A jamais dans nos cœurs !!

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Pour une deuxième fois, j'entends de loin les pas de ma mère qui approchent. Qui sait ? C'est pour me crier dessus et me forcer à me lever. Dois-je me lever avant qu'elle arrive ? Me suis-je déjà assez reposé ?Non ! Non ! Ce n'est jamais assez quand il s'agit de s'aliter.

Elle écarta le rideau avant que je ne finisse ma réflexion. Je suis resté sans bouger, je me contentais de la lorgner et c'est là que je l'aperçois entrain de secouer la tête pour exprimer son désarroi. Je sens qu'elle n'a plus la force des cris et des remontrances, son visage laisse littéralement apparaître son essoufflement et sa fatigue morale. Mais elle est là. Debout à côté de moi en essayant de réunir ses dernières forces pour sauver son enfant des emprises de ce lit comme elle le prétend. Mais elle n'arrive pas à mettre ses menaces en exécution,parce que l'amour s'interpose. Elle m'aime autant qu'elle abhorre mon attitude. N'est-ce pas pour cela que les autres disent que l'amour d'une mère est incommensurable ?

Cet amour que même un père ne peut donner à son enfant, que seule une mère détient. Pour vous dire la vérité, je ne comprends rien en ce sentiment, rien, même celui que je viens de vous décrire. Ceci dit, il se manifeste par une tendresse apparente et un désir inégalable de subvenir au moindre besoin de celui à qui on le porte. Et quand cela vient d'une maman, il est d'une autre dimension, elle est prête à renoncer à sa vie pour celle de son enfant ; prête à délaisser tout ce à quoi elle tenait pour lui. Personne d'autre ne pourra vous aimer autant que votre mère, personne ne pourra vous protéger autant.

- Je vais me lever, lui dis-je.

Bien que je n'en avais pas l'intention. Sinon dans le seul but d'éviter ses yeux qui me reluquaient froidement. Je voulais à tout prix qu'elle ne change pas l'atmosphère de ma chambre qui m'est si tendre, mais l'air devenait de plus en plus lourd. La pièce commença à ressentir le poids des sermons auquel j'aurai droit sans tarder. L'atmosphère devint finalement pesante et le vent glacial qui se ressentait semble ne plus y pénétrer. Lui aussi voulait me fuir.

- Non ! Je t'en prie JULES ABRAHAM, ce n'est pas la peine de se lever, j'ai à te dire rétorqua ma mère.

Sa voix est devenue plus calme, assez grave pour que je comprenne que j'aurai droit à un de ces discours conscients qui a pour objectif certain de me requinquer les idées. Elle rompt le silence en ces mots :

- Tu sais mon fils...

Mon fils! quand j'entends ce nom, c'est de la compassion qu'il s'agit, je sais déchiffrer ses expressions. Une larme quitta le coin de mon œil gauche pour se verser à mon oreille : mais une larme de quoi ? Je ne ressens rien, ni joie, ni tristesse. Je suis vide.

Elle se rapprocha de moi et s'assit à coté de mes pieds, elle observa une pause pensive et poursuit en ces termes :

Tu sais mon enfant, je me souviens de ce matin-là, ce matin semblable à celui-ci et qui précédait ta naissance. Je n'avais personne sur qui compter, personne n'était là. J'étais dans cette même maison qui nous sert encore de demeure. Ton père nous avait quitté deux mois avant ta naissance, les deux mois les plus longs et les plus durs de mon existence. Je sortais de la douche, vers les vingt-heures, quand le téléphone sonna. C'était une voix rauque, plutôt calme et mêlée d'une inquiétude qui trahissait la tranquillité dont il essayait tant bien que mal de faire mine.

- Bonsoir madame !

- Bonsoir ! Mais ce numéro est celui de mon mari, qui êtes-vous ?

- Calmez-vous madame, je suis le docteur I_V BAH depuis l'hôpital SAMU, ton numéro se trouve parmi les contacts d'urgences. Je suis navré de vous annoncer que votre mari vient de faire un accident sur la troisième entre liberté et Sacré-Cœur. Il est en ce moment en bloc opératoire, veuillez-vous y rendre s'il vous plait.

CE SOIR OU DEMAINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant