Chapitre 1

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J'ai toujours cru que dans les histoires d'amour le plus dur était de tomber amoureux. De se trouver parmi plus de six milliards personnes. Se rencontrer, apprendre à se connaitre, se découvrir l'un l'autre. S'aimer. Je pensais que le plus important c'était le "avant" la relation, quand on se cherche encore. C'est vrai, quand on regarde ces conneries de films à l'eau de rose que les filles adorent, toute l'histoire se passe avant que les personnages se mettent réellement ensemble. On les regarde tomber amoureux et une fois que c'est fait, une fois qu'on sait qu'ils s'aiment le film est terminé. Fin de l'histoire. Je me suis bien planté. Ce n'est pas ça le plus dur dans une histoire d'amour. Ce n'est pas de trouver la bonne personne et tomber amoureux. Non. Le plus dur c'est le après. Aimer c'est facile. Aimer la personne comme elle a besoin d'être aimé c'est beaucoup plus difficile. Je ne connais pas les règles de l'amour, mais je crois qu'avec Nicolas on a tout fait à l'envers. Je l'ai aimé avant même de le réaliser. Tomber amoureuse de lui n'a pas été difficile car je ne m'en suis pas réellement rendu compte. Je ne saurais même plus comment s'est venu où comment ça a commencé. Je me suis senti changer sans vraiment comprendre. Je me suis senti dépendante de lui sans vraiment le voir. Puis un jour j'ai ouvert les yeux et je l'aimais. C'était comme ça, c'était en moi. C'est comme quand on tombe malade. On s'endort le soir en pleine forme et on se réveille le lendemain matin malade comme un chien. On ne sait pas ce qui s'est passé dans la nuit pourtant on est là avec notre fièvre et on doit de se démerder avec. C'est la même chose. Je n'étais pas amoureuse, puis un jour j'ai ouvert les yeux et j'ai réalisé que je l'étais.
Je n'ai pas besoin de mots pour savoir qu'il m'aime. Il m'aime comme je l'aime et normalement c'est là que l'histoire aurait du se finir. On est amoureux, on est ensemble et le film est terminé. Sauf qu'on est pas dans un film et que les films nous privent de la partie la plus belle d'une histoire. Parce que après tomber amoureux, il y a une autre étape : Apprendre à aimer. Je veux aimer Nicolas comme il mérite de l'être.

Je veux qu'il sente aimer comme lui me fait me sentir aimer. Mais j'ai peur de ne pas savoir comment faire. J'ai peur de ne pas savoir m'y prendre. J'ai peur de ne pas savoir l'aimer.
Ça fait seulement trois jours que l'on s'est réveillé ensemble dans ma voiture. On essaye de se relever de ce qu'il s'est passé ce soir là. Et on a décidé de commencer en reconstruisant sa chambre ensemble. Parce qu'en la "reconstruisant" ensemble , en changeant tous ses meubles qu'il a détruit, en refaisant la peinture. En lui faisant une nouvelle chambre c'est comme si l'on recommençait de zéro. Qu'on repartait sur de nouvelles bases sans effacer les anciennes. Son ancienne chambre représentait le passé et nous on veut voir l'avenir qui nous attend. Ce n'est peut être qu'une métaphore stupide mais je crois qu'on a en besoin, l'un comme l'autre. Autant que lui que moi. J'ai peur. Le savoir malade, le savoir dépendant de la drogue, savoir qu'il se fait du mal, ça m'effraie. Ça m'effraie parce que je me sens impuissante face à ça. J'y pense tout le temps même si je ne dis rien. Je ne sais pas quoi dire en réalité. C'est vrai, qu'est ce que je suis censé dire ou faire ? 
MOI-(Hey bébé arrête la drogue c'est pas bien et abîmer ton corps aussi.)
Il le sait déjà tout ça. Alors voilà, je me sens totalement impuissante et inutile et ça me rend malade. J'aimerais l'aider, le sortir de tout ça mais j'ai le sentiment de ne pas en avoir les moyens et c'est frustrant, oppressant. Alors je l'aime. J'essaye de l'aimer de mon mieux, de lui faire comprendre comme je l'aime. Et même si je ne dis rien, je le surveille à ma façon. On ne s'est pas quitté depuis trois jours. Son père est encore à New York pour quelques jours et nous on a passé notre temps à s'occuper de sa chambre. Aller dans les magasins choisir de nouveaux meubles, se les faire livrer, les monter -AU SECOURS. Heureusement qu'il est plus doué que moi pour ça. J'aime faire tout ça avec lui et... et comme ça il est avec moi, je l'ai sous les yeux et au moins je sais qu'il ne fait pas de conneries. Depuis le matin dans ma voiture il ne s'est pas re-réveillé à mes cotés une seule fois mais il était là.

Il était là à chaque fois soit dans le lit, ( enfin, son matelas qu'on a trainé jusque dans son dressing le temps des travaux ), soit dans la maison, soit déjà entrain de peindre. Mais il n'était jamais absent et c'est un pas en avant énorme. Il ne fuit plus comme avant.
Mais par moment j'ai le sentiment qu'il m'échappe. J'aimerais trouver les bons mots pour expliquer ce que je ressens mais il y a ces moments où j'ai l'impression qu'il n'est pas là. Qu'il s'est enfermé dans son monde à lui et qu'il m'empêche d'y rentrer. J'aimerais être capable de savoir, de comprendre ce qu'il se passe dans sa tête mais il se ferme complètement à moi. Comme ce matin.
Quand j'ai ouvert les yeux -parce que il m'écrasait tellement que je ne sentais plus mes jambes- je l'ai vu rentrer. On dort avec la porte du dressing ouverte pour avoir de la lumière la nuit. Il était à peine 7h du matin. Il a refermé la baie vitrée avant de sortir son manteau et ses chaussures. J'ai vu à son visage que quelque chose n'allait pas. C'est la première fois qu'il partait comme ça. Même de loin j'ai pu voir la larme qu'il a effacé de sa main avant de se rendre compte que j'étais réveillé. 
M-"Pardon, je ne voulais pas te réveiller. 
N-"C'est rien, viens."
J'ai tendu la main vers lui, il est venu me rejoindre dans le lit. On s'est allongé tout les deux, mon bras entourant ses épaules et sa tête posée sur mon torse. Quand j'ai senti sa peau gelée j'ai rabattu la couette sur nous en le serrant contre moi. Mes doigts se sont perdus dans ses cheveux en jouant doucement avec ses boucles. On est resté un long moment silencieux. Je n'ai pas osé lui demander où il était mais pour que sa peau soit aussi froide c'est qu'il est resté longtemps dehors, et j'ai tout de suite pensé à Samantha(sa soeur) et au cimetière. Le sentir aussi mal et avoir le sentiment de ne pouvoir rien faire était une vraie torture. Je déteste ce sentiment d'impuissance, mais il est Nicolas et même si je crois qu'une part de lui restera toujours un mystère pour moi, je sais que quand il ne va pas bien les mots sont inutiles.

Essayer de le forcer à parler est une erreur, c'est le meilleur moyen de le voir se refermer et le perdre entièrement. Alors j'ai attendu en silence, en le serrant contre moi autant que je sentais qu'il avait besoin de l'être. J'ai embrassé sa tempe plusieurs fois en lui caressant les cheveux et c'est lui qui a fini par le briser. Le silence. 
N-"Tu crois que j'en suis capable ?" 
Ce n'était qu'un murmure, pourtant j'ai pu ressentir toute sa souffrance à travers ses mots. Mes yeux se sont voilés, et mon cœur s'est serré. Je ne sais pas ce qu'il a voulu dire, pourtant...
M-"Je crois en toi." 
Parce que même si je ne savais pas de quoi il parlait, je sais qu'il est capable de réussir. Je crois en lui. Je crois en lui comme je n'ai jamais cru en personne avant. A mes mots il a relevé la tête vers moi et c'est là que j'ai vu qu'il pleurait. Il pleurait silencieusement dans mes bras sans que je ne m'en rende compte et ça m'a tellement fait mal que je ne sais pas comment j'ai fait pour ne pas pleurer à mon tour. 
N-"Tu crois en moi ?" 
J'ai effacé doucement avec mon pouce une autre larme qui roulait sur sa joue. 
M-"Je crois que tu es capable de réussir, n'importe quoi."
N- "Mais si je n'en avais pas la force ?" 
Il m'a semblait tellement avoir besoin d'être rassuré que j'avais l'impression de ne l'avoir jamais vu aussi fragile. 
M-"Tu en as la force."
N- "Et si j'échouais ? 
M- "Je serais là pour te rattraper."

Je crois que c'était l'une des conversations les plus dures qu'on ai jamais eu. Il est resté un long moment à me regarder avant de reposer sa tête sur mon torse. Il a emmêlé ses jambes aux miennes et j'ai recommencé à lui caresser doucement les cheveux. 
N-"Je veux réussir..." 
Et le ton de sa voix était tellement douloureux que j'ai été incapable de répondre quoi que ce soit. Je l'ai serré plus fort contre moi et je n'ai pas réussi à la contrôler. C'était trop dur, j'ai laissé une larme couler le long de ma joue.
Regarder, impuissant, la personne qu'on aime souffrir est l'une des choses les plus dures au monde. Ce matin je me suis promis une nouvelle fois que je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour l'aider à aller mieux. Pour réussir à lui rendre ce bonheur que la vie lui a enlevé. On a peut être tout fait à l'envers dans notre histoire avec Nicolas mais ça m'est égal. Je veux qu'on avance, lui et moi, ensemble. Même si je ne sais pas comment, je veux le sortir de toutes ces merdes qui l'ont rendu dépendant. Je veux apprendre à l'aimer, l'aimer vraiment parce que je crois en lui, je crois en nous.
Tout s'apprend, même l'amour.

Nicolas Et MoiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant