Bon week-end : nouvelle

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Dès que l'horloge de son ordinateur indiqua 16 : 59, Mélanie s'empressa d'éteindre ce dernier. Tout en récupérant son imperméable, elle adressa un « bon week-end » collectif à ses collègues, puis se dirigea vers l'ascenseur. Dans le parking, installée au volant de sa voiture, elle affichait un large sourire. Enfin, elle allait respirer un peu !

Cinq minutes plus tard, elle roulait dans le quartier résidentiel de la ville pour rejoindre la voie express. Alors qu'elle patientait au feu rouge, Mélanie remarqua que plusieurs familles semblaient sur le départ. À moins de deux mètres, une fillette d'environ huit ans pleurait bruyamment sur la banquette arrière d'un monospace, tandis que ses parents entassaient des bagages dans le coffre.

Visiblement ulcéré, le père explosa :

— Éva, si tu continues comme ça, je vais te ficher une raclée !

Était-il obligé de lui crier ainsi dessus ?

— Tu n'auras pas d'autre avertissement, poursuivit-il. C'est compris ?

La petite cessa aussitôt ses jérémiades, et Mélanie la plaignit sincèrement. Quand le feu passa au vert, elle repartit avec un pincement au cœur.

Depuis le pont, elle se rendit compte qu'en empruntant son itinéraire habituel, elle serait confrontée aux embouteillages. Même pour un vendredi soir, c'était étonnant. Où pouvaient bien aller tous ces gens ? Y aurait-il une gigantesque manifestation dont elle n'aurait pas entendu parler ? C'était possible. Mélanie était consciente de ne pas écouter suffisamment les informations.

Au premier coup de klaxon, elle n'hésita plus et tourna à droite plutôt qu'à gauche : elle allait prendre les routes de campagne. Cela lui rajouterait de la distance, mais elle arriverait plus tôt. Mélanie décida aussi d'écouter la playlist de ses chansons préférées. Elle se promit que dimanche, sur le trajet du retour, elle écouterait la radio pour se tenir au courant de l'actualité. Mais pendant les prochaines quarante-huit heures, elle voulait juste se détendre. Ce soir, elle avait prévu de voir son amie Charlotte. Toutes deux savoureraient un bon repas et discuteraient de leurs projets pour les vacances d'été.

Une heure plus tard, Mélanie chantait à tue-tête. Le ciel rougeoyait, et elle était sur le point d'atteindre sa destination. Les alentours de la maison de sa tante Hortense – dont elle avait hérité quelques mois plus tôt – étaient déserts. Pourtant, elle s'arrêta au stop juste avant de s'engager sur le chemin menant à la propriété. Il y avait eu un terrible accident à cet endroit l'année de son baccalauréat et, à chaque fois qu'elle y passait, ce drame lui revenait en mémoire. Si ce panneau avait été présent à l'époque, la vie de quatre jeunes aurait pu être épargnée.

Mélanie s'apprêtait à appuyer sur l'accélérateur, quand on frappa à sa vitre. Son cœur fit un bond dans sa poitrine, et sa main se crispa sur le levier de vitesse. Alors que la personne continuait à tambouriner, Mélanie put distinguer qu'il s'agissait d'un homme. La moitié de son visage et ses vêtements étaient salis par de la terre. Avait-il eu un accident ? Elle sentit l'adrénaline affluer dans ses veines. Elle devait garder son calme si elle voulait être en mesure de l'aider. Elle coupa le son des enceintes pour entendre ce qu'il lui disait. Il remuait les lèvres, mais elle ne saisissait pas le sens de ses paroles. En fait, il ne parlait pas, il poussait des grognements incohérents. Aurait-il abusé de l'alcool ? pris de la drogue ? Son comportement était en tout cas anormal.

La peur de Mélanie monta d'un cran. Bien qu'elle ait envisagé d'ouvrir la vitre, elle se ravisa. Peut-être ferait-elle mieux d'appeler les secours... Elle sortit son smartphone de son sac, mais l'écran resta désespérément noir. Foutue batterie !

Bon week-endOù les histoires vivent. Découvrez maintenant