, affirma-t-elle.

- Pourquoi tu m'as emmené ici ? 

- A ton avis ?

Je ne répondis pas à la question, ne voyant pas où elle voulait en venir.

- Mon seul but est de te faire souffrir, et là, j'en ai l'occasion.

- Comment ça ?

Elle regarda le trou, puis sourit. Elle sortit malicieusement le petit cube où se tenait Lucas. Je compris instantanément où elle voulait en venir. Elle voulait balancer Lucas dans ce trou. Je ne pouvais pas la laisser faire ça. Je ne pouvais pas la voir faire ça. Je devais lui en empêcher.

- Tu ne comptes tout de même pas..

- Bah.. si, me coupa-t-elle.

Elle joua doucement avec le cube dans ses mains, avant de s'approcher dangereusement du trou. Elle tourna plusieurs fois autour, tandis que moi je la regardais sans rien faire. Je ne voulais pas prendre le risque qu'elle le jetât à l'intérieur, si je m'approchai trop d'elle.

- Tu as la possibilité de me pousser, et de te débarrasser de moi pour toujours, mais dans ce cas, Lucas disparaîtras en même temps que moi.. Ou alors..

J'attendais la deuxième proposition qu'elle comptait m'énoncer, mais elle s'arrêta, avant de regarder le plafond.

- Tiens, j'vais jouer avec tes nerfs, p'tit  chou.

Elle leva le bras en direction du plafond, et fit apparaître un minuteur digital flottant dans l'air.

- Je vais te laisser 30 secondes pour essayer de te sortir de là. J'adore voir les gens stresser et perdre leurs moyens, rit-elle.

Elle claqua des doigts, et le compteur se mit à fonctionner. 30.. 29.. 28.. Les secondes défilaient à toute allure. Bizarrement, ces secondes passaient plus vite que celles que j'avais passées dans cette salle d'attente de l'hôpital où avait été soigné Lucas.

J'étais tout rouge. J'avais les yeux embués, mais j'essayai de garder un sang froid. Armelle tint fermement le cube dans sa main, et tendit son bras au-dessus du trou. Elle avait juste à lâcher le cube, et je perdais l'amour de ma vie à jamais. Je n'osais pas m'approcher d'elle, par peur qu'elle lâchât Lucas, mais je sentis que c'était la seule solution.

Les secondes continuaient de s'écouler.. 18.. 17.. 16..

Je pleurai. Mes larmes coulèrent toutes seules sur mes joues. Je voyais Lucas qui frappait contre les parois du cube, essayant de sortir. Il me regardait pleurer, et criait mon nom. J'arrivais à l'entendre très peu, vue sa petite taille. Il me suppliait de l'aider, et moi j'étais là, sans rien faire, en train d'attendre le décompte. Il fallait que je bouge, mais la peur de le perdre fixait mes pieds au sol. Je n'arrivais pas à franchir le pas, je n'arrivais pas à empêcher ce qui allait se produire sous mes yeux. Je ne voulais pas le perdre. Je ne pouvais pas le perdre. Vivre sans lui m'était inconcevable.. 12.. 1.. 10.. 9..

Armelle souriait, tout en me voyant pleurer. Le trou devait bien faire un bon deux mètres de largeur. La seule solution de sauver Lucas, était que je cours, que je saute par-dessus le trou, tout en prenant le cube des mains d'Armelle, avant d'arriver de l'autre côté du trou. Le moindre faux pas me coûterait la vie, ainsi que celle de Lucas. J'avais la vie de Lucas entre mes mains, et je n'étais même pas fichu de le sauver. Je me sentais faible, vulnérable, minable.

5.. 4.. 3..

Je pris mon élan et commençai à courir. Je sautai par-dessus le trou, avant de frapper contre la main d'Armelle, qui n'eut pas le temps de la retirer. Ma main frappa la sienne, cependant je ne réussis pas à attraper le cube. Le cube tomba de sa main.

Je retombai juste sur le rebord du trou, et perdis mon équilibre. Je partis doucement en arrière, dos au trou infini. Je tombai à l'intérieur, mais je réussis à me tenir avec la main droite au bord du trou. J'étais suspendu dans le vide, me tenant qu'à une seule main. Je regardai le cube qui vola et retomba sur le sol. Elle rebondit plusieurs fois et s'approcha dangereusement du trou. Je ne pouvais pas bouger, j'étais comme attiré par le trou. Je ne tenais que d'une seule main.

Le cube rebondit plusieurs fois avant de franchir le rebord et tomber dans le trou.

- NAAAAAAAAAAAAAN !!!!!!!!!! hurlai-je le plus fort que je pus.

1... 0... Le compte à rebours était terminé.

Je regardai en dessous de moi et aperçus le cube tombait plusieurs mètres sous moi avant de disparaître de ma vue, à cause de l'obscurité. Je pleurais toutes mes larmes de mon corps. Je m'en fichais du visage que devait avoir Armelle. Je venais de perdre Lucas. Je n'avais plus de raison de vivre, plus de raison d'essayer de survivre, plus de raison de me tenir.. Je devais lâcher.. Lâcher ce rebord.. Et me laisser tomber dans ce trou de désespoir et de souffrance infinie.. 

Je tournai la tête, et regardai Armelle. Elle comprit le geste que j'allais faire, et commença à s'approcher de moi, sûrement pour m'en empêcher, mais l'inévitable arriva.. Je lâchai le rebord, et me laissai tomber dans ce trou terrifiant. Ma mort me donnerait que bonheur et liberté.

Je tombai, ventre vers le ciel. J'aperçus Armelle qui se penchait par-dessus le trou, et me regardait tomber, de plus en plus bas. Le cercle se fit de plus en plus petit, jusqu'à ce que je n'aperçus plus Armelle. J'étais dans un noir complet. Je sentais encore le vent de la vitesse de la chute qui soulevait le tissu de mes vêtements. Je tombai, indéfiniment, dans ce trou sans fin.. 

"Vous m'avez manqué mes p'tits choux." [BoyxBoy] (Tome II.)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant