Commencement

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Ma demande n'a jamais été d'être noir encore moins d'être humain. La nature a imposée son châtiment contre moi, en me façonnant.. negre. suite à ma couleur de peau, ma vie n'est devenue qu'un cercle vicieux où souffrances et larmes dominent en maître. Esclave inné, je fus témoin oculaire des atrocités à répétition contre mes frères des races. Atrocités qui ont bouleversés mon existence déjà funeste. L'espoir au bout de mon cœur, je crois fermement qu'un jour je serai... libre.

Le froid matinal vient perser mon corps à moitié couvert, me faisant grelloter tel un naufragé au milieu de l'océan. Une odeur nauséabonde se dégageait de cette pièce, une odeur métallique qui chatouillait mes narines. J'ouvre les yeux et scrute le lieu espérant trouver autre chose, autre chose qui ne puisse me rappeler mon calvaire mais rien. Je ne vois rien d'autre qu'une pièce sombre et humide, où sont éparpillés ça et là, des corps humains. Des corps humains ressemblants à des cadavres, couverts des plaies immondes, semblaient être en plein putréfaction.

Une mélancolie de plus mélancolique s'empara de moi, une sombre tristesse qui s'amplifia en moi telle un verre que l'on rempli d'eau avec pression. Je restais perplexe quant à mon sort, quant à ma situation.

Les tortures, la faim, le froid, la mort. Oui, la mort qui rôde perpétuellement sur nos âmes, choisissant ses victimes par un coup d'hasard. La vie d'esclave est une vie de loterie.  J'ai du sang de couleur rouge, comme celui des blancs qui coule le long des mes veines. Je réfléchis, je parle, je pleure ! La cause de ma souffrance est le fait que je suis nègre, est-ce une raison valable ? N'est-ce pas que nos divergences devraient nous réunir plutôt que de nous diviser ? Je l'ignore !

Une silhouette apparaît à l'improviste devant l'entrée, offusquant ainsi la faible lumière qui éclairait à peine cette petite pièce où nous sommes. Une voix me tire brusquement d'un moment hystérique;

- Réveillez-vous bandes d'incapables, dit monsieur Brown en frappant sa badine contre le paroi pour mieux se faire entendre.

Brown est un bounty. Un noir fidèle à son maître blanc, un noir qui maltraite ses frères noirs, un noir qui prie pour son maître blanc, un noir prêt à donner sa vie pour son maître blanc, un noir qui aime son maître plus que lui même. Un maître esclave, maître des ses frères. C'est lui qui répartit quotidiennement nos tâches ménagères.

Je me lève en faisant un bond comme les restes des esclaves les plus braves. Les autres par contre se lèvent péniblement, ignorant que ce diable n'aime se faire supplier deux fois. Ce qui a pour don d'attiser sa colère.

- Levez-vous immédiatement ! Avant qu'un crime ne soit commis pour celà, crit-il.

La menace etait prise au serieux. Ils sursautent en s'appuyant chacun contre un mur, apeurés. Un petit sourire pernicieux s'affiche alors sur son visage, sûrement satisfait de générer tant de peur dans leurs esprits. Il repart nos tâches, allant des plus robustes aux plus faibles. Une fois arrivé aux benjamins du groupe, moi et bwala, il dit;

- Vous deux ramenez du bois en grande quantité. Le froid est rude ces derniers temps.

- D'accord maître, lui répondons-nous en chœur.

- Parfait ! Dit-il avant d'allumer un cigare qu'il sortit de sa poche

Nous quittons immédiatement le lieu et prenons la direction des champs afin d'exécuter notre tâche ou plutôt notre sentence. Le long chemin parsemé des cailloux m'épuise tandis que les chants doux de rossignols créent une euphonie des plus agréables.

- Quelle belle mélodie ! M'exclame-je.

- Pas plus belle que notre existence ! Ironise bwala.

Je ne trouve rien à répliquer pour lui consoler car une forte détresse se dégage de son visage. Il est tout aussi perdu que moi, le pauvre, mais comment ne pas l'être suite au traitement inhumain que nous endurons chaque jours. Bwala est un ami, un frère, le seul que je n'ai jamais eu. Un garçon fort et courageux mais parfois triste et solitaire. Ses parents comme les miens furent lynchés pour s'être révolter contre leurs maîtres. Fin des personnes préférant mourir vivants que de vivre morts, j'espère seulement qu'ils ont enfin obtenu dans l'au-delà, la paix tant convoitée ici sur terre.

Couleurs - La Lutte pour la Liberté Où les histoires vivent. Découvrez maintenant