Chapitre 5. Extrait de la caméra de surveillance du garage du 22 mai 2005

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Deux silhouettes sortent de l'ombre. Elles se tiennent la main. Ce sont les dénommées Ariane et Cousine Prévoyance.

- Tu es sûre qu'il n'y a personne pour nous voir ?

C'est Ariane qui parle. Son aînée lui caresse tendrement la joue.

- Absolument personne. Les mécaniciens ne viendront pas avant le matin et j'ai un ami qui détruira l'enregistrement. Personne ne nous surveille.

Il y a de l'adoration dans le regard de la femme.

- Je suis tellement heureuse !

Ariane passe ses bras autour de ses épaules et se laisse aller contre Cousine Prévoyance. Ses mains habiles descendent le long de son torse, elles glissent vers l'abdomen...

Cousine Prudence se recule soudain. Elle affiche un air estomaqué, elle halète comme si elle n'arrivait plus à respirer. Enfin, elle tombe à genou.

Un couteau est planté dans son ventre.

La tâche écarlate s'élargit au fur et à mesure sur la toile brune de sa robe. Elle plaque ses mains contre elle et pousse une plainte de douleur et d'incompréhension. Elle choit et s'écrase sur le sol. Ses mains cherchent à s'agripper aux pieds d'Ariane qui la toise avec une attitude neutre.

- Pourquoi...

C'est tout ce qu'elle parvient à balbutier entre les larmes qui ravagent son visage.

- Maria Stambelton, vous êtes tuée au nom du gouvernement de ce pays pour tous vos crimes, parmi lesquels : fabrication de bombes et participation à des actes terroristes ayant provoqués la mort de dizaines de personnes. C'était une bonne idée de se réfugier ici, dans cette secte de tarés, mais nous ne vous oublions pas, nous.

Ariane s'accroupit à sa hauteur.

- Une dernière chose à dire ?

Le visage de Maria Stambelton n'est plus lisse et doux. Ses traits sont déformés par la rage et la douleur. Ses lèvres sont retroussées dans un rictus de haine. Elle n'a plus rien de beau à cet instant. Ses yeux se voilent enfin et son visage s'écrase enfin sur le sol. Ariane se relève.

- Mission accomplie.

Un cri étouffé résonne alors dans le garage. La meurtrière lève les yeux au ciel.

- Sors de là, Hilda. Je sais que tu es ici. Pas la peine de se cacher derrière ce camion.

Une troisième personne sort enfin de l'ombre. C'est Hildegarde. Plusieurs émotions luttent sur son visage pour prendre le dessus : la satisfaction de l'avoir démasquée, la terreur, la colère, l'incompréhension et même, une touche de tristesse.

- Tu ne t'appelles pas Ariane, n'est-ce pas ?

- Mais c'est qu'elle est intelligente. Tu serais presque à deux doigts du prix Nobel.

- Du quoi ?

- Enfin, contrairement à tous ces abrutis, tu as été la seule à remarquer mon manège. Tu as un bon flair.

Hildegarde s'approche, elle tend un doigt accusateur vers son interlocutrice. Elle est déterminée.

- Tu vas venir avec moi. Tu seras punie pour ce meurtre.

- Hum, non. Pas envie.

- Ce n'est pas... !

- Négociable ? Si, ça l'est. Mes amis m'attendent dehors. Tu sais, ceux à qui je téléphonais. Ma mission est finie. Le rideau tombe sur Ariane.

Hildegarde ne se laisse pas distraire, elle s'approche de plus en plus.

- Tu dois payer pour ce que tu as fait. Personne ne doit tuer un autre être humain, sans un jugement du Lumineux.

- Ma parole, tu es plus atteinte que je ne le pensais. Tu parles de ces faux tribunaux plein d'hypocrites où le type doit s'humilier avant d'être lapidé ? Haha ! Très peu pour moi.

Le mouvement est rapide. Si la caméra parvint à le capturer, Hildegarde en revanche n'est pas assez vive. Ariane s'est jetée sur elle et la maintient à terre à l'aide d'une clé de bras. Son autre main tâtonne et attrape le couteau qui lui a servi à poignarder la Cousine. Elle le colle ensuite dans la paume de sa prisonnière. Cette dernière a beau gigoter dans tous les sens et appeler à l'aide, elle ne parvient pas à se défaire de sa prise.

- Ça ne sert plus à rien. Toutes tes empreintes sont sur l'arme. Et tu es plus compromise que moi.

En effet, le sang de Cousine Prévoyance s'est étalé en une large flaque sur le béton, dans laquelle baigne Hildegarde. La jeune femme crache et essaye de se libérer.

- Tu me le paieras ! Je te jure ! UN JOUR TU ME LE PAIERAS CHER !

- J'en doute. Adieu, Hildegarde.

D'un coup sur la nuque et la jeune femme s'effondre dans un dernier cri. Elle n'est plus qu'une masse inerte comme une poupée de chiffon.

Mais si elle avait pu être encore consciente, elle aurait vu Ariane s'éloigner vers la porte avec un dernier au-revoir de la main et un sourire sardonique.

Fin de l'enregistrement.

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