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Au café on ne parle plus que de ce fameux procès. D'autant plus qu'Hélios n'est pas venu aujourd'hui et c'est Octave qui remplace son autorité. Je suis surpris que ce ne soit pas Rana qui endosse ce rôle, mais peut-être ne se sent-elle pas faite pour ça. Et d'après ce que j'ai compris, Octave est l'employé le plus ancien et le plus digne de confiance. J'ai un gros doute sur le deuxième point mais le fait est que je n'ai pas le choix de me plier à cette décision.

« Ok tout le monde ! Aujourd'hui c'est moi qui gère le café. Tout va bien se passer. Rester concentrer, faites bien votre travail et tout ira bien. Faites comme d'habitude, vous ne remarquerez même pas la différence. »

Sauf que la différence se remarque déjà. Octave n'a pas fanfaronné sur son nouveau rôle. Il n'a pas profité de ce moment pour assouvir son autorité. Il a souri, tout simplement.

Mais comment faire comme d'habitude ? Comment ne pas s'inquiéter ? Surtout quand ce procès est le seul sujet de conversation que nous ayons... Nous regardons tous notre manager par interim totalement déboussolés.

« Allez au travail ! »

Son sourire effraie tout le monde. Il n'est pas à même à nous rassurer. Il est mauvais dans tout ce qu'il entreprend visiblement. Mais au moins son sourire semble sincère bien qu'il cherche à cacher son incompétence. Il n'a aucune idée de quoi faire ou quoi nous dire alors il sourit.

Je secoue la tête et je suis le premier à bouger. Je vais dans la salle du café puisque nous devons faire «comme d'habitude».

« Eh Asher ! » me lance Octave.

Le regard noir que je lui offre le dissuade de m'adresser la parole. Nous ne sommes pas encore ouvert alors je m'assois à une table, seul. Ni Emma ni Léandre ne travaillent aujourd'hui. Je me rends compte que je vais souvent me retrouver seul quand Emma sera partie... J'ai beaucoup de mal à entretenir des relations et à en entamer de nouvelles depuis toujours, donc cette solitude, j'en ai l'habitude. C'est un peu devenue ma colocataire.

J'ai le regard dans le vide mais je finis par me rendre compte qu'ils sont posés sur Rana. Elle affaissée sur le comptoir, la tête posée sur ses bras. A son habitude elle porte sous l'uniforme un t-shirt aussi noir que ses cheveux, manches longues jusqu'au ras des poignets, col haut.

Je m'approche alors doucement d'elle.

« Tu vas bien ? » je lui demande.

Elle se redresse d'un coup, surprise.

« Hein ? »

Je la vois se tourner à droite puis à gauche, un peu perdue. Puis elle pose ses yeux sur moi et me sourit.

« Tu disais quoi ?

— Je t'ai juste demandé si tu allais bien.

— Oh ! Oui, ça va ! et toi ?

— ça peu aller.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— La situation... C'est bizarre non ? Et on en parle d'Octave ?

— Ouais c'est sûr. Tu verrais l'ambiance chez moi... Enfin je... Octave attendait ce moment depuis qu'il a signé ce contrat avec Hélios !

— Et pourtant j'ai l'impression qu'il n'en profite pas...

— Attends, la journée n'est pas finie ! » plaisante Rana.

Je ris de bon coeur avec elle. Et j'apprécie le fait qu'elle se moque d'Octave.

Mais cette joie pétillante qui a momentanément habité son être disparaît rapidement. A chaque nouveau coup d'oeil que je lui lance, Rana s'enfonce petit à petit plus dans une torpeur. Je rage de ne pas pouvoir tout arrêter et aller la voir, mais le travail m'en empêche. Je n'arrive pas à comprendre ce qui la met dans un état pareil. Quelques heures auparavant elle riait, maintenant ses mouvements se font lent et douloureux. Ses yeux sont vides et son visage neutre.

Des Cendres sous les CieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant