01 | pretty woman won't you pardon me

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Bonne lecture !

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– Tu sais que venir te plaindre à moi pour ce genre de chose est vraiment irrespectueux ?

Daishou croqua dans son sandwich bien trop cher, et mâcha avec ennui tout en se délectant du goût de carton que ces choses vendues à la cafétéria de la fac possédaient. Oikawa le regarda faire en silence, les bras croisés sur sa poitrine. Il n'avait même pas enlevé ses lunettes de soleil pour le déjeuner.

– Tu veux vraiment que je te plaigne ? continua Daishou une fois la bouchée avalée. Très bien, alors écoute : oh, mon pauvre petit Tooru adoré, ta vie est vraiment compliquée. Comment ta grand-mère milliardaire ose-t-elle t'inviter à ses soirées pour personnes riches alors que tu es célibataire ? Vraiment, quelle cruauté, tu devrais appeler les services sociaux.

Il croqua à nouveau et regarda les sourcils d'Oikawa se froncer. Son ami soupira bruyamment, faisant se retourner quelques personnes, puis enleva enfin ces foutues lunettes et le regarda dans les yeux. Il avait des cernes sous les yeux, et Daishou manqua de l'insulter en comprenant qu'il n'avait une fois de plus pas passé la nuit chez lui.

– Tu peux arrêter ton petit ton péteux avec moi, je le maîtrise bien mieux que toi.

Il se rassit lentement contre le dossier de sa chaise en plastique qui couina sous ses fesses, puis croisa ses jambes. Il remit ses lunettes.

– Déjà, ma grand-mère n'est que millionnaire, et crois-moi c'est déjà bien assez. Ensuite, ce ne sont pas des soirées pour personnes riches mais des galas de charité pour des associations, donc c'est quand même un peu plus important. Et pour terminer, elle m'invite à chaque fois pour pouvoir me dire que je ne suis qu'une catin qui couche à droite et à gauche. Et pour séduire les riches femmes de plus de cinquante ans qu'elle invite, mais c'est pas le sujet.

Daishou fit la moue et pencha la tête sur le côté.

– Mais elle a raison. Tu es une catin qui couche à droite et à gauche. Tu es la personnification de ce cliché sur les personnes bisexuelles. Oikawa, si j'avais la motivation nécessaire je demanderais de faire un vote à main levée sur les personnes qui n'ont pas couché avec toi dans cette pièce.

Oikawa balaya la cafétéria du regard et grimaça.

– Et alors ? Si Dieu m'a donné ce corps, c'est bien pour qu'il serve à quelque chose.

– Par pitié, ferme-là.

Daishou adorait Oikawa ; s'il traînait encore avec lui quatre jours par semaine, c'était quand même car il lui trouvait quelques qualités. Seulement la vie sentimentale d'Oikawa Tooru était le sujet qu'on évitait si on ne voulait pas s'arracher les cheveux. Une vraie catin.

– J'ai bien envie de lui rabattre son caquet, dit-il soudain en faisant la moue.

Sa chaise couina de plus belle et Daishou fut certain que jamais elle n'oserait craquer sous les fesses d'Oikawa. Ce salaud avait la chance à ses côtés.

– Personne ne dit « rabattre son caquet » en 2020. C'est interdit.

– Si je pouvais trouver quelqu'un pour m'accompagner, dit-il en l'ignorant complètement, je suis sûre qu'elle arrêterait de me sortir son petit sourire de vieille femme riche et hautaine. Elle pourrait même dire « Oh, Tooru chéri, je suis tellement désolée de t'avoir traité de pute. Tu es mon petit-fils adoré, et tu mérites bien mieux que d'aller faire les beaux yeux aux mamies riches de cette salle. » Oh oui, elle pourrait.

Daishou soupira. Quand il partait dans ce genre de trip, mieux valait le laisser faire et garder le silence. Il mâcha son sandwich en silence, dardant sur lui un regard désespéré.

– Si je lui présentais quelqu'un de bien, elle serait forcément rassurée. Elle se dirait que j'ai enfin choisi la voix de la raison et que ma vie de dépravé est derrière moi.

– Tu vois, tu le dis toi-même.

Mais Oikawa ne lui accorda même pas un regard, trop occupé à sortir son téléphone pour passer en revue ses contacts.

– Il me faudrait quelqu'un de propre. Et de beau. Un mec, ça serait bien, comme ça en plus elle pourra avoir le seum.

Un grand sourire s'étala sur son visage, et Daishou leva les yeux au ciel. Il aurait pu se lever et partir, ça n'aurait rien changé.

– Mais si je demande ça à quelqu'un avec qui j'ai couché, tu crois pas qu'il va s'imaginer des trucs ? Genre, que je veux le présenter à ma famille, tout ça ? Et si jamais il s'attache ? Mon Dieu l'horreur.

Il grimaça franchement et reposa son téléphone.

– C'est peut-être pas une bonne idée. Je ferais mieux d'y aller seul et de pousser ma sœur dans ses griffes. Mais bon, bizarrement elle a plus de scrupules à l'envoyer sur le terrain, elle. Sale sorcière.

Il regarda ses ongles, en proie à une réflexion intense. Daishou finit son sandwich, s'essuya les mains, but une gorgée d'eau, puis se décida à intervenir. Il était un si bon ami. Oikawa ne le méritait pas.

– J'ai peut-être quelqu'un à te proposer.

– J'irais pas à ce gala avec toi, c'est hors de question.

Daishou lui envoya un coup de pied sous la table, et se récolta plusieurs regards noirs de personnes qui n'étaient même pas assis près d'eux. Oikawa Tooru et son fan-club étaient effrayants.

– Je ne parlais pas de moi, crétin. En fait, Kuroo connaît Mika, qui connaît une fille, qui connaît un garçon qui connaît un mec. Tu es riche comme Crésus, non ? Ce mec est super pauvre et galère avec ses études, son appart', et son job étudiant. Il est canon, et serait certainement d'accord pour t'accompagner à ta soirée.

– Tu veux que je le paye ?

L'air scandalisé qu'il arborait fit froncer les sourcils de Daishou.

– Quoi ? Depuis quand t'as des principes ?

– Non, en fait je trouve que c'est une super idée ; si je le paye alors ça évite les complications et tout le monde est content ! Ce qui m'étonne, c'est que ce soit toi qui aies eu cette idée. Qui aurait cru que derrière ce visage affable et ces cheveux verts mal colorés se trouvait un cerveau en état de marche ?

Il se récolta un nouveau coup de pied.

– Pour la peine, t'iras voir Mika pour avoir son numéro. Moi j'ai fait mon taff.

Daishou se leva, jeta l'emballage de son sandwich goût carton à la poubelle, puis quitta la cafétéria.

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Des bisous !

Walking down the street || IwaOiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant