Chapitre 6.6

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La brusque douleur de cette révélation parut le submerger comme le révélaient ses yeux. Ses prunelles s'imprégnèrent en moi et me happèrent dans un gouffre noir, sans fin. À ce moment, la force gravitationnelle sembla suspendre avec elle, le temps. Il s'approcha doucement et avec son doigt, releva mon menton.

— Alors s'il t'a sauvée, comme tu le prétends, je lui dois tout. Si cet oncle sénile te rend heureuse, oui, je lui dois tout, mais il doit arrêter de m'appeler « le méchant monsieur ». J'ai un nom ! Alors qu'il garde son arrogance pour lui.

Un petit rire s'échappa de moi. La paume de Faïz vint caresser délicatement ma joue. C'était fini. Je baissai les armes. Il venait de gagner et c'était à mon tour de me faire pardonner mes erreurs du passé.

— Masha va sûrement essayer de te séduire, déclarai-je avec une petite voix anxieuse.

Faïz, le visage à quelques centimètres du mien, ne se défila pas.

— Je sais, mais ne t'en fais pas. Il ne se passera rien.

Ses paroles me réconfortèrent un tant soit peu, mais les Une des tabloïdes américains de ces dernières années revinrent subitement me narguer.

— Zoé, je te le jure ! insista Faïz, devinant mes sombres pensées.

Je posai ma tête contre son torse et fermai les yeux avant d'ajouter :

— Fais attention à toi.

— Je te le promets. Rentre avec les filles à Elora et pas avec Martinez !

Sur le trajet, David, à l'arrière du véhicule à côté de Lexy, donnait à cette dernière des noms de personnes à contacter pour avancer sur son projet de restauration Végan qu'elle voulait mettre sur pieds. La vie continuait malgré le danger bien présent. Je regardai les contours du Dôme, désormais bien voyants. En sentant la boule d'angoisse grossir dans ma gorge, j'essayai de penser à autre chose. C'est à ce moment que je repensais à mon entrevue de ce matin avec mes collègues. Je tournai le miroir de mon pare-soleil en direction de Lexy et l'interpellai :

— Que s'est-il passé lors de ton rendez-vous avec Jul, la dernière fois ?

Cette dernière, surprise par ma soudaine question, détourna les yeux de son téléphone et se mit à réfléchir.

— Ce mec me dépasse, soupira-t-elle en levant les bras au ciel. Il m'a emmenée prendre un verre au Blue Lounge sur Malibu et c'était presque bien jusqu'à... jusqu'à ce qu'il s'intéresse à ma personne et me pose des tonnes de questions sur ma vie.

— Un mec qui veut faire connaissance, il n'y a rien d'anormal, rétorqua David, agacé.

— Le problème c'est lui ! s'écria Lexy. Ses manières, ses petits yeux perçants qui essayent de m'analyser pour peut-être écrire encore un futur article à chier sur moi. Je lui ai dit tout ce que je pensais sur son boulot et sa manière de fonctionner. Oui, je...

— Lexy, merde ! la coupai-je. Tu devais lui soutirer des informations et lui retourner le cerveau. Tu l'as oublié ?

Mon amie se figea. Elle tapota sa bouche avec ses doigts puis gonfla ses joues, l'air désolé. Je fermai les yeux et cognai ma tête sur l'appui-tête, derrière moi.

— Il se passe quoi avec Jul ? demanda Asarys.

— Il doit sortir un article-choc, demain ou dans les prochains jours, sur ce que le gouvernement cache à la population et sur une possible menace qui planerait sur la Californie.

— Non, non ! s'exclama Asarys. Ça risquerait de créer l'émeute dans tout le pays, voire même pire.

— Comment a-t-il pu obtenir toutes ces informations ? demanda David, tout aussi inquiet. Et Faïz est-il au courant ?

Asarys gara la voiture sur le parking de Wil Rogers State Beach qui surplombait le Pacifique. En ce début d'après-midi, la vue panoramique sur la côte de Santa Monica était superbe. Dans d'autres circonstances, j'aurais pu admirer ce large horizon embrassant l'océan ainsi que ces nombreuses radiations colorées dansant sur ces flots paisibles.

— Il y a une taupe dans les services du FBI, j'en suis sûre. Jul n'a rien voulu me dire. Je soupçonne même que mon nom soit sorti durant ses investigations. Le mien, les vôtres et celui de Faïz.

Je tournai ma tête vers Asarys qui me fixait sans un sourire, l'expression diluée dans un silence inquiétant.

— Il n'est pas au courant, continuai-je, je n'ai rien dit à Faïz. Je ne sais pas ce qu'il aurait été capable de lui faire. J'apprécie Jul et je ne veux pas mettre sa sécurité en danger.

Asarys se retourna brutalement vers Lexy et pointa son index menaçant vers notre amie :

— Prends tout de suite ton satané téléphone et débrouille-toi pour rencontrer Jul, ce soir ! Tu dois récupérer l'article et toutes ses notes avant qu'il ne passe à l'imprimerie.

— Mais il va forcément se douter de quelque chose vue la tournure qu'avait prise notre dernier rendez-vous, contesta vivement cette dernière.

— Je ne veux pas le savoir ! s'écria Azarys. L'article ne doit pas sortir dans les journaux. Compris ?

— Vous me gonflez tous les trois ! protesta Lexy en saisissant son portable. J'aurais préféré laisser son cas à Faïz. Une chose est sûre, nous n'en aurions plus entendu parler.


Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant