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« La solitude où la mort, j'sais pas c'est
quoi l'plus triste » Niro.

__________[YOUNÈS]__________

Dernière feuille signé en mon nom j'me retourne et sors de cette cour, où j'ai musclé la moitié d'la masse musculaire de mon corps, où j'ai vu mon seul et ancien acolyte de cellule mourir, où j'ai assisté à des bastons pour d'la cocaïne, du shit et d'la beuh.

Rien qu'de mauvais souvenirs.

J'avais 18ans lorsque j'suis arrivée pour la première fois ici.

J'traverse les couloirs de cette prison « les beaumettes », prisons de crasseux, d'alcooliques, de dealers.. là où se trouvais ma place durant ces nombreuses années, là où j'ai purgé la moitié de ma peine aux côtés de Salim, l'écraseur de tête tah Kalash Criminel.

Son qualificatif lorsqu'il était encore vivant...

Le temps d'réfléchir à ma vie, j'me rend compte qu'en sortant d'ici personne ne m'attend dehors. J'ai purgé ma peine sans aucunes allées au parloir pendant que je voyais les autres défilées un par un lorsque leurs darons et toutes leurs familles venaient leurs rendre visite. Habitué depuis l'adolescence à la solitude, être sans visites ne m'a pas dérangé.

Ici, c'est la survie ou la mort. C'que vous voyez dehors, personne s'en soucie ici. Que tu portes de la marque ou pas, tu vas devoir travailler par la sueur de ton front pour gagner ton pain.
Tu vas devoir travailler pour te faire respecter.

J'ai pas eu une enfance rempli d'amour moi... j'étais le rejeté d'ma famille dès mon plus jeune âge. À mes 14 ans ma génitrice m'a viré d'sa maison, j'ai du me débrouiller comme j'ai pu, j'ai aussi dû arrêté l'école. C'était pas facile, j'étais encore mineur mais c'qui m'arrangeais, c'est que j'côtoyai déjà des guetteurs a cette époque là. Donc j'ai pas eu d'mal à avoir un rendez-vous avec le boss.

J'ai commencé guetteur en demi-journée, j'ai fini vendeur de kilogrammes à temps plein.

J'ai toujours calculé mes coups, jusque au jour où j'me suis fait pété sans m'y attendre.

C'est toujours comme ça que les choses se passent, lorsqu'on s'y attend le moins.

Et c'est à c'moment là, quand t'es dans la merde que tu te rend compte que dans la vie t'es tout seul.

Ce jour là, jm'en rappelle comme si c'était hier, j'avais rien ressenti, ni peur, ni tristesse, ni haine. Le trou dans lequel j'suis tombé jl'ai creusé moi même, fallait s'y attendre.

J'passe le portillon de sortie et hume enfin l'air frais. On devait être en mi-octobre. Mon anniversaire était y a 2 semaines, j'ai maintenant 24ans.

J'rabat ma capuche sur ma tête et souffle dans mon intérieur avant d'avancer vers l'arrêt de bus direction la Marignane.

J'ressors mon bigo pour regarder l'heure quand j'vois affiché un dernier message datant d'il y'a plus de 6 ans.

+33 6 23 ** ** **  : Moustache.
« trql khey, s'carré »

« khey », j'étais entouré d'hypocrites jm'en rendais même pas compte. Ils étaient là que par intérêt. « Moustache » j'me souviens très bien de sa tête, si un jour j'le croise Hak'Rabbi que j'le saute sans pression. C'est à cause de lui si j'me suis retrouvé toutes ses années ici. J'lui avais fait confiance pour cette vente.

La vente on l'a fait à deux, j'ai purgé seul. Hamdoulilah, ça m'a permit de grandir, de mûrir et de changé. Aujourd'hui j'peux permettre de dire que j'suis un homme.

Mohim, c'est rien. J'y fais plus attention et regarde l'heure affichée sur mon bigo, il était 9heures 26. Le bus arrive j'monte et vais directement m'asseoir au fond.

J'regardais le paysage défilé, le froid et le mauvais temps de ce mois d'octobre. C'est ça la vie ? Vivre sans émotions jusqu'à la mort sans jamais connaître le bonheur ?

Je souffle et m'enfonce dans ce siège inconfortable.

Solitaire Acharné. [ EN PAUSE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant