Une année inoubliable

Chapitre V

Le jeune homme observait le paysage à travers la fenêtre, ses pensées errantes se mêlant aux ombres qui glissaient sur les rues familières. Le cœur lourd, il laissa échapper un soupir, sentant le poids de l'incertitude s'abattre sur ses épaules. La voix calme de son père le tira de ses pensées, ramenant brusquement son attention à la réalité de sa situation. La pièce était imprégnée de cette atmosphère aseptisée des hôpitaux, mais la présence rassurante de son père apportait un semblant de chaleur humaine. Il sentit une main se poser sur son épaule, le soutenant dans son combat intérieur.

— Reste concentré, murmura son père, son regard empreint d'un mélange de soulagement et d'inquiétude.

Il tenta de se redresser avec difficulté, ses muscles endoloris protestant conte le moindre mouvement. Chaque mouvement semblait une montagne à gravir, mais il refusa de céder. Les paroles du médecin résonnaient dans son esprit, mais elles étaient comme des échos lointains, perdues dans le brouillard de sa confusion et de sa douleur.

— Tiens encore deux petites minutes, continua son père, l'encourageant avec douceur.

Contractant tous les muscles de ses bras sur la barre au-dessus de sa tête, il lutta pour ne pas céder au poids de son corps qui ne demandait qu'à retrouver le réconfort des dalles froides de la pièce. Bien décidé à battre son record, il sentit une lueur de détermination s'allumer en lui. Aujourd'hui, il y arriverait, même si chaque instant était une bataille contre lui-même et contre les ombres de son passé.

Après l'exercice de rééducation, le fils se sentit épuisé, mais également satisfait d'avoir surmonté ce défi physique. Les félicitations du médecin et des infirmières résonnaient dans ses oreilles, mais malgré cette petite victoire, il ne pouvait s'empêcher de ressentir un vide persistant au fond de lui. C'était comme si une partie essentielle de son être avait été arrachée, laissant un gouffre béant qu'il ne parvenait pas à combler.

***

Il monta dans la voiture aux côtés de son père, et pendant le trajet, une atmosphère silencieuse imprégnait l'habitacle. Son père jetait occasionnellement des regards inquiets en sa direction, mais aucun mot n'était échangé. Cependant, alors qu'ils roulaient sur la route familière de leur ville, une douce mélodie se fit entendre à la radio, rappelant un souvenir lointain de leur passer ensemble. Son père baissa légèrement le volume et, avec un sourire nostalgique, il se tourna vers son fils.

— Tu te souviens de cette chanson ? demanda-t-il, ses yeux pétillants d'affection et de souvenirs partagés.

Le jeune homme hocha la tête avec un sourire.

— Impossible de l'oublier celle-là.

Le conducteur augmenta légèrement le volume des enceintes du véhicule, laissant échapper les notes du morceau qu'ils adoraient tous les deux. Leurs voix se joignirent naturellement, harmonisant avec la musique alors qu'ils chantaient ensemble. Ce moment de complicité et de partage apporta un sentiment de réconfort et de connexion entre le père et le fils, faisant oublier un instant les tourments de l'amnésie et de l'incertitude.

Cependant, alors que la chanson touchait à sa fin et que le silence retombait dans la voiture, les pensées tourbillonnantes du jeune homme reprirent leur cours, l'entraînant dans un tourbillon d'émotions et de souvenirs fragmentés. Des éclats de rire résonnaient dans sa tête, accompagnés du doux murmure de son prénom dans une voix qu'il connaissait bien, mais qu'il ne pouvait pas identifier. Des silhouettes indistinctes s'approchaient de lui, mais au lieu de ressentir de la peur, il se sentait étrangement apaisé.

Soudain, une silhouette se détacha du flou ambiant, devenant légèrement plus nette. Une femme, entourée d'une aura de lumière dorée, lui souriait d'un sourire éblouissant. Ses cheveux semblaient briller comme des fils d'or dans le soleil couchant. Le jeune homme sentit un élan de chaleur l'envahir, une familiarité diffuse qui le réconfortait malgré son incapacité à se rappeler qui elle était.

Puis, comme une brusque rupture dans un rêve, la silhouette se dissipa, le sourire se fondant dans les ombres. Le doux murmure de son prénom se transforma en un cri déchirant de désespoir, faisant frissonner le jeune homme jusqu'au plus profond de son être. Il ouvrit les yeux, le cœur battant, cherchant désespérément à comprendre ce qu'il venait de vivre.

Qui es-tu ?