Chapitre 3 : Entrainement

282 60 139
                                    

Le lendemain matin, Ansfried fut réveillé par les rayons du soleil se glissant dans les interstices des volets. Il ouvrit les yeux, empli d'une énergie décuplée. L'heure de l'entrainement avait sonné ! Sa première journée de Traqueur ! Sautant au bas de son lit, il fut néanmoins surpris de voir Ireda sortir de la salle d'eau, déjà coiffée et habillée, l'épée à la ceinture. Le lit de la jeune fille était fait au carré et sa chemise de nuit impeccablement pliée sur la couverture. Ansfried fut impressionné : peut-être avait-il enfin trouvé là quelqu'un capable de comprendre la discipline qu'il s'imposait. Elle lui adressa un bref signe de tête en guise de bonjour et s'éclipsa sans mot dire d'un pas pressé, refermant la porte derrière elle.

Il n'en fallut pas plus au jeune homme pour se précipiter vers la salle d'eau, puis passer une chemise propre, enfiler ses bottes... Il ne serait pas dit que la demoiselle serait plus rigoureuse que lui !

Pourtant, lorsqu'il rejoignit le terrain d'entrainement, elle s'y trouvait déjà et terminait son échauffement. Ansfried la regarda un instant de loin, alors qu'elle reproduisait avec application un enchaînement de coups classiques, appris par cœur. L'aube pointait à peine, donnant à la scène des couleurs rosées. Un vent frais soufflait, mais Ireda avait gardé une simple chemise et le jeune homme savait que lui aussi aurait bientôt bien assez chaud pour se passer de manteau.

Prenant son élan, il commença comme chaque matin par quelques tours de terrain, d'abord lentement, puis de plus en plus rapidement à mesure que le temps s'écoulait. S'il s'illustrait en escrime, il était cependant loin d'être le meilleur Traqueur dans cet exercice d'endurance. Ireda, avec son physique élancé, était bien plus douée que lui à la course, il avait déjà eu l'occasion de se mesurer à elle au cours des années précédentes. 

Il enchaîna ensuite lui aussi sur une série de mouvements d'épée, alternant coups et parades dans le vide. Bien qu'elle continue de son côté, il sentait le regard d'Ireda peser sur lui. Sans doute le jaugeait-elle en tant que nouveau coéquipier. Il ne pouvait la blâmer, il en faisait autant, discrètement. Il accéléra le rythme, se concentrant à nouveau sur ses pas, lorsqu'elle se rapprocha. Il ne voulait surtout pas qu'elle s'imagine qu'il l'épiait. Elle, en revanche, ne se gênait pas pour l'observer ouvertement.

- En garde ? demanda-t-elle lorsqu'il s'immobilisa un instant plus tard, essoufflé.

Il hocha la tête et se positionna. Jamais il ne l'avait vue si tôt sur le terrain. Du plus loin qu'il se souvienne, il était le premier : sa fierté y avait veillé ! Sans doute s'entraînait-elle aussi au château. Du coin de l'œil, il vit d'autres combattants arriver peu à peu et se mettre à s'échauffer de leur côté, à l'épée, à la dague ou à l'arc. Ils étaient peu nombreux, la fête de la veille en avait dissuadé plus d'un de se lever. Le soleil brillait à présent et la chaleur se faisait sentir. Ansfried se concentra à nouveau sur la jeune fille qui l'attendait posément dans une garde parfaite.

Ireda attaqua. Ansfried para sans difficulté ce premier coup qui ne servait qu'à se mettre en jambes. Il feinta, mais elle ne se laissa pas prendre davantage. Les lames s'entrechoquèrent à nouveau. Si lui utilisait volontiers sa force, elle l'emportait en rapidité. Elle se dérobait à chacun de ses coups trop puissants pour qu'elle puisse parer de front. De son côté, elle tentait de le surprendre sans y parvenir. S'il manquait un peu de vitesse, il avait lui aussi une excellente technique qui compensait cette faiblesse.

A nouveau, le métal hurla, en vain. Ils tournèrent peu à peu, ralentissant le rythme de leurs coups pour mieux se jauger, jusqu'à s'immobiliser. Leurs regards sombres, caractéristiques de leur peuple, se croisèrent. Aucun des deux ne baissa les yeux.

Ireda était parfaitement impassible. Seuls ses joues rouges et son souffle court témoignaient de ses efforts. Ansfried la dévisageait, l'épée vers le sol dans une garde basse. Les poumons en feu, lui aussi avait besoin de reprendre sa respiration un instant. Il devait y avoir une faille quelque part, mais il ne la trouvait pas. Agacé, il se força pourtant à rester maître de lui-même. Il passa une main dans ses boucles brunes, sentant la sueur perler sur son front.

Traqueur [Début disponible seulement]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant