Le Champ De Coquelicot

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Je m'appelle Frédéric Carpentier. J'ai 26 ans et ça fait six ans que je suis engagé dans l'armée de terre. J'ai déjà fait trois tours et ces prochains neufs mois seront mon dernier tour. Je me rappelle avoir fait une promesse à mon fils Eliott, avant de m'envoler pour l'Iraq. Je lui avait dit : "T'inquiète pas fiston. Papa t'aime très fort et je reviendrais à la maison. Et une fois que je rentrerais, on aura tout le temps pour s'amuser ensemble. Et si jamais ce n'est pas le cas, sache que papa sera toujours là, dès que tu fermeras les yeux. Je t'aime mon bonhomme." Je suis monté dans l'avion, sans savoir si un jour je reverrai cette belle bouille.

Je me rappellerais toujours de ce jour si particulier. On nous envoie, mon équipe et moi, en opération dans une ville, pour récupérer une cible, un chef taliban, à ce qu'on nous a dit. Cette mission se déroule avec les US Marines dont la Légende, Chris Kyle, mais ça je m'en fiche, tant que je suis avec mon ami, enfin mon frère, Louis Jordan, avec qui j'ai passé ces six années dans l'armée.

Enfin bref, on est déployé dans cette ville, bastion taliban, pilloné depuis quelques heures par nos forces aériennes. C'est une très jolie ville, sur une "montagne". C'est une ancienne ville, avec des vieilles maisons comme ils faisaient à l'époque.

Donc on attaque cette ville, des quatres côtés, avec méthode et fouillant chaque maison dans ces moindres détails. Je me souviens de la terreur qu'avaient les enfants en nous voyant débarquer dans leur maison, plaquer leur père au sol devant leurs yeux. Mais c'est notre mission, et dans ces moments là, on évite de penser à nos propres enfants, bien qu'on ait du mal à les voir à la place de ces enfants. Enfin bref.

La ville était surmonté par une forteresse assez grande mais surtout très belle. On entre par la porte de devant, les Marines avaient déjà investi une partie des lieux. On entre par une fenêtre, fouillons les pièces une par une, descendant tous les hommes s'opposant à notre avancée. J'avais moins peur de la fureur et la férocité qui marquaient les yeux de ces hommes, pas plus vieux que moi, que d'appuyer sur la détente pour les descendre. On avance puis entrons dans la cour intérieure, entourés de murs de mosaïques bleues et or. Cependant, dans cette fameuse cour, il y avait une entrée pour des souterrains. Dans l'action j'avais même pas remarqué que deux de mes compagnons étaient tombés. Je regarde Louis, laissant couler une larme sur ma joue. Je m'engage dans ce souterrain, en tête de convoi, sans savoir où il mène, ni même si je vais réussir à entrer sans exploser. J'y vais quand même et, pas de bombes, pas de mines, pas de talibans à la porte, juste trois tunnels. Je m'engouffre dans celui de gauche, allume la lampe accroché au canon de mon fusil et avance lentement en inspectant le sol, à la recherche du moindre piège qui ferait de ce tunnel mon tombeau. Dès que je sort du tunnel, après de longues minutes de stress, je tombe sur un escalier à flanc de montagne, donnant sur un grand champ de coquelicot, entouré de montagnes oranges. Au fond de cette vallée, il y a un lac turquoise qui accueille les flots d'une grande cascade. On me dit à la radio que les autres tunnels ne donnent sur rien. J'ai donc choisi le bon chemin. Je descend l'escalier, avant que des tirs venant de l'opposé de la vallée viennent atterir sur les murs près de moi. Je cours me réfugier derrière un rocher quand un obus soulève de la terre qui m'atterrit sur la tête. Je sens quelqu'un me prendre le bras. Louis me crie quelque chose que je n'entend pas, ayant les oreilles qui sifflent. Je me met debout et tire sur les talibans. Logiquement, ils ripostent et font voler des bouts de bois venant des arbres autour de nous. Les obus tombent sur le champ et j'en profite pour courir dans la poussière qui s'est envolée. J'arrive à atteindre un deuxième rocher, suivi de près par Louis. Je le regarde et remarque qu'il avait peur. Il a le visage noir de terre et de poussière, du sang coulait d'une griffure sur sa joue. Je ferme les yeux, écoutant les explosions lointaines, remarquant que l'artillerie a arrêté de nous tirer dessus. Je me lève et sors de ma cachette. J'arrive à faire quelque pas avant de me prendre une balle dans l'épaule. Je riposte puis tombe à genou.

Je me relève à l'aide de mon fusil puis avance encore de quelque pas avant de me prendre une balle dans le ventre. Je tombe par terre puis me met sur le dos. La main sur le ventre, je vois les avions de chasse arriver pour mitrailler ces talibans.

Dès que les tirs s'arrêtent, Louis court vers moi. Je vois sa tête se pencher au dessus de mon visage. Il me dit que tout va bien aller. Il appuie sur mon ventre. Je lui demande si c'est moche et me dit que tout va bien aller. Je comprend que je suis salement endommagé. Il pose son casque au sol, enlève son sac et cherche des pansements. Il m'aide a enlever mon casque et mon sac qu'il met derrière ma tête comme coussin. Je lui demande si il peut dire à ma femme que j'ai laisser le cadeau de Noël de mon fils sous le lit. Je lui demande également de m'enterrer dans un champ de coquelicot, tel que celui dans lequel je suis aujourd'hui, avec un drapeau près de ma plaque. Enfin, je lui demande de mettre Amazing Grace. Il s'exécute et la chanson résonne dans la vallée. Il se met à chanter puis est suivi par les soldats qui nous rejoignent. Je souffle pour la dernière fois, au son de mes frères chantant cette douce mélodie.

C'est fou ce qu'il fait beau aujourd'hui.













Ce texte est une fiction rendant hommage aux soldats, sacrifiant leur vie pour nous servir et nous protéger.

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