Deux blondes

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Gonta possédait de longs cheveux impossibles à dompter. De vraies lianes songea Kokichi en observant le grand homme qui se tenait devant lui, un air amical sur sa figure masculine arborant des yeux rouges et un sourire large de quelques kilomètres. Il portait une grande salopette en jean, sales au niveau des chevilles et remplie d'outils de jardinage au niveau de la poche ventrale. Gonta avait aussi de grands gants noirs de suie aux mains qu'il avait sur ses hanches.

_ Bonjour Gonta, s'avança Shuichi. Est-ce qu'Akamatsu Kaede se trouve dans une de ces tentes ?

L'interlocuteur du détective cligna brièvement des yeux. Il ne semblait pas avoir compris l'entièreté de la phrase, en revanche, un nom l'avait marqué. Son sourire s'étira encore plus, si seulement c'était possible et il empoigna le poignet du pauvre Shuichi pour l'entrainer avec lui. Quelques mots indiens fusèrent dans le vide et Kokichi eut presque pitié de son camarade.

_ Mais qu'est-ce qui lui prend à ce rustre ?, murmura Tenko.

Puis, après quelques secondes de réflexions, elle confia à Himiko :

_ Ne t'approche pas de lui. Et s'il ose te faire quelque chose, un coup de pied retourné ne lui fera aucun mal !

Les deux filles semblaient s'être réconciliées quoique la sorcière parût légèrement ennuyée d'être considérée comme une enfant. Ou alors n'avait-elle pas compris le mot ''rustre''. Quoi qu'il en fût, Maki s'avança avec Rantaro, suivis de près par Kaito, en direction de la tente où Shuichi avait été entraîné.

Quant à Kokichi, l'intérêt brillait ailleurs. Et de toute manière, s'agglutiner n'avait jamais eu grand intérêt pour lui. A droite, il leva les yeux :

Le Taj Mahal qui se tenait là, il y avait quelques semaines à peine, n'était plus. Le ciel était gris et menaçait à tout moment d'éclater en sanglots. D'énormes morceaux du palais avaient atterri dans les rives de Yamuna, le cours d'eau qu'ils avaient traversé tantôt. Les quatre carnaux qui parcouraient le jardin rectangulaire de la bâtisse étaient dissimulés sous un tas de gravats incommensurable de marbre blanc, de jaspe, de turquoise et d'autres matériaux reconnus comme précieux. Pas étonnant que Shinguji fut aussi furieux :

_ Qu'est-ce que ç'aurait fait un beau palais à cambrioler, songea le violet, les mains dans les poches.

A une vingtaine de mètres de lui, Korekiyo s'était assis en tailleur et semblait palper doucement le marbre blanc devant lui. Des inscriptions arabes y résidaient, mais Kokichi n'y comprenait rien. Il ne savait même pas en quel honneur ce temple avait été construit. Peu importait à présent...

Des bruits retentirent derrière le violet. Les bras derrière la tête, il se retourna et s'avança vers la source du bruit. Son groupe d'élus avec deux nouveaux individus.

_ Deux blondes, songea Kokichi.

En s'approchant de plus près, il put même entendre les discussions qui fusaient de part et d'autre, dans un anglais arc-en-ciel, parsemé de mille et un accent.

_ Hiiiiiiii j'ai dit que j'étais l'Ultime Inventrice, pas l'Ultime Tentatrice. Quoique...si ça te fait tellement plaisir de t'incliner devant moi, il n'y aurait aucun ma..., s'exclama la première blonde, les mains sur les hanches, avant de se faire interrompre par Tenko.

_ Himiko se trompe juste de mots de temps à autre, elle a du mal avec l'anglais ! répliqua la japonaise. Elle vous a qualifiée de tentatrice par erreur !

_ Mais qui ne laisserait pas ce lapsus échapper à ses lèvres ! rétorqua l'extravagante inventrice en éclatant de rire.

_ Tous ceux doués d'une vue correcte, répondit Kokichi.

_ C'est qui ce rat qui ose contester ma grandeur ?

Kokichi haussa les épaules sans répondre et détourna vite le regard. Un petit silence s'ensuivit. L'Ultime Inventrice, qui se prénommait Miu ne savait trop comment prendre la situation mais gardait un certain sourire sur ses lèvres au risque de perdre de sa superbe. Ce fut à ce moment-là qu'avant que Shuichi n'intervienne, la deuxième blonde s'avança :

_ Tu dois être Kokichi, c'est bien ça ?, fit-elle avec un sourire illuminant son visage.

Le violet releva le regard et sourit. Shuichi, de son côté serra les lèvres redoutant la réponse du russe.

_ Si je ne le suis pas, qu'est-ce qui m'arrivera ?

Ladite Kaede ne se laissa pas abattre et laissa échapper un petit rire :

_ Tu n'étais pas avec le groupe tantôt, je n'ai pas pu me présenter. Je suis Kaede, l'aide-soignante de l'équipe ici.

Le sourire de Kokichi ne s'étira que de plus belle, et il déclara, dans un élan rayonnant qui interpella tous ceux avec qui il avait été en contact jusqu'à maintenant :

_ Enchanté !

''Quel mensonge...Ou pas ? Ah ! Ce sera sans doute drôle de voir comment les choses tourneront avec cette blonde omniprésente.'', songea-t-il.

Ce fut ensuite au tour de Maki et du reste de la bande de se présenter. Elle fut rapide, concise, presque sèche tandis que Tenko avait un air bien plus jovial mais assez scolaire. Himiko réussit à bredouiller quelques mots qui firent sourire Kaede et attendrirent Miu (sans que celle-ci n'ose jamais se l'avouer). Rantaro et Shuichi n'eurent pas vraiment besoin de se présenter : l'explorateur était déjà venu plusieurs fois vérifier que tout allait bien en Inde et Shuichi était connu de tous comme l'allié le plus affirmé de Kaede, celle qui avait commencé l'expédition et les recherches.

Oui, cela faisait bien trois mois que la blonde avait tenté de prendre les choses en main. Son premier contact avait été Shuichi. Peu à peu, ils avaient réussi à se mettre d'accord sur un point : Il fallait absolument sauver le monde, et pour ce faire, ils devaient rassembler tous les dons en un point : Le Taj Mahal. Ce lieu, après de nombreuses recherches et témoignages, se révélait être un endroit une se concentrait une énergie très importante et le soleil n'y brillait plus tandis que les vents y soufflaient sans arrêt. Quelque chose s'y cachait, sans l'ombre d'un doute !

C'est pour cela que Shuichi avait rassemblé Maki, Rantaro, Kaito, Himiko, Tenko, Korekiyo et Kokichi de son côté ! Il fut très compliqué de persuader Maki : Elle avait un mal fou à faire confiance aux autres. Mais heureusement, après un énième appel auquel Maki menaçait de raccrocher au nez du détective, Kaito lui avait arraché l'appareil et avait longuement discuté avec la tueuse en série. Ce fut une étape clé.

Quant à Kokichi, ce fut un hasard assez heureux de l'avoir rallié à sa cause. Du moins, l'espérait-il. La Russie était une des zones les plus touchées par le désespoir, aussi Shuichi n'avait pas osé se mettre en lien avec ses contacts du pays. Jusqu'au '' World Laughter Day'', lorsque le violet lui envoya une photo de clown. Le détective ne sut jamais si cela avait été une manœuvre délicate de la part du russe pour attirer son attention sur son cas ou si le hasard faisait vraiment bien les choses.

Et Kokichi semblait vouloir faire planer le mystère encore quelques temps.

Done for meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant