Point de vue de du mur de la maison des Levaque

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Contexte: Cette année, ma classe et moi avons du lire Germinal d'Emile Zola (un livre qui parle des problèmes dans les mines de charbon notament: pas de panique vous pouvez tout à fait comprendre mon texte sans avoir lu ce classique) et nous avons tous du ensuite écrire un texte de notre choix (documentaires, épitaphes, abécédaires de la mine, faux articles de journaux, etc.) pour un blog. (Je vous afficherai le site dès que j'aurai retrouvé le lien si vous voulez juger les textes de mes camardes). Le mien est tout simplement axé sur le point du vue d'un mur (et pour la petite histoire, j'ai du trouver une fin alternative car ,selon mon enseignant, je cite, "le mur s'implique trop dans l'histoire). Enfin bref, bonne lecture (une fois de plus) ! (Je sais, j'utilise beaucoup trop de parenthèses mais ça me fait kiffer)


J'étais là, juste en face de la maison des Maheu, moi, le mur de la maison des Levaque. On approchait gentiment de décembre et c'était une des premières fois que les flocons commençaient à virevolter dans le ciel gris qui couvrait Montsou. Leur étreinte avait duré à peine quelques secondes après qu'il a passé ses doigts noircis sur sa joue pâle. Je n'aurais jamais deviné, à cette époque, tout ce que le baiser entre Philomène et Zacharie allait impliquer. Pas moins que je n'avais compris, le jour où cet homme affamé au manteau rouge nommé Etienne était passé devant moi tout ce qu'il allait changer.

Je ne savais pas que Zacharie allait féconder la petite Philomène à même mes briques noircies de charbon. Les lois implicites du coron l'obligent : lorsqu'on donne un bébé à une femme, le mariage n'est pas un choix.

Au début, le futur bébé semblait avoir mis Philomène dans tous ses états, si bien qu'elle passait et repassait sans cesse devant la maison durant des heures. Tandis que sa marche nerveuse empêchait les Levaque dans mon dos de dormir, elle devait retirer sa main à maintes reprises à cause du goût de charbon logé sous ses ongles qu'elle essayait désespérément de ronger.

La vérité avait éclaté un jour d'ébat entre elle et Zacharie. Ils avaient pour habitude de se donner l'un à l'autre, plusieurs soirs par semaines à même mes briques. Ce jour-là, Zacharie s'était arrêté net et avait fait un regard confus à sa bien-aimée. La vérité sautait aux yeux mais Zacharie avait quand même oublié l'absence de sang durant ces trois mois.

Durant les mois qui avaient suivi, la jeune fille avait arrêté de descendre à la mine quand sa veste était devenue impossible à fermer sur son énorme ventre.

Zacharie et Philomène s'étaient aussi passé la bague au doigt mais la cérémonie n'avait rien de mémorable comparé à ce que racontait la petite Philomène quand du haut de ces cinq ans, elle rêvait d'une gigantesque robe blanche loin des tas de charbon.

Je n'en avais pas plus entendu parler que ça, j'avais juste vu les mariés passer, suivis de la Maheude qui, étrangement, semblait contrariée. Ce jour-là, il faisait froid et le silence régnait. Même Philomène, pour qui le mariage avait mis tant d'étoiles dans les yeux durant son enfance avait le visage fermé.

Puis, ils s'étaient mis à parler de maison. Dansaert et eux étaient passés et le maître Porion avait pointé une petite maison aux volets fermés un peu plus au sud.

Je les avais vus emménager en transportant leurs maigres affaires depuis la maison des Levaque et de celle des Maheu vers leur nouvelle demeure.

Ensuite, il y avait eu la nuit où les membres de la famille des Maheu comme ceux des Levaque se pressaient tous en direction de la petite maison. J'avais compris ce qui se passait quand le médecin de la compagnie passait dans la nuit avec sa blouse blanche. C'est presque si tout le coron avait pu entendre les cris de Philomène. Pourtant, la Maheude était restée chez elle quand même Alzire se précipitait pour voir le nouveau-né. Moi, j'avais dû attendre le lendemain pour faire sa connaissance. Zacharie le tenait dans ses bras. Il n'était pas allé travailler ce jour-là et laissait la maman se reposer. Il serrait le petit Achille pour le réchauffer.

Les mois avaient passés. Le petit savait maintenant marcher. Dans son manteau trop grand, il alignait des pas maladroits et se contentait de rire quand il vacillait. Sa sœur, elle, se faisait porter et grelotait de froid dans les bras de Philomène.

Je ne me serais jamais douté que ce bonheur inébranlable qu'ils partageaient tous les quatre était sur le point de s'effondrer.

Il semblait se dérouler quelque chose de grave quand Zacharie était passé, une lueur de rage dans les yeux. Malgré son visage déformé par la douleur, ses pas se faisaient décidés. J'ignorais tout ce que ça allait impliquer et tout ce que je pouvais constater le temps qui s'était arrêté. Il n'y avait plus de Zacharie qui portait sa fille et donnait la main à son fils. Plus de Philomène qui riait quand les petites mains potelées de sa fille agrippaient Zacharie. Seuls les flocons qui tombaient lentement.

Ensuite, il y eu cette après-midi qui avait changé les sourires d'Achille et de Désirée à tout jamais. Celle dont je me souviendrais pour toujours. Celle qui avait tout changé.

La neige tombait toujours sur le coron. Cela faisait plusieurs que Zacharie était à la recherche de sa sœur et que je ne l'avais pas vu depuis plusieurs jours. Ça m'a fait bizarre de voir son corps blême et inerte reposer sur la civière que portait Philomène. J'avais déjà vu plusieurs mineurs morts avec cette grève dévastatrice mais leur visage blanc et reposé n'avait rien à voir avec le corps méconnaissable dégarni de tête pâle de Zacharie. Ce corps qu'on avait violement arraché à la vie marquait la fin grève et la fin du bonheur pour Philomène.

Peut-être que certains en voudraient à Philomène pour avoir délaissé si facilement la tombe de celui qui avait été tout pour elle; mais je ne suis pas d'accord. Elle avait prouvé sa force en agissant ainsi. Elle avait réussi à trouver les ressources pour passer outre cette fin tragique et recommencer un nouveau cycle. Elle avait trouvé le courage d'aimer à nouveau. Une nouvelle histoire commençait pour elle


Mon ramassis de divagationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant