Itami

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C'était l'une de ces nuits tâchetées de lumières.
Quatre jours et quatre nuits que nous chevauchions à travers un hiver ardent, et toujours aucun palace à l'horizon. Et pour nous faciliter la tâche, une tempête semblait se lever vers le Nord. Malgré les couches innombrables de tissus que nous portions sur le dos, le froid nous mordait férocement la peau, la rougissant et la gelant à divers endroits. Mes compagnons se distrayaient en se racontant diverses histoires et mésaventures. Je les écoutait d'une oreille distraite, amusé. Les journées étaient longues et éreintantes, à travers ces paysages entièrement constitués de neige et de glace, et nous avions tous hâte d'enfin arriver à destination, tout comme nos montures. Sans protection, nous serions déjà morts et givrés, enfouis quelque part sous la neige. Je resserais mon manteau en frissonant et levai le regard. Comme je l'avais prédit, une forte tempête se levait et un tourbillon de neige semblait s'approcher de nous tel un bloc. Il ne manquait plus que ça. Nous allions être retardés plus que nous l'étions déjà, et le peu de patience qui nous restait s'envolerait. Je fronçais les sourcils à mesure que nous nous approchions. Ce n'était pas une tempête. C'était bien plus grand. Bien plus impressionnant. Ma monture se mit à hénir et à se cabrer. Il fut bientôt suivi par ceux de mes compagnons. Je tirais sur les rênes afin de le stopper et me mit à caresser l'encolure de mon cheval afin de le calmer. Au bout de quelques minutes, il retrouva son calme et je pût soupirer.
Devant nous se dressait la façade d'un mur titanesque. Depuis notre position, je ne parvenais pas à apercevoir le sommet de celui-ci, la tête levée à son paroxysme. Avec prudence nous décidions de nous avancer jusqu'au pied de cet édifice irréel. Je parcourus la surface du regard, à la recherche d'une entrée. J'eut à peine le temps de dégainer mon épée, qu'une flèche me frôla la pomette gauche. Je levais ma main pour signaler à mes compagnons de ranger leurs armes et tournait la tête vers l'origine de la flèche. Dans l'une des crevasses du mur se trouvait un homme encapuchonné dans un épais manteau noir. On pouvait facilement distinguer une barbe grisâtre et un nez crochu.
-Halte là! Un pas de plus et je m'assurerais de mieux viser cette fois-ci, tonna une voix rocailleuse, d'un air menaçant.
La première personne que nous rencontrions depuis ces quelques jours moroses n'était pas vraiment le rayon de soleil auquel nous nous attendions. Je venais tracer une barre horizontale sur mon front, à l'aide de mon pouce, dans un signe de respect.
-Nous sommes ici, en tant qu'envoyés du roi Grim, de Noctisia, répondis-je simplement et clairement.
L'homme parut nous examiner du regard un moment.
- Sauriez-vous, par hasard, comment passer cette muraille ? Demandais-je alors.
- Vous feriez mieux de déguerpir avant que je ne vous plante comme des poulets!
Je soupirais et jettait un coup d'œil à mes camarades, qui ne semblaient pas plus enclins que cela à argumenter de mon côté.
- Nous devons passer, annonçais-je finalement.
Je le vit tendre son arc en notre direction.
- Si vous croyez que des p'tits emmerdeurs comme vous ne m'ont pas déjà sortie cette excuse! Gronda t-il.
Je glissai ma main dans ma poche, mais ce geste ne sembla pas lui plaire, puisqu'il décocha une flèche près de ma main.
- Attendez! J'ai là une missive du roi lui-même ! Nous sommes conviés au royaume de Grimeris par son Altesse Babeorn!
Il hésita un instant avant de baisser son arc.
- Une missive, dites-vous ?
Je hochais la tête et sortit de ma poche le fameux parchemin que l'on m'avait confié. Y dormait alors en son centre, le cachet du palais de Noctisia. J'entendis distinctement l'homme grommeler dans sa barbe. Il nous tourna le dos et disparut de notre champ de vision.
- Sérieusement... Je ne m'attendais pas vraiment à ça... Avoua l'un de mes compagnons.
Alors que j'allais lui répondre, le sol en dessous de nous se mit à trembler monstrueusement. De nouveau, nos montures se mirent à paniquer et les calmer était presque impossible. Un nuage de neige vint nous repousser et aveugler soudainement, je me protégeait les yeux à l'aide de mon avant-bras. Un vacarne, alors assourdissant, résonnait dans la plaine. Je tentais d'ouvrir un œil et remarquait alors que le mur semblait se fendre en deux. Non. C'était une porte. Si l'on pouvait encore appeler cela ainsi. Deux portes de métal taillées étaient en train de s'ouvrir. Si nous ne les avions pas remarquées précédemment, c'était sans doutes à cause de toute la neige qui s'était accumulée et qui venait juste de nous tomber dessus. Conformément au mur, les portes étaient gigantesques et j'en vint à me demander par quelle magie pouvait-on parvenir à l'ouvrir.
- Et bien, vous allez rester plantés là comme des choux?!
L'homme se trouvait derrière les portes.
Interrompu dans ma comtemplation, je hochais la tête et m'avançais, suivi de mes hommes.
À notre plus grande surprise, se cachait en réalité derrière ce mur, de grandes bâtisses faites de bois sombre et de pierres taillées.
Leurs toits étaient protégés d'une couverture de neige scintillante. De grandes allées faites de pavés bleuâtres s'ouvraient devant nous, et les sabots de nos montures clapotaient en résonance sur celles-ci. En contre-bas, je pût apercevoir ce qui semblait être de la fumée.
Le royaume de Grimeris se réveillait petit à petit. L'homme nous guidait à travers les chemins en sifflotant doucement. De la vapeur s'échappait de nos lèvres, formant de petits nuages blanchâtres dans l'air.
Il me semblait alors que nous avions d'ors et déjà parcourus quelques kilomètres lorsque le sommet du palace apparus à l'horizon. Le peu de soleil qui parvenais à se frayer un passage à travers le brouillard, scintillait sur la surface du bâtiment, lui créant une aura féerique. Parallèlement à la muraille du royaume, le palais était, lui, entouré d'un mur de ronces. Les intrus n'étaient visiblement pas la bienvenue. Enfin, les quelques braves qui avaient survécus au froid.
Arrivés devant le palais, notre guide nous salua avant de s'éloigner, retournant probablement à son poste. Face à nous se tenait un portail en fer blanc. Devant et derrière celui-ci étaient postés des gardes, chaudement vêtus de manteaux bleus. À notre approche, il nous firent signe de s'arrêter. Comme je l'avais fait précédemment, je sortis la missive de ma poche et leur tendit. L'un d'eux la prit et l'examina avant de hocher la tête en direction de ses collègues, situés derrière le portail.
Je les perçus s'éloigner et quelques minutes plus tard, le portail s'ouvrait face à nous. Le garde me rendit le parchemin et je le rangeait, ordonnant à mon cheval de rentrer dans la cour. Le portail se referma abruptement derrière nous. Un homme entra dans ce qui semblait être l'entrée du palais. Mes compagnons me regardèrent avec curiosité.
Une dizaine de minutes passèrent, lorsqu'un brouhaha se mit à résonner. De la porte, où s'était engouffré l'homme il y a un petit moment, ressortit un attroupement de personnes. Au centre d'entre elles, se démarquait, ce qui était inéluctablement, le roi Babeorn. Alors les dires étaient vrais: sa beauté était aussi glaciale que son royaume. J'avais entendu quelques rumeurs relatant de son origine demi-elfe; et cela me paraissait désormais une évidence. Il était relativement grand, il restait bien sûr plus petit que moi, mais j'étais plutôt surpris de le remarquer, arriver à mon nez, au moins. Ses longs cheveux satinés voilaient une paire d'oreilles aux sommets pointus. Sur son visage fin et pâle trônait un sourire chaleureux, qui contrastait avec son royaume. Enfin, quelque chose de réconfortant ! Nous descendimes de nos montures afin de nous agenouiller devant cette personnalité royale. Il s'avança vers nous en écartant les bras de façon enjouée.
- Bienvenue ! Le voyage à dû vous éreinter, relevez-vous, mes amis!
Nous nous éxecutions sans broncher.
Ses épaules étaient couvertes d'un manteau de fourrure bleue, attaché par de sortes...d'écailles sombres, sur son torse.
- Nous vous remercions de votre accueil, Sir, déclarais-je avec politesse.
D'un signe de main, il ordonna à quelques uns de ses hommes de s'occuper de nos montures.
- Vos chevaux seront emmenés et traités dans les écuries, le chemin à été long pour eux aussi. Si vous voulez bien me suivre, nous serons plus à l'aise à l'intérieur!
Il n'attendit pas notre réponse et se détourna en faisant claquer son manteau dans l'air, pénétrant sans tarder à l'intérieur du palais. Ses valets le suivirent sans tarder, nous invitant à faire de même. Mes camarades et moi obéissions alors, entrant dans le palais glacial de Grimeris.

Tᚺᛖ ᚺᛖᚨᚱᛏ ᚲᛖᛖᛈᛖᚱ The Heart KeeperOù les histoires vivent. Découvrez maintenant