CHAPITRE 6 - Zoé [6|6]

8 4 12
                                    

— Où sommes-nous d'après vous ? souffla Lise qui, à sa voix, avait l'air autant apeurée que moi.

— Sans doute encore dans le centre. Je n'y vois rien du tout, c'est encore plus déstabilisant que dans le conduit ! Au moins là-bas on pouvait toucher les parois des murs...

J'avançai lentement, de peur de heurter un meuble ou de trébucher sur un objet. Pour aller où ? Je n'en savais rien... Je cherchais une porte, quelque chose à même d'éclairer la pièce, une sortie pour que l'on puisse poursuivre notre fuite.

— J'ai trouvé l'interrupteur ! intervint Aldo.

La lumière revint tout à coup, vive et douloureuse pour mes yeux jusque-là habitués à l'obscurité. Je les gardai quelques secondes clos, tentant de m'habituer à la faible luminosité que laissait passer mes paupières, avant de les ouvrir de nouveau. La pièce était contre toute attente vide. Moi qui craignais me taper les mollets dans quelque chose, il n'y aurait eu en réalité aucun risque.

J'observai les alentours. Où était cette foutue porte ? Était-ce une ancienne salle que Segger avait décidé de condamner ? Je longeai le mur avec la paume de la main, cherchant un défaut, une anomalie qui pourrait cacher quelque chose. Une porte surtout.

— Hé venez voir ! s'exclama Lise. Il y a un truc étrange ici !

Je me retournai dans sa direction. Apparemment elle avait eu la même idée que la mienne et avait découvert cette fameuse difformité que j'espérais trouver. C'était une plaque amovible qui semblait déboucher autre part.

— Où ça mène ? Tu vois quelque chose ? intervint Loan, intrigué.

— Il y a une fenêtre avec des rideaux, expliqua-t-elle en regardant de l'autre côté. Et un conduit d'aération en hauteur. Et...

Lise ne termina jamais sa phrase, se dégagea et se releva en vitesse pour s'écarter de l'endroit qu'elle avait découvert.

— Et quoi d'autre ? Qu'est-ce qu'il y avait d'autre, Lise ? s'inquiéta Aldo, qui boitillait pour se rapprocher d'elle et la calmer.

Le visage de Lise devint blême et je lus dans son regard qu'elle n'était pas capable de décrire cette dernière chose qui l'avait apeuré. Je m'approchai lentement de la plaque et regardai à mon tour en la déplaçant légèrement sur le côté, de la même manière que l'avais fait mon amie.

Je vis la même fenêtre, le même conduit – plus petit que celui que l'on avait traversé – et la fameuse chose que Lise n'avait pas réussi à nous décrire. Çà et là, des taches de sang parsemaient le sol et le mur. Elles semblaient légèrement effacées, comme si on avait cherché à les faire disparaître.

— Alors, Zoé ? Qu'est-ce que c'est ?

— Rien d'important, Loan, rien d'important, murmurai-je en me redressant. Si tu veux vraiment savoir, va voir par toi-même. Mais je ne te le conseille vraiment pas...

Ce dernier sembla entendre raison et suivit mon conseil, mettant de côté sa curiosité. Il valait mieux pour lui de ne pas aller regarder. Je ne savais pas qui avait été tué ici, mais on avait forcément cherché à le cacher en montant cette paroi.

Soudainement, je repensai à la personne dont avait parlé Rex, celle qu'il avait appelé Lynn.

Cette femme qui avait voulu le sauver mais que Segger avait abattu d'une balle dans la tête...

Je n'avais aucun moyen de confirmer mes suppositions et je n'en avais pas envie. Je préférais laisser au passé ce qui appartenait au passé.

— J'ai trouvé quelque chose d'autre ! annonça Néo.

— Ça ressemble à la même chose que de l'autre côté, affirma Lise. Essaie de pousser la plaque pour voir !

Néo tenta de bouger le bord de la plaque qu'il avait trouvé. Elle resta un instant bloquée avant de se déplacer.

— Qu'est-ce que tu vois, Néo ?

— Il n'y a rien du tout...

Je le dévisageai, circonspecte. Il devait forcément y avoir quelque chose ! Alors qu'il cherchait dans la pénombre, je l'observai sans un mot. La surprise remplaça l'incompréhension qui se dessinait sur son visage. Un sourire s'esquissa sur ses lèvres et il déclara :

— Ah si ! Je crois que c'est une porte ! Venez, on l'a notre sortie !

Il se faufila dans le creux qui s'était formé en déplaçant la plaque et nous fis signe de le suivre. On passa chacun à notre tour et on arriva de l'autre côté. Il y avait le même interrupteur que celui qu'Aldo avait trouvé. Et notre porte de sortie. Néo s'approcha de la poignée et l'abaissa pour ouvrir. Je priai pour que cela fonctionne. Je rêvais de quitter la Sigma Corpse et n'étais pas certaine de supporter l'idée de rester enfermée dans cette pièce une minute de plus. Malgré mes craintes, elle s'ouvrit.

— Demi-tour les fuyards ! clama la voix d'un homme. N'essayez pas de vous échapper par-là d'où vous venez, d'autres hommes vous attendent au bout du conduit !

La personne qui avait parlé passa l'encadrement de porte et la referma derrière elle. L'homme avait des allures de grand colosse et son sourire semblait tout sauf rassurant.

— Alors qu'est-ce que cela fait d'avoir cru jusqu'au dernier instant que vous alliez pouvoir vous échapper ? s'esclaffa l'homme d'un rire effrayant.

Face à notre mutisme, il ria de plus belle.

— Et dire que vous avez fait exactement la même erreur que ce crétin de Rex quand il était plus jeune ! ricana-t-il. Il a cru jusqu'au bout pouvoir s'échapper par le conduit d'aération dans lequel l'avait porté cette traître. Il a fait un sacré chemin avant de tomber sur le même conduit dans lequel vous étiez et il est arrivé dans ce débarras, piégé.

Je serrai les poings, en colère. Cet homme, malgré ses airs de tueur, ne devait être rien de plus qu'un soldat parmi tant d'autres. Une personne de plus qui s'ajoutait à la longue liste des gens qui souhaitaient nous voir morts.

— Qui êtes-vous ? lui demandai-je, les sourcils froncés.

— Qui je suis ? L'agent Steewell. Mais je ne crois pas que cela t'apporte quoi que ce soit de savoir ça, gamine.

— Au moins je peux mettre un nom sur votre visage de timbré ! lâchai-je, sans prendre conscience de la dangerosité qu'incarnait l'homme.

Le géant au cœur de pierre s'approcha de moi à pas lent, un sourire carnassier sur le visage.

— Tu penses vraiment que tu as un mot à dire dans toute cette histoire ?

SIGMA ENERGY - T2 - Le Brasier de la RébellionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant