Tᚺᛖ ᚺᛖᚨᚱᛏ ᚲᛖᛖᛈᛖᚱ The Heart Keeper

Itami

Malgré l'exceptionnel accident avec cette créature qu'ils appelaient "Wyverne", la journée même et la suivante s'étaient déroulées dans le calme, et dans l'excitation générale des habitants. De nombreux allers-retours s'étaient faits à travers le palais et la cour royale, créant une drôle d'animation constante autour de nous. Et enfin, le jour de la fête était arrivé. Le matin même, je me vis réveillé par les tintements réguliers et résonnants de carillons. Après m'être levé et préparé, je décidais de descendre, afin de voir de mes propres yeux, l'étendue des festivités, bien que le roi nous y forcerait dans tout les cas. À l'occasion, les murs et les sols furent décorés de parures et de fleurs, à l'image du royaume entier. Avec mes compagnons, nous avions décidé d'aller jeter un petit coup d'œil dans les rues, à la grande joie de ces derniers. Il était assez tôt, le soleil était à peine levé et pourtant, sur la place principale et dans les rues, se trouvaient déjà des centaines de marchants avec leurs étals, couverts principalement de fleurs mais aussi de toutes sortes de marchandises. En me baladant parmis eux, j'aperçus donc des tapis, des flacons de parfums, des bijoux et autres. Les vendeurs semblaient déterminés à vendre tout leur stock, essayant constamment d'attirer les innombrables clients qui passaient par là, il était impossible de faire un pas sans rencontrer quelqu'un sur son chemin. Cela valait pour moi aussi, et je me faisais arrêter, peut-être bien tout les trois mètres, me faisant inviter à jetter un coup d'œil aux objets en vente. Je regardais un peu, pour ne pas paraître grossier et refusais poliment d'acheter quoi que ce soit en leur offrant un sourire, ne m'attardant pas plus longtemps auprès d'eux. Ce n'est pas que leur marchandises ne me plaisaient pas, au contraire. Les tissus étaient très doux et chauds, paraissant confortables, leurs parfums libéraient des odeurs exquises, les quelques livres présents semblaient enchantés. Je ne voyais simplement pas de réel intérêt à user de mon argent pour ce genre de choses. J'en avais bien besoin pour quelque chose de plus utile. De temps à autres, une parade passait par là, mêlant danseurs, musiciens et cavaliers, défilant en rythme et gracieusement sur les applaudissements de la foule. Foule qui s'écartait alors pour les laisser passer. Ils s'arrêtaient parfois pour saluer les habitants et distribuer diverses sortes de friandises aux plus jeunes. Sur la place principale notamment, un plateau de bois avait été installé et y apparaissaient toute sorte de spectacles : des guérisseurs, des combattants, des animaux et bien d'autres, au grand bonheur des spectateurs de toutes espèces, émerveillés par tant de magie. Alors que je traversais l'une des rues adjacente à la place principale, je remarquait alors plus loin devant moi, Gen et Nikolaï, en pleine conversation avec un marchand de ce qui semblaient être des fioles colorées. De ce que j'avais entendu, le roi avait envoyé sa Main faire quelques emplettes. À leur habitude, ils étaient tout deux couverts d'une capuche et de leur masque, cachant leur identité, certainement. Je tournais la tête sur la gauche alors que j'étais interpellé par une petite voix fluette. Se tenait assise sur une caisse en bois, une jeune fille brune. Sa peau paraissait bleuie à certains endroits lorsque la lumière s'y reflétait. Sur l'étal qui se trouvait derrière elle, étaient joliment présentées plusieurs variétés de fleurs, passant du noir au bordeau, en passant par le bleu et le blanc. Je regardais ces végétaux d'un air penaud. S'il y avait bien une chose d'incompréhensible, c'était les fleurs. Elle se mit alors à me les présenter une par une, mais cela résonnait plutôt comme énumération compliquée de syllabes collées les unes aux autres. J'hésitais à repousser son offre, mais je craignais de paraître impoli face à une enfant. J'optais finalement pour ce qu'elle désignait comme des hellébores orientales. Là encore, elle m'en montrais plusieurs couleurs et gabarits. Mon regard se posa sur une petite fleur. Je la prit entre mes doigts et remarquait des reflets d'un bleu intense lorsque je tournais celle-ci. Je lui achetait alors pour quelques pièces. Je rangeais la fleur dans ma poche et remerciais la vendeuse. Un son semblable aux carillons de ce matin sonnèrent la mi-journée. Le temps avait passé plus rapidement que voulu. Je décidais de rentrer au palais sans plus tarder.

Le roi semblait être aux anges, et s'il n'était pas d'un rang aussi important, j'aurais pu parier qu'il serait en train de sauter avec excitation un peu partout. Pour l'occasion, il portait une tenue un peu plus légère qu'à l'usuelle. Bien sûr, il restait somptueusement vêtu, et ne perdait en rien sa grâce royale. Il portait une tunique bleue, qui était couverte de cuir à certains endroits comme sur les bras ou le ventre. Ses cheveux avaient été tressés, tombant dans son dos lâchement, et joliment hornés de fleurs et de minuscules pierres brillantes. Sur le sommet de son crâne reposait sa couronne, qui avait l'aspect de brindilles glacées. Peut-être en étaient-ce réellement. Je n'oserais pas lui demander l'autorisation d'y toucher pour avoir ma confirmation. Il se déplaçait dans les couloirs du palais, et nous le suivions de près bien sagement, attendant ses instructions.
Après un long discours relatant de son amour pour son royaume ce soir-là, un grand repas fut alors servi aux habitants présents, et la fête continua encore tardivement. Mais le roi nous avais accordé un temps de réunion afin d'enfin organiser notre mission. Nous nous étions alors retirés dans la salle du trône.
- Bien, commença t-il, vous devez donc vous rendre à Noctisia en compagnie de Nikolaï. Vos montures et tout le nécessaire à ce voyage ont déjà été préparés et n'attendent plus que votre départ. Ce que je veux de vous, est que vous vous rendiez devant le roi Grim et que vous lui apportiez ma requête. Selon sa réponse, nous aviserons. Aussi, je souhaiterais que les deux autres royaumes ne soient pas encore prévenus de ma décision, et c'est important.
Nous acquiescions silencieusement. Je proposais alors de partir dès l'aube, afin de mener à bien la mission le plus vite possible. Les derniers détails mis en places nous nous retirions, laissant le roi retourner à son peuple pour la fête. Je conseillais à mes compagnons de ne pas prendre part à la fête trop tard et leur souhaitait une bonne nuit, préférant aller me préparer dans ma chambre.

Le matin suivant, le soleil étant à peine levé, nous étions tous déjà dans la cours extérieure, afin d'ajuster les derniers détails, préparant convenablement nos montures. Je resserais les sangles de ma selle et de mes sacs avant de glisser mon pied dans l'étrier et de me hisser sur mon cheval. Je prenais les rênes d'une main en attendant que les autres soient prêts. J'avais l'habitude de voir mes compagnons se préparer, peut-être est-ce pour cela que je décidais alors d'observer Nikolaï se préparer. Il était en train d'attacher ses sacs à sa monture, et laissant échapper de lui une mauvaise humeur tout à fait remarquable. Je pouvais presque la toucher. Son cheval était visiblement un merens aux yeux verts. Il était plutôt haut et puissant pour son espèce et semblait bien entretenu. Je fus interrompu dans mon observation par le roi, qui venait de nous rejoindre dans la cour, accompagné de sa Main. Il se dirigea vers nous pour nous saluer une dernière fois, dans un long discours émouvant et bien construit. Du coin de l'œil, je remarquait alors que Mayu donnait à Nikolaï une sacoche, lui chuchotant à l'oreille. Ce dernier hocha la tête avant d'enfiler la lanière du sac autour de lui et de grimper avec facilité sur sa monture. Le roi se recula pour nous laisser de la place après nous avoir remercier chaleureusement, et nous fimes de même poliment. Je vérifiais que tout le monde soit bien prêt, ce qui semblait être le cas. La grille de la cour s'ouvrit afin de pouvoir nous laisser passer. D'un petit coup de talon sur le flanc de mon cheval, celui-ci se mit à avancer doucement. Et les autres me suivirent peu de temps après. La grille se referma presque aussitôt, dernière nous. Je tournais la tête vers Nikolaï, situé légèrement en arrière sur ma gauche. Il semblait jeter un dernier coup d'œil en arrière au palais. Je retournais mon attention sur le chemin en soupirant. J'avais comme le pressentiment que le voyage allait paraître très long.