Partie IV

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Point de vue Anelyne

Ce que ça fait, d'avoir échappé à une mort que l'on a soudoyée, ça vide. Je ne sais plus ce que je ressens. Devrais-je dire merci ? Ou au contraire pleurer de ne pas l'avoir fait ? Peut-être que je ne voulais pas vraiment mourir, finalement Sinon je ne serais déjà plus de ce monde. J'ai seulement besoin d'exposer ma souffrance.

Dans le pick-up, l'ambiance est oppressante. Je me remets difficilement de ce qu'il vient de se passer. Et je garde le silence. Lui ne me regarde pas, reste concentré sur la route. Il allume soudain la radio, qui crachote un long moment avant de trouver une station adéquate. Elle passe une vieille musique, que j'avais déjà entendue.

Dream- The pied pipers

Cela me réconforte un peu. Cette musique me rappelle l'innocence, les jours heureux d'été. Avant que je ne prenne conscience du monde qui m'entoure.

Je pose ma tête contre la vitre, observe les arbres et les grandes masses de verdure défiler. Le ciel est rosé, des nuages cotonneux strient l'atmosphère.

L'air tiède m'enveloppe. Je ferme les yeux. Plongée dans un état entre l'éveil et le sommeil qui pourrait sembler confortable ; mais mon subconscient se décide à me repasser les images de l'accident.

Ma respiration s'accélère et j'ouvre les yeux.

- Est-ce que ça va ? Me redemande-t'il avec précipitation.

- Non, ça ne va pas, répondais-je sanglante.

Il paraît étonné de ma soudaine prise de parole, mais ne dit rien.

- Arrête la voiture, ordonnais-je.

- Tu es sûre ?

-Arrête la voiture ! M'écriais-je alors, presque hystérique.

Il se gare sur le côté, et j'ouvre la portière en prenant une grande bouffée d'air. Je suis prise par une nausée puissante. Mon cur se débat dans ma poitrine comme s'il allait exploser. Une migraine me fait tourner la tête. Je tremble. J'ai peur. Je suffoque. Ma respiration est chaotique, mes nerfs lâchent. Je suis dans un état de panique totale.

Il s'accroupit en face de moi, et me tient les mains. Il me répète de me calmer, que tout va bien se passer. La scène dure bien deux bonnes minutes, avant que je ne reprenne un état "normal".

- Tu fais souvent ce genre de crises ?

- Oui, soufflais-je.

Honteuse et baissant la tête, je remonte dans la voiture dans un état pire qu'avant. Je cause des problèmes à chaque personne que je rencontre. Je suis un poids que les gens doivent traîner.

Je lui donne ensuite l'adresse de ma résidence, et nous y arrivons rapidement. Ne sachant pas quoi dire, que faire ou comment le remercier, je le laisse prendre la parole.

Il se munit d'un bout de papier et d'un stylo, et y inscrit quelque chose dessus avant de me le tendre. Je le prend.

- Mon numéro, si jamais tu as besoin d'aide ou de quelqu'un à qui parler. Si ces idées te reviennent en tête, au lieu de faire quoique ce soit d'autre, contacte-moi.

Je hoche la tête, et m'apprête à partir. Mais au dernier moment je me rends compte d'avoir oublié quelque chose.
- J'ai laissé mon vélo sur le pont, dis-je d'une voix basse.

- Je te le ramènerait. Et ce sera une occasion pour nous de nous revoir.

Il me sourit chaleureusement, un sourire que je ne peux pas lui rendre.

Il s'en va ensuite pendant que je retourne à mon appartement. Evah n'est pas encore rentrée. Je suis seule, et tant mieux. Je me sentirais sans doute mal à l'aise en sa présence.

Je mange un sandwich sans grand appétit. N'ayant envie de rien faire, je pars m'allonger sur mon lit toute habillée. Demain, j'ai cours de midi à seize heures. Évidemment, je ne sais pas encore si j'y irais. Je ne me sens pas d'attaque.

Le sommeil me vient difficilement, même en étant épuisée. L'obscurité de la pièce me trouble, alors j'allume la lampe sur ma table de chevet. J'ai l'impression d'agir comme une enfant, je suis vulnérable et fragile. Et justement, le fait de le remarquer de moi-même me fait sentir d'autant plus faible. Je suis tourmentée par de mauvais souvenirs, certains très anciens que j'aurais préféré oublier. Et c'est après plusieurs heures que je parviens enfin à m'endormir.

Il faisait sombre, de gros nuages couvraient le ciel. Et une pluie violente s'abattait sur un village en ruine. Puis une longue tornade d'un gris foncé descendit en rotation jusqu'à toucher le sol, elle dévasta tout sur son passage à une vitesse incroyable. Puis une seconde tornade arriva, et une troisième. Le village en ruine ne fut bientôt plus qu'un tas de débris.

Une étrange femme vêtue d'une longue robe arriva et le ciel s'éclaircit. Comme dotée de pouvoirs, les débris avaient disparus. Elle tenait en ses bras des orchidées.

Je me réveille. Je fais des variantes de ce rêve chaque nuits, depuis quelques jours. Qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ?

Âmes en peine [ TERMINÉE ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant