Chapitre 34

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Les trois acolytes sortirent de l'hôtel dans l'après-midi. Après un dernier brin de tourisme, ils prirent la route de Los Angeles, Ken au volant et Tupac en fond sonore quand ils passèrent une dernière fois devant le casino-hôtel MGM Grand. Mamadou avait laissé le siège passager à Athénaïs avec un sourire complice aux lèvres que la jeune femme avait retourné gaiement.

« Nigga, West Side ! Bring it on ! » imita celle-ci avec le fort accent populaire de la côte ouest américaine.

C'était si inattendu que les deux hommes éclatèrent de rire.

« Si, si, Say', la racaille, railla Mamadou.

Die, nigga ! Die ! poursuivit Athénaïs, un index menaçant pointé vers le pare-brise.

— Tu l'as squattée, cette chanson, en fait, fit remarquer Ken.

— Say', c'est une vraie gangster mais elle se cache bien, taquina Mamadou.

— Tu savais que Tupac était sorti avec Madonna ? lança la concernée pour faire dévier la conversation.

— Ah ouais ? »

La radio continuait à diffuser la discographie du rappeur emblématique du gangsta rap tandis que les trois amis discutaient de sa vie et des fusillades qui l'avaient jalonnée :

« All I need in this life of sin, is me and my girlfriend

Down to ride to the bloody end, just me and my girlfriend »

La main libre de Ken qui n'avait pas besoin de s'occuper d'une boîte de vitesses manuelle chercha celle d'Athénaïs. Elle se laissa faire, une pensée insouciante vers un autre qui avait agi de la même manière envers elle, à une certaine période de sa vie. « Les voitures et les femmes.... Certains clichés restaient stables. » observa-t-elle, avec ironie.

Elle se demandait où Thibault en était dans sa vie. Il devait avoir retrouvé quelqu'un. En même temps, quelle fille ne tomberait pas dans ses bras ? Au fond, il n'était pas un mauvais garçon. Il ne pouvait simplement pas la gérer, elle. Et elle n'avait pas su le gérer, lui. Ken, en revanche... Elle agrippa la main de l'homme qui avait sorti les lunettes de soleil rondes et la chemise à fleurs verte foncée, marron et blanche. Il lui serra la main un peu plus fort en retour. Il fallait espérer. Prendre le temps.

Ken parlait du batteur qu'il avait rencontré à la Nouvelle-Orléans, deux ans auparavant. Ils avaient gardé contact. Il n'aurait pas l'occasion de le rencontrer lors ce séjour, mais il réfléchissait à un moyen de collaborer à nouveau avec lui.

Ils discutèrent ainsi la majeure partie de la route. Athénaïs apprit ainsi que Ken et Mamadou repartaient pour la France trois jours après leur retour à Montréal, ce qui la plongea dans une triste atmosphère de fin de vacances. La vie était ainsi faite, tenta-t-elle de raisonner, déprimée. De toute manière, ils n'auraient pas pu se revoir d'ici son propre départ pour Paris.

Il était une heure du matin passée quand Athénaïs éteignit le contact devant leur immeuble angeleno. Ils montèrent ensuite à leur appartement, mangèrent un peu avant d'aller dormir.

« Je passe chez toi, ce soir ? proposa Ken à Athénaïs une fois que Mamadou eût passé la porte de la salle de bains.

— OK, mais...

— Oui, on ne fera rien. »

Athénaïs fut amusée par la réplique de Ken qui ne put se retenir de souffler :

« C'est une vraie torture d'être avec toi. »

Déconcertée, Athénaïs ne sut comment prendre cette dernière phrase. Ken rit de son air perplexe, saisit le visage mate de la jeune femme entre ses deux mains et déposa un baiser sur ses lèvres, puis un autre, ensuite un autre... jusqu'à ce qu'Athénaïs vînt le chercher d'une caresse langoureuse. Ken enroula alors ses bras autour d'elle, avec la sensation indicible que plus rien ne pourrait les séparer.

" Non. "Où les histoires vivent. Découvrez maintenant