34/ MENTEUR MENTEUSE (PARTIE 2)

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J'serai plus l'ami d'un lascar faible
La sœur de mon frère, c'est ma sœur
Chez nous, y a pas de sale Manny comme dans Scarface


PDV KEN

Je pleurais.

Je pleurais comme un gamin.

Je pleurais de rage.

Je pleurais de haine.

Je pleurais de tristesse.

Je pleurais sans m'arrêter depuis une bonne heure.

Je pleurais depuis que j'avais quitté l'appartement de Deen.

Je pleurais comme quelqu'un qui se sentait trahit.

Trahit par sa propre sœur et par son meilleur pote.

Jamais.

Ô grand jamais je n'avais imaginé une seule seconde qu'un de mes khos puisse avoir une histoire avec ma petite sœur.

Mon ange.

Ma petite déesse grecque.

Ma petite protégée.

Mon petit rayon de soleil.

Celle qui m'a planté un couteau dans le dos.

Je suis assis dans mon canapé, le regard vide rivé sur le tapis du salon. Je ne saurais vraiment pas décrire ce qui s'est passé en moi quand Sacha, le colocataire d'Iris a prononcé cette phrase. J'ai été envahi de tellement de sentiments à la fois.

Au début, je pensais qu'il faisait une blague pour mettre mal à l'aise Idriss. Puis j'ai vu le regard de ma sœur. J'ai vu dans son regard que son colocataire venait de faire la plus grosse gaffe de toute sa vie. J'ai compris. J'ai compris que c'était vrai. Qu'apparemment Idriss était bien chez ma sœur ce matin.

Même moi je n'avais pas encore foutu un seul pied dans sa foutue colocation depuis des mois et voilà que mon meilleur ami y était rendu souvent, bien trop souvent.

Par la suite, il y a eu deux coups de grâce, le premier quand Idriss avait sorti cette putain de phrase : « Je l'aime ». C'était trop pour moi. Comment il pouvait dire ça ? Comment pouvait-il avoir le culot de dire qu'il aimait ma sœur ? Moi, moi qui avait toujours protégé Iris des garçons. Moi, moi qui avait toujours été contre le fait qu'elle sorte avec un garçon. Voilà qu'elle sortait avec mon meilleur pote. Je savais bien qu'un jour où l'autre ma sœur aurait un copain - je n'étais pas débile - mais pas mon pote.

Le deuxième coup dur, ce fut quand ma sœur avoua qu'ils étaient amoureux depuis qu'elle avait 16 ans. Je crois que j'avais vraiment vrillé là. Elle était mineure. Framal était majeur, il avait 23 piges. Ça existait pas ce genre de truc. Putain, c'était horrible. Tout ça. Tout ça dans mon dos.

Ils m'avaient caché tout ça.

Ils s'étaient bien foutu de ma gueule.

A faire semblant devant moi.

A faire comme si de rien n'était.

A jouer les amis pendant que moi je ne voyais rien.

Pas une fois.

A aucun moment, je n'avais pensé qu'il puisse se passer quelque chose entre eux.

C'est vrai. Iris n'était pas plus proche d'Idriss que d'Hakim ou de n'importe qui d'autre. A la limite, celui dont je m'étais le plus méfié pendant son adolescence ça avait été Mohammed. Ce dernier répétait souvent qu'Iris était jolie. C'est vrai. Elle était jolie. Même très jolie, mais c'était ma sœur.

Je frappais mon poing sur la table en verre du salon. Je recommençais jusqu'à ce que mon poing saigne. A croire que j'aimais me faire mal.

Je me fis encore plus mal quand je repensais à la fois où j'avais rencontré Idriss et Hakim. Je venais d'arriver sur Paris. C'était mon premier jour d'école. J'avais 10 ans. J'entrais en classe de CE2 et Iris en classe de moyenne section. Nous n'étions pas dans la même école. Le matin, à mon arrivée, je m'étais adossé à un mur de la cour de récréation. J'avais regardé les autres enfants jouer jusqu'à remarquer deux garçons avec une casquette. Ils venaient de faire leur entrée dans l'école. A cet instant, je ne savais pas encore que je venais d'apercevoir mes deux futurs meilleurs amis. Je me rappelais avoir croisé le regard d'Hakim. Il m'avait détaillé quelques secondes puis s'était penché vers Idriss et lui avait murmuré quelque chose. Idriss avait relevé la tête vers moi et ils avaient commencé à marcher dans ma direction. Une fois devant moi, ils s'étaient arrêté à ma hauteur. Ils m'avaient souri.

-Salut, je m'appelle Hakim, avait dit le plus vieux des kabyles. Et lui c'est mon petit frère, Idriss. Mais on est dans la même classe.

J'avais hoché la tête et m'était présenté à mon tour.

-Moi, c'est Ken.

Idriss avait fait une tête bizarre et avait répliqué :

-C'est un peu bizarre comme nom ça.

-C'est grec, avais-je expliqué. Je suis grec.

-Oh trop cool ! S'était exclamé le plus jeune en regardant son grand-frère.

Quand la sonnerie avait retentit, je les avais suivi jusque dans la classe. Là, j'avais dû rester quelques minutes avec la maîtresse pour qu'elle me présente aux autres élèves puis j'avais rejoint la place vacante à côté d'Idriss. Les jours d'après, on ne se quittait déjà plus. Le mercredi après-midi de la même semaine, j'avais rencontré Théo.

En grandissant, on était toujours amis. Meilleurs amis. Comme des frères. Et ma sœur comme leur sœur. Iris avait un peu intégré le groupe aussi. Elle passait beaucoup de temps avec nous. Je savais qu'elle considérait Hakim comme son grand-frère et le kabyle lui rendait bien aussi. Même si elle avait ses propres meilleurs amis, elle aimait être avec nous. J'aurai probablement dû me douter que c'était pour les beaux yeux de l'un d'eux.

Je pensais qu'ils avaient compris.

Je pensais que la phrase qu'on s'était si souvent répété avait eu raison d'eux et qu'aucun ne tenterait sa chance.

Je pensais qu'on avait scellé assez de pacte à ce propos.

Je pensais que ma sœur était pour eux comme leur petite sœur.

Pas pour Idriss apparemment.

Je pensais qu'ils avaient compris que.

La sœur de mon frère, c'est ma sœur.

La sœur de mon frère, c'est ma sœur // FRAMAL [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant