Un après-midi champêtre

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Contexte: écrit sur un titre donné par un ami. Bonne lecture !

Le lierre ornait la façade de la maisonnette, côtoyant le petit sentier de galets accolé au ruisseau. Un chant de merle couvrait le bruit de l'eau claire. La jeune femme inspira une grande bouffée d'air aux senteurs fleuris: qu'est-ce qu'elle avait bien choisi l'endroit ! Elle sourit, satisfaite, au gros mouton gris pendant que celui-ci continuait de mâcher son herbe vert, insouciant. Il n'avait pas l'habitude de voir une promeneuse si chargée: il n'y avait pas beaucoup de promeneuse dans le coin, après tout, il n'y avait pas beaucoup de personnes dans le coin tout court.

Sous un soleil brillant et une brise légère, elle s'éloigna du groupe de maisons ornées de lierre et parsemées de fontaines. A chaque inspiration, elle découvrait une nouvelle senteur. A chaque battement de coeur, elle sentait plus fort l'air lui passer dans les cheveux. A chaque pas, elle sentait une autre forme de galet sous sa semelle. La jeune femme retira ses baskets et profita pleinement de pointe, chaque arrondi, chaque irrégularité des cailloux sous ses pieds avant de céder à l'appel du ruisseau et de continuer, de rocher en rocher, les pieds éveillés par la fraicheur de l'eau qui venait chatouiller ceux-ci. Les hautes herbes et l'odeur de pissenlits laissèrent leur place aux premiers arbres de la forêt. Penchés sur la randonneuse, ceux-ci lui offrirent la protection de leur feuillage. La jeune fille s'arrêta pour sentir une dernière fois cette odeur de pissenlits et se concentra sur la douceur de la mousse ainsi que la forme sphérique de ce rocher , sous ses pieds quand, soudainement, un objet s'agita dans sa poche . Dans son sursaut, son pied gauche glissa de cette mousse régulière. ça ne pouvait pas être Maxime, ça ne pouvait plus être Maxime. Ne l'oublie pas: il en aimait une autre. Une autre. Pas toi. Elle sentit une douleur aigue sous son petit orteil et son coeur s'accéléra: à travers chaque battement, la forêt vivait un peu plus. Dans un réflexe, la femme voulu se dégager des pierres coupantes et se retrouva à détaler sur le sentier couvert de feuilles qui ne perdaient rien pour se nicher sous ses pieds. Elle cala ses inspirations sur celles du vent dans les feuilles et sentit les battements de la forêt s'accorder aux siens. Elle profita un court instant de sentir son sang se mêler à la sève des arbres. La sérénité. Le calme. C'était juste cela qu'elle voulait. Seulement ça. Juste ça. Le triangle amoureux, les disputes, elle était à bout de force. Après s'être arrêtée, elle voulut contempler la lumière passer au travers du feuillage mais celui-ci était trop épais. Surprise, la jeune femme recula d'un pas. "Les rivières creusent toujours des gorges." Elle était tombée de quelques mètres, le cheville retenue dans la douleur insoutenable des dizaines d'aiguilles par une ronce. 

Tout son corps la grattait, c'était insupportable. Elle aurait pu entendre l'imposant bruit du vent dans le feuillage mais la rivière faisait trop de bruit. Un bruit continu et grave accompagné du timtamar de la forêt. Chaque feuille, chaque branche, chaque caillou, elle percevait tout dans une immense douleur.

Elle vida donc le contenu de son sac. De toutes façons, ça n'était pas quelques ronces ou orties qui allaient abîmer sa peau et maculée de sang ou son corps sans vie. Elle laissa ainsi Maxime aux mains de la forêt et s'en alla. 

Mon ramassis de divagationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant