XXI. Union

30 13 14
                                    

— Tu as vaincu Garwvyr, Denwall. Je ne t'en serais jamais assez reconnaissant. Je tiens toujours ma parole, et je t'avais promis que tu retrouverais ta fiancée si tu parvenais à terminer cette quête.

Le Grand Tout jouait parfaitement son rôle de vieillard, et s'il était furieux que Denwall ai survécu, il n'en montra rien.

— Dis-moi, jeune homme courageux, continua le Dieu caché, jusqu'à quel point t'es-tu sacrifié pour parvenir à terminer cette mission? Il me semble que beaucoup de temps s'est écoulé depuis depuis la dernière fois que je t'ai vu...

— C'est vrai, vieil homme. Pour tuer ce dragon, j'ai donné mon âme.

— Oh, vraiment?

Le vieillard jouait la surprise, mais un bref rictus de satisfaction sur son visage n'échappa pas au jeune homme.

— Oui, et je ne peux plus aimer... Mais ce voyage m'a appris beaucoup de choses, et au fond je vous en suis reconnaissant.

— C'est bien, c'est bien. Alors, Denwall, tu reverras ta fiancée... Elle t'attend, dans une petite cabane, non loin d'ici. Regarde cette grande montagne, vers le Sud. Dirige-toi vers elle, et quand tu rencontreras la rivière, suis la vers l'aval. La cabane se trouve sur sa rive droite.

Alors, le Grand Tout disparu, et Denwall se retrouva seul, le cœur battant. Il suivit le chemin indiqué, et parvint à une petite hutte de rondins. Il y pénétra, et y trouva pour tout meuble un seul lit. Un corps y était allongé, tourné vers le mur, de longs cheveux clairs étalés sur le matelas. C'était Aëla.

En entendant Denwall rentrer, elle se redressa, et trouva la tête vers lui.

Le cœur du jeune homme manqua un battement, et repartit deux fois plus vite. Il resta regarder la jeune femme et elle fit de même. Elle n'avait absolument pas changé. Aucun des deux fiancés n'osa faire le premier pas pendant de longs instants, puis Denwall courut vers elle, voulant la prendre dans ses bras.

Elle, ne fit pas un geste. Une ombre de tristesse passa dans son regard, et elle secoua la tête doucement.

Au moment où les bras de Denwall auraient dû rencontrer le corps de sa fiancée, il lui passèrent à travers, et le jeune homme, emporté par son élan, s'écrasa sur le lit. Avec difficulté, il se releva, et regarda sa fiancée sans comprendre.

— Aëla...

— Je suis désolé. Faire semblant ne sert à rien, Denwall. Tu ne m'aimes plus.

— Mais... es-tu vivante?

Une larme coula sur la joue de la jeune fille.

— Je ne...

Alors, pour la quatrième fois depuis le début de son voyage, tout devint blanc autour de Denwall, et un mauvais pressentiment l'envahit. Qu'allait-il perdre, cette fois? Son âme, il ne l'avait déjà plus. Il avait déjà rencontré Olwen, Keridwenn et les quatre Arkassan.

Devant lui, deux formes se matérialisèrent, sortant d'une lumière éblouissante. L'une des personnes était Laëna. L'autre était vêtue d'une cape et d'une capuche qui masquait complètement son visage.

Puis le blanc disparu, et ils se retrouvèrent tout les trois à l'intérieur de la cabane. Aëla ne s'y trouvait plus.

Alors, une rage immense prit Denwall. Si Laëna était resté, elle l'aurait défendu contre les guerriers des montagnes, et il aurait encore son âme, et il aurait pu encore aimer Aëla, et...

Il s'apprêtait à déverser sa haine sur la jeune Déesse, mais l'inconnu à la cape lui tendit une petite boite.

Une petite boite, identique à celle dans laquelle il avait rendu l'âme d'Eòghan.

Cela ne se pouvait... quel tour étaient encore en train de lui jouer les Dieux?

Denwall tremblait. Il tremblait de peur, il tremblait de crainte, il tremblait d'appréhension.

Surtout, il tremblait d'espoir.

Alors, il prit la petite boite en bois, l'ouvrit.

Et à l'intérieur, il vit exactement l'objet de son espoir. Une petite sphère lumineuse, rougeoyant dans la pénombre de la cabane. Une âme.

D'un regard fiévreux, il regarda Laëna, qui hocha la tête une fois en souriant doucement.

Alors, de sa main gauche, il prit l'âme. Elle lui pénétra dans la peau, et sembla remonter le long de son bras. Alors, les émotions et ses anciens sentiments, les vrais, l'envahirent à nouveau. C'était des cris de joie, c'était des nuits sous les étoiles, c'était les étreintes de celle qu'il aimait, c'était un premier baiser. C'était chaud, c'était doux. C'était juste... magnifique. Agréable, beau à en pleurer.

Et alors, l'inconnu enleva la capuche qui lui couvrait le visage. Des cheveux clairs en sortirent, cascadant sur ses épaule. De grands yeux marrons, des traits fins, des pommettes bien dessinées, des lèvres parfaites.

Aëla.

Elle entrouvrit sa bouche, comme si elle manquait d'air, tendis qu'une inspiration tremblante soulevait sa poitrine.

Cette fois-ci, tout deux firent un pas précipité vers l'autre, et rencontrèrent un corps matériel, palpable. Ils s'étreignirent, longtemps, s'embrassèrent.

Ils s'aimaient.

Laëna sortit de la cabane, levant les yeux au ciel mais souriant intérieurement.

Les Larmes de CristalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant