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Elle n'avait aucun moyen de s'assurer que ce qu'elle supposait était véridique. Mais rien que de le supposer...c'était déjà une manière de donner une certaine réalité à l'idée. Cela ne lui changeait pas grand chose à sa situation, hormis la conviction qu'elle devait être dotée de capacités hors-normes : le Fondateur avait le pouvoir de s'octroyer une enfant parfaite.
Alors pourquoi l'avoir abandonné à une caste de 2? Cela dépassait toujours son entendement.

Bien sûr, elle aimait ses parents d'une affection sans faille et sans bornes. Mais une incohérence avait toujours subsisté entre leur façon de fonctionner et la sienne. Elle s'en rendait bien compte.

Elle devait aller voir le Fondateur.

***

Pour obtenir une audience elle avait dû insister sans relâche. Si cela lui était difficile, elle n'osait pas imaginer ce qu'il devait en être pour les « non-privilégiés »...

Elle avait toujours été fascinée par cet homme mais elle pensait que c'était normal, que cette fascination s'exerçait sur tout le peuple, ce qui, dans un sens, était vrai. Mais elle, elle avait été programmée pour l'aimer. C'était différent. Et glaçant.

Ressentir une bouffée d'amour envers un visage inconnu est plutôt terrifiant, il faut bien l'admettre.

Lorsqu'enfin il arriva, elle remarqua qu'il était loin d'être seul : ils n'auraient pas le plaisir d'une conversation en privé, c'était certain. De haute stature, plutôt intimidant, il n'était pourtant pas un canon de beauté. Enfin, son visage étant
affiché de partout, nul ne se risquait à lui trouver un quelconque défaut...

« Marika. Tu as demandé à me parler. Je t'écoute. »

Nulle surprise à ce qu'il connaisse son prénom, il connaissait chaque prénom.

« J'ai remarqué que je n'avais pas été arrêtée. Pourtant j'ai ceci en ma possession.

Elle exhiba le plus grand miroir qu'il lui avait été donné de trouver. Le Fondateur resta impassible.

-C'est un faux.
-Comment ça c'est un faux? A partir du moment où l'on peut se regarder dedans il est dangereux non?

Elle s'empourprait de plus en plus comme le ton montait.

-Mais tu ne peux pas te voir dedans. Regarde.

Avec la ferme intention de démontrer le contraire, Marika se pencha sur le miroir.
Stupeur ! Il était couvert d'un voile opaque. Il se passait d'étranges choses dans le coin...

Elle regarda son père programmé d'un air narquois.

-Il ne me sert à rien de protester, vous savez pertinemment que ce miroir était fonctionnel il y a quelques instants. Maintenant dites-moi où est mon frère.

-Calme tes ardeurs jeune fille. Ce n'est pas parce que tu as...disons quelques avantages que tu peux tout te permettre. Et certainement pas de t'adresser à moi sur ce ton ! 

-Bien. Veuillez m'excuser. Je demande d'être arrêtée s'il vous plaît.

-Je refuse, tu n'as pas commis le moindre impair, il n'y a aucune raison de t'enfermer. »

Commettre un impair, et vite !
Marika tenta un petit crachat en direction du visage de son interlocuteur. Ceci constituait normalement en un affront suffisant. Mais rien ne semblait suffisant...

Il essuya sa joue d'un geste neutre et fit mine de s'en aller. Il était très difficile à énerver...

Le test du miroir Où les histoires vivent. Découvrez maintenant