L'eau froide ruisselait sur ma peau, telle une cascade en pleine forêt. Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas pu profiter d'une douche et, aussi étrange que cela pouvait paraître, je n'aimais pas ça. Mon corps était meurtri par les blessures et les cicatrices qui parsemaient ici et là mon épiderme. La douleur sur chacune d'entre elles était un véritable supplice.
On aurait pu croire que la fraîcheur du liquide sur mes meurtrissures apaiserait ma souffrance, mais, en réalité, il n'en était rien. C'était un pur calvaire. Au lieu de ressentir le soulagement que j'espérais, j'avais l'impression que les rougeurs s'échauffaient encore plus, comme si je cuisais de l'intérieur.
Les brûlures récentes dues aux expériences de Selkins étaient les pires de toutes, les plus douloureuses et les plus désagréables. Elles marquaient ma peau à de multiples endroits que je tentais vainement de cacher aux yeux des autres. Jusqu'à présent, personne n'avait jamais rien remarqué, et je redoutais le jour où l'un d'entre eux s'en rendrait compte.
Ici comme ailleurs, nous avions nos secrets. Mais, aujourd'hui plus que n'importe quel autre jour, je ne m'étais jamais sentie aussi éloignée de mes amis.
Nous partagions pourtant un dortoir commun dans lequel nous aurions pu échanger, nous soutenir pour supporter plus facilement les expériences du Docteur Selkins. Cependant, les uns comme les autres, nous avions choisi de nous taire.
J'avais tendance à justifier ce mutisme par la présence des caméras et des micros disséminés dans la pièce, mais je me voilais la face. La vérité, c'était que cela s'avérait plus simple pour nous de faire croire à chacun que l'on se sentait bien, et que participer aux expérimentations de Selkins était plus que supportable. Néanmoins, tout comme mes amis, je n'étais pas dupe : je savais pertinemment que ce qu'ils enduraient devaient être au même titre que mes propres souffrances.
Je haïssais ce silence et avais besoin de parler à quelqu'un plus que jamais. Rien que pour ça, j'aurais aimé que Rex soit là, parmi nous. Il aurait su me défendre devant les soldats et aurait pu m'écouter. Cette absence de bruit semblait porter en elle le deuil de notre leader.
Avec son décès, notre groupe avait explosé, comme si, sans lui, il n'avait plus raison d'être...
Le jet d'eau se stoppa de lui-même et je dus me résoudre à quitter la douche. Malgré la douleur des brûlures, je devais avouer que je préférais cette souffrance à celle qui suivait. Je me dirigeai vers le miroir et le petit lavabo. Je détestais me regarder dans cette glace. Chaque semaine, elle reflétait la réalité et me mettait face à celle que j'étais devenue : cette jeune fille maigre et fragile.
Je m'observai devant le miroir. J'avais les joues creusées, la peau quasiment sur les os et je pouvais même voir mes côtes quand je regardais ma poitrine. Mes bras eux-mêmes étaient relativement fins et je doutais être capable de battre qui que ce soit dans un bras de fer.
Chacun des détails que renvoyaient la glace attestaient de mon quotidien dans la forêt. Si on ne me croyait pas sur parole, on ne pouvait que me croire en regardant mon apparence. Elle ne trompait pas. Je n'aimais pas prendre conscience que je devais paraître aussi faible devant les autres. Je fixai une dernière fois mon reflet, dégoutée.
J'aurais pu ignorer ce miroir, choisir de fermer les yeux pour ne pas admettre la vérité. Mais la curiosité était à chaque fois un peu plus forte et le désir de voir à quel point je changeais, à quel point mon visage était parsemé d'hématomes, ne s'éteignait jamais vraiment.
C'était pour ça que je détestais cette prétendue pause que nous offrait Segger. Elle avait pour seul but de nous montrer une réalité qu'aucun de nous ne voulait connaître...
J'attrapai les vêtements propres que Veren avait déposé et les enfilai avec une lenteur démesurée, profitant des dernières minutes de répit avant de retourner dans l'enfer. C'était sans doute la seule chose que j'aimais ici. Nous avions le droit à des habits à nos tailles. Et je ne pouvais pas nier que c'était vraiment appréciable.
La tenue était composée d'un t-shirt et d'un pantalon blanc. Nous avions aussi à notre disposition une veste noire que je me forçais de porter pour dissimuler les brûlures qui parsemaient mes bras. J'avais dû mal à la garder, malgré que nous fussions fin Janvier.
Même avant, quand nous vivions dans la forêt, ma peau était chaude comme la braise et bien plus brûlante que celle des autres. Et à cause des expériences de Selkins, le phénomène avait empiré.
Je passais les tests de ce scientifique dans le laboratoire B1. Je m'étais mise à l'appeler le labo « Burn » par dérision. Là-bas, je n'y voyais personne, pas même le scientifique aux yeux de rat. Le Docteur Selkins se cachait derrière un micro grâce auquel il m'expliquait et me détaillait les objectifs de l'expérimentation.
La salle était vide : pas le moindre meuble, pas le moindre objet. Il n'y avait rien. C'était d'ailleurs le seul endroit du bâtiment peint en noir. Cela le rendait encore plus effrayant qu'il ne l'était déjà, je devais l'admettre.
L'expérience consistait à recréer ce que cet homme avait déjà cherché à faire avec Néo, mais ce coup-ci avec moi. Sauf qu'il ne suffisait pas de jouer avec mon cerveau pour m'inciter à avoir des rêves prémonitoires comme cela avait été le cas avec mon ami.
Je contrôlais le feu et non pas des fragments de l'avenir...
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SIGMA ENERGY - T2 - Le Brasier de la Rébellion
ParanormalAfin de limiter le risque de ruiner toute forme de suspense, il n'y aura aucun résumé sur ce tome. ⚛ LE RESTE DE LA SAGA SIGMA ENERGY ✅ SE T1 - L'Étincelle de Liberté ☑ SE T3 - Les Cendres de l'Ultime Combat ☑ SE T4 - Les Vestiges de l'Avenir