Done for me

Espoir mécanique

Dans un environnement pareil, un lever de soleil ne pouvait être célébré comme il se le devait. Les nuages gris n'étaient pas des plus agréables, chaque jour plus denses et plus sombres. Shuichi bailla discrètement tout en se frottant les yeux. Quelle idée d'avoir matérialisé un poste radio ou une télévision si les ondes du pays étaient devenues folles. Il était déjà assez difficile de passer un appel, alors regarder un match de foot...d'ailleurs ce n'était pas une de ses préoccupations du moment. Si utile fut le talent de l'Ultime Inventrice, elle n'en demeurait pas moins assez lente à la réflexion songea-t-il. Chose qu'il ne lui dirait évidemment jamais, aussi troublants étaient les aléas extravagants de cette blonde.

Devant lui, Kaede discutait presque joyeusement avec Maki. Les filles n'avaient jamais été en contact direct auparavant, mais il semblait que le courant passait plutôt bien...même si la tueuse n'avait prononcé que deux ou trois phrases et passait le plus clair de son temps à écouter. Sans doute la manière la plus simple de rassembler des informations.

Kaito sortait à peine de sa tente, s'étirant et baillant comme s'il avait hiberné cent ans. Après quelques mouvements qui témoignaient de ses anciens entraînements pour devenir astronaute, il aperçut Shuichi du coin de l'œil et un large sourire vint éclairer son visage.

_ Shuichi ! Bien dormi side-kick ? fit-il d'un ton enjoué.

Kaito s'installa alors sur le banc, juste à côté du détective qui venait d'être arraché à ses pensées. Mais le londonien n'en fit rien outre mesure et sourit :

_ A vrai dire, je n'ai pas dormi. Ou très peu...

_ Pourquoi ça ?! Eh Shuichi, tu sais que le sommeil est super important pour être en bonne forme !, s'exclama le jeune homme d'un air inquiet.

_ Je n'avais pas vraiment sommeil, je réfléchissais...

_ Tu réfléchis tellement...Quel bon partenaire décidément. Mais ne te surmène pas. Faudrait pas qu'tu tombes malade !, déclara Kaito, le regard rivé sur le ciel. 

_ Je ne suis pas un ancien astronaute comme toi, sourit Shuichi.

_ Eh ben ça c'est sûr ! Mais tu sais Shuichi, le plus important pour aller dans l'espace, ce n'est pas un corps en bonne santé. Oui, c'est vrai qu'on ferme les portes à ceux qui sont très fragiles mais ça c'est une autre histoire !

_ Je...je vois, hésita un peu le londonien.

_ Le plus important, c'est la communication ! Il faut éviter de rester seul dans son coin ! Sinon, il peut y avoir des malentendus et d'autres problèmes de groupe, tu comprends partenaire ?

Le détective observa longuement la lueur déterminée qui brillait dans les yeux de l'astronaute avant de bafouiller, un peu pris de court :

_ Oui, je...je crois que je comprends ce que tu veux dire.

Kaito sentit son sourire s'élargir. Il donna une tape énergétique au dos de son ''side kick'' sans remarquer que ce dernier manqua d'y avaler son cœur. Le soleil se levait peu à peu et éclairait les ruines du Taj Mahal. Le détective et l'astronaute discutèrent un bon moment, Kaito monopolisant la parole comme à son habitude. Cela fit du bien au londonien d'entendre son ami parler si insouciamment, si bien qu'il en oublia un moment le but de sa mission et se concentra sur les différentes activités que Kaito avait eu à faire lors de son premier entrainement.

Et ce, jusqu'à ce qu'une personne aux cheveux d'un blanc métallique sortit de sa tente, mécaniquement. Vêtu d'un costume assez étrange, Shuichi et Kaito la suivirent du regard. Puis, le détective comprit : C'était K1-B0, le robot de l'expédition.

K1-B0 marchait, les yeux fermés, en titubant légèrement. On avait l'impression qu'il avait reçu un coup à l'arrière de la tête ou qu'il s'était démarré du mauvais pied. En quelques cliquetis, il atteint le banc face à celui de Kaito et de Shuichi et s'assit, la tête entre les mains.

L'astronaute n'osa prononcer le moindre mot, très impressionné. Shuichi esquissa un sourire : Kaede lui avait parlé de K1-B0, mais il le voyait pour la première fois.

Deux fentes métalliques au niveau des yeux transparaissaient entre ses doigts d'acier. Une paroi en métal renforcé lui servait de col. Dessus, en lettres lumineuses, Shuichi pouvait lire : ''K1-B0, Master en ingénierie informatique à l'université Saisho no ippo''. Quatre lampes faisaient office de boutons, trois sur son torse, et une sur son ventre. Une sorte de ceinture sur les hanches était bouclée par deux boutons rouges tandis qu'on pouvait imaginer une petite pochette sur la partie droite de son torse.

K1-B0 releva la tête, papillonna de ses yeux bleus avant de remarquer la présence de Shuichi et de Kaito. Un sourire naturel apparut sur ses lèvres et il déclara :

_ Bonjour. Vous devez être Saihara Shuichi et Momota Kaito, fit-il en inclinant légèrement la tête à chaque appellation.

_ C'est exact. Et toi, tu es sans doute K1-B0, répondit Shuichi d'un ton presque impressionné.

_ Affirmatif !

Alors qu'il bougeait naturellement la tête, le détective put distinguer deux enceintes au niveau de ce qui aurait dû être ses oreilles. Kaito, lui, avait écarquillé les yeux à l'arrivée du robot, et son sourire ne cessait de s'élargir. Il se leva et s'exclama :

_ C'est incroyable ! Un robot qui agit vraiment comme un humain !

K1-B0 eut presque l'air gêné alors qu'il se forçait à sourire :

_ La curiosité est une capacité humaine je présume. Oui, je suis un robot en auto-apprentissage.

_ C'est-à-dire que tu apprends de ton environnement par toi-même sans avoir une base de données à l'entrée ?, demanda Shuichi, le regard intéressé.

_ C'est ça, opina le concerné.

_ Waw ! C'est des cheveux métalliques en plus !, fit Kaito en passant sa main sur les mèches aiguisées du robot.

Le visage de K1-B0 passa par plusieurs émotions, l'hésitation, l'incompréhension et l'agacement avant de s'arrêter sur une figure embarrassée :

_ Je vous prie de reconsidérer votre attitude envers moi ! Et ne touchez pas à mes cheveux, vous pourrez abîmer mon antenne !

_ Oh, pardon ! J't'ai fait mal ?, s'inquiéta Kaito.

K1-B0 s'offusqua, se décala de quelques centimètres plus loin de l'astronaute puis croise les bras sur son torse :

_ Bien que je sois en auto-apprentissage pour être le plus proche possible d'un humain, non, je ne ressens pas la douleur physique.

Ne semblant pas remarquer le visage outragé du robot, Kaito s'enquit :

_ Comment tu marches ?

_ Suffit de voir si ça sent l'essence quand il parle, ricana une voix au loin.

Shuichi n'eut même pas à se retourner pour deviner de qui il s'agissait.