6 | Beaucoup

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    Aujourd'hui, pas de cours d'histoire, pour le plus grand bonheur d'Adam et sa classe. Le petit groupe d'amis s'est rejoint vers le fond de la cour après la cantine. Ils avaient trouvé une balle de foot à moitié moisie coincée derrière la porte du réfectoire. Il y a la route juste derrière le mur, et des enfants avaient dû jouer et la lancer sans faire exprès, mais une chose est sûre, elle est là depuis longtemps.
   Ils commencent à se faire des passes, en tapant dedans avec les pieds. Et chaque coup ramollissait encore plus la balle détériorée. Après un long échange, elle devint tellement dégoûtante que cela se transformait en un tout autre jeu, ne pas se la prendre dans le visage. Tous les coups sont permis. Matt attrape la balle avec ses mains en lâchant un gémissement de dégoût et se mit à courir après Antoine, en fou rire.
   Après dix minutes de course-poursuite dans tout l'établissement, Antoine se laissa tomber à terre sur le goudron après le couloir qui donne sur l'extérieur. Matt, avec grande fierté, se jette sur son camarade et lui écrase le ballon grisâtre et humide dans la tête.
   Sam, Tony et Adam arrivent en courant et se stop un instant après en apercevant la CPE. Celle-ci s'avance en hurlant vers les deux garçons sur le sol, pensant qu'ils se battaient.
   – Monsieur Claris, qu'est-ce que vous faites par terre ? Et vous monsieur Benant, arrêtez tout de suite de lui monter dessus, vous n'êtes pas des animaux ! Puis donnez-moi cette balle, c'est interdit.
   Le duo se relève en frottant leurs habits, gênés.
   – Vous êtes immatures, rappelez-moi en quelques classes vous êtes !
   Ils baissent tous les deux la tête et tentent de s'éloigner pour fuir les reproches de leur CPE. Mais elle attrape la capuche d'Antoine pour l'arrêter.
   – Monsieur Claris, vous avez plein d'absences à justifier, allez le faire maintenant sinon j'appelle vos parents.
   Celui-ci déglutit et acquiesce. Matt met son bras autour de son cou et le dirige vers les bureaux d'administration, suivit de Tony et Sam. Adam sourit en les regardant et part dans la direction opposée vers les bancs.
   Ce n'est pas souvent qu'il se retrouve seul, alors il en profite pour méditer, jusqu'à qu'elle prenne toute la place dans ses pensées. Il se rappelle qu'elle va arriver, et s'asseoir sur le banc comme chaque lundi. Il tourne la tête vers son banc et va se mettre dessus. Elle se retrouvera obligée d'aller sur le même banc que lui, et il aurait peut-être le courage de lui parler.
   Quelques minutes plus tard, la sonnerie retentit et quelques personnes sortent dans la cour, y compris celle qu'Adam attend patiemment. Elle s'approche les yeux droits devant puis fait un pas en arrière en voyant Adam, assis tranquillement sur son banc, un sourire en coin. Il remarque qu'elle est mal à l'aise alors il s'assoit correctement pour ne pas l'effrayer. Son expression du visage devient douce, mais elle s'écarte et s'en va sur l'autre banc. Il soupire, même s'il trouve son acte mignon. Il commence à se demander si elle a les mêmes ressentis que lui sur leurs jeux de regards. Ou si elle est juste timide. Ou si elle lui rend ses mimiques parce qu'elle est polie.
   Il n'a pas le temps de réfléchir à tout ça en profondeur que ses potes sont déjà de retour. Ils s'assoient tous à côté de lui en se bousculant et se poussant pour avoir tous la place de se poser.
   – Elle est trop mignonne...
   – Qui ça ? Lance Sam.
   Adam fait un geste de la tête vers la fille pour leur désigner celle qui le fait chavirer au moment précis. Tony met sa main sur son épaule et le regarde droit dans les yeux.
   – Mec, va t'asseoir à côté d'elle et parle lui.
   – J'étais déjà assis quand elle est allée s'asseoir.
   – Hein ? Et donc t'as la flemme de lever tes fesses parce que t'étais assis avant elle ?
   – Non, c'est pas ça. C'est juste que si elle avait voulu me parler, elle serait venue s'asseoir à côté de moi.
   – Et alors ? C'est normal, c'est aux gars de faire le premier pas.
   – C'est quoi ces clichés ?
   Tony souffle en souriant, cherchant à se moquer du côté farouche et réservé de son ami. Adam en rit et pousse Tony du banc. La fille tourne la tête vers eux, lâchant les lignes de son roman. Son regard croise celui du petit brun, et tous les deux se trouvent gênés par cette situation. Adam s'adosse au banc avec un rictus discret.
   Tony se relève - il était resté allonger par terre après sa chute - et se penche d'une façon provocatrice vers son ami en émoi.
   – Dit donc Adam, c'est quand que tu vas aller lui parler à la fille sur le banc à côté que tu trouves trop mignonne ?!
   Adam écarquille les yeux et met sa main devant la bouche de Tony pour l'empêcher de dire autre chose. Il regarde furtivement en direction de la fille, qui n'a pas levé les yeux vers lui, mais qui sourit franchement.
   Le reste de cette heure de permanence fut rapide et Adam n'a pas osé dire un seul mot à la fille malgré les encouragements de ses amis.

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