Chapitre 10 - Anna

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 Lorsque je suis avec lui, je ne me reconnais plus. Sérieux. Pourquoi je lui ai dit ça ? Et pourquoi ça m'affecte autant ? Il ne me doit rien, on ne se connaît qu'à peine. Et pourtant tout en moi me crie qu'il est seul et qu'il a besoin de quelqu'un à qui parler. Visiblement il a trouvé à qui parler, son ex. Génial !

- Non attends, c'est pas ce que tu crois, j'essaie de lui dire d'arrêter.

- Essaie mieux alors. Parce qu'au vue du nombre de messages, dis-je en riant.

- OK, j'avoue. Mais reste s'il te plaît, tu vas pas t'en aller déjà.

C'est tout juste si je ne ressens pas cette demande comme une supplication. Je décide de rester, parce que moi aussi j'ai besoin de parler à quelqu'un !

Bordel, ma meilleure amie déménage dans un mois et je viens seulement de l'apprendre aujourd'hui. Maria ne savait pas trop comment nous l'annoncer mais la nouvelle est tombée à la pause déjeuner.


Je raconte ma journée à James, sa réaction se fait plus touchante que je ne l'aurais cru. Il m'effleure les mains et me rassure en me disant que la distance ne nous éloignera pas. Si notre amitié doit durer, elle durera. J'espère qu'il a raison et je tente de me raisonner, ce n'est pas si grave que ça. Elle va juste être dans une autre ville. Loin de moi. On en pourra plus se voir, ou alors une fois par an. On pourra s'appeler, si elle a le temps... Non, c'est pas si grave.

J'avoue que je commence à avoir les larmes aux yeux parce que ma vision de trouble peu à peu. Il me prend dans ses bras. J'étais loin d'imaginer qu'il me serait d'un tel soutien.

- Ne te mets pas dans un état pareil, tu as dit qu'elle ne partait pas tout de suite, alors profite justement d'être avec elle et de vous créer des souvenirs ensemble !

Ça me touche plus que je ne voudrais l'admettre, je ne peux que le remercier.

- Allez, viens avec moi, je te montre quelque chose.

Me prenant par la main, on traverse chaque pièce de sa maison. Je découvre alors des pièces que je n'avais pas encore vu et me dis que la maison est bien vide. Les murs sont froids, il n'y a pas une seule décoration nulle part, encore. Certains endroits sont même carrément vides, étrange !

- On ne laisse jamais une personne triste manger toute seule, alors est-ce que ça te dit de manger avec moi ce soir ?

- Serait-ce une invitation ? je demande perplexe.

- Non, plutôt un réconfort je dirais.

- OK, décidément James, tu es la personne la plus bizarre que j'ai rencontrée !

- Si par là tu veux dire géniale, je suis d'accord ! rétorque-t-il.

J'accepte malgré tout son invitation et comme il me promet des crêpes, je suis d'autant plus forcée à dire oui.


On arrive enfin devant la porte de l'endroit qu'il veut me montrer. Il me demande de fermer mes yeux, la porte grince et il me dit que je peux les ouvrir.

- Waouh. Je ne m'attendais pas à ça.

Il faut dire que l'endroit en question est sublime. Nous sommes à l'arrière de sa maison, dans une véranda entièrement faite de vitre. Les baies vitrées sont immenses, si bien que l'on ne perçoit presque aucun bord de ces fenêtres. On dirait que le ciel va nous tomber sur la tête. Il neige, en plus. Tout est blanc autour de nous et lorsque je lève les yeux vers le plafond, on peut observer les flocons de neige s'arrêter juste au-dessus de nous, sur le toit vitré.

J'observe malgré moi les meubles de cette pièce, ils sont tous recouverts de draps blanc, gris ou rouge. James sent que je me pose plein de questions et il intervient :

- Les personnes avant nous dans cette maison ont laissé des meubles. C'est pour ça qu'ils sont recouverts de draps. Pour ne pas qu'ils prennent la poussière.

Tout s'explique, bien entendu. Il retire un drap et je découvre un magnifique canapé qui a l'air absolument confortable ! Et je peux le confirmer, maintenant que nous nous sommes affalés dessus.

Il commence par me raconter un peu sa vie d'avant, je sens malgré tout qu'il omets volontairement certaines choses. Il me parle de ses anciens amis, avec qui il n'a plus de contact. Un prénom revient quand même quelques fois, Diego. Son ancien meilleur ami lui manque sans doute, je peux l'entendre dans sa voix et dans la façon dont il me raconte leurs aventures passées. Pourtant, une certaine colère semble émaner de lui lorsqu'il parle de ce Diego, alors qu'il ne me parle que de moments joyeux. J'avoue être intriguée par ce qui a bien pu se passer pour qu'ils ne soient plus en contact.

Jay n'aborde à aucun moment Lola, ce qui ne fait qu'attiser ma curiosité. Je n'ai pas le temps de lui poser la question puisqu'il se lève d'un coup :

- Bon, on se les fait ces crêpes ?

Il sourit de toutes ses dents et me tend la main. Puis se ravise. Je me lève quand même et pose mon regard sur un coin de la pièce où gît un gros mobilier sous la couverture rouge.

Une ombre passe sur le regard de Jay et il se précipite soudainement pour sortir d'ici. Je le suis, mais ne pose pas de questions.


***


Il est minuit passé lorsque je passe le pas de la porte, j'ai dû appelé mon père pour qu'il me cherche. Heureusement qu'il était à la maison et qu'il ne dormait pas.

- Maman n'est pas à la maison ?

- Elle est au restaurant avec des collègues de travail, elle m'a dit qu'elle rentrait tard.

- Ah d'accord, je réponds dubitative, ce n'est pas dans ses habitudes de sortir la semaine.

Je monte pour aller au lit et me couche avec une certaine bonne humeur, qui je le sais, est dû à ma soirée avec Jay. Le fait de penser à lui en m'endormant n'augure rien de bon. Je le sais.

On n'oublie pas [Publié en auto-édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant