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« Je t'adore. »

C'est le message que nous nous sommes envoyées pendant au moins une heure Kamille et moi après qu'on eut mangé. Je ne me lasse pas de voir ces mots s'afficher sur mon portable, je les imagine doucement murmurés par sa douce voix au creux de mon oreille, j'imagine ses yeux vert émeraude pétillant d'éclats d'or, je l'imagine ensuite m'embrassant tendrement, comme elle le fait toujours.

« Je t'adore. »

Pour dire la stricte vérité, ce n'était pas le mot que j'avais en tête, mais le lui dire pour la première fois au téléphone, de vive-voix était déjà assez stressant, je ne me vois pas lui avouer mes véritables sentiments. De plus, elle semble s'en contenter donc pour moi tout va bien. Malheureusement, vient pour elle l'heure de dormir, elle me réclame son message, j'ai soudainement envie d'être originale, d'oser lui dire de jolies choses. Je ferme un instant les yeux puis balade rapidement les doigts sur mon écran et cette fois, je vérifie avant d'envoyer un SMS qui pourrait en dire plus que je ne le voudrais, comme ce fut le cas plus tôt.

« Bébé, je te souhaite de passer une merveilleuse nuit, ne me dis pas de rêver de toi car je suis déjà en plein rêve depuis que tu es entrée dans ma vie mais moi, j'aimerai que tu rêves de moi, de nos baisers, nos câlins, et... De toutes les choses que tu voudras imaginer ensuite. Je te fais pleins de tendres baisers. Je t'adore fort, très très fort. À demain cœur. »

Il est trop long, les accents circonflexes rallongent le nombre de caractères, je les retire tous et relis une nouvelle fois, ça reste compréhensible, je l'envoie et attends sa réponse. Elle tarde à venir, je me demande si je n'ai pas été trop longue à l'envoyer et qu'elle s'est endormie en l'attendant, son téléphone encore dans ses mains, je peux imaginer la scène, ses longs cheveux cuivrés bouclés posés sur son oreiller, son souffle lent, l'appareil qu'elle tient s'allume (ou vibre) mais rien n'y fais, elle garde les yeux clos et ne lira, inutilement, mon message qu'au réveil. Mon cœur se serre à cette idée, me confirmant ainsi que ce que je ressens pour elle est plus que de l'adoration, c'est bel et bien de l'amour mais je veux encore garder ça pour moi. Je pourrais le lui dire mais ressent-elle la même chose ? Est-ce que ça n'irait pas trop vite ? Et si je lui faisait peur en le lui disant ? D'un autre côté peut-être aussi qu'elle attend que je me déclare la première mais sachant que je ne suis pas douée même avec mes propres sentiments, ça serait un peu stupide et Kamille est loin d'être stupide. Mon portable vibre enfin, je me presse de lire ce qu'elle m'a écrit, elle me dit que c'est le plus beau message de bonne nuit qu'elle ait reçu, mon cœur bondit dans ma poitrine, elle me dit aussi (pour me taquiner sûrement) qu'en plus des baisers, elle rêvera de pleins de choses cochonnes, qu'elle m'embrasse à m'en faire gonfler les lèvres et qu'elle m'adore. Je serre le téléphone contre ma poitrine qui bat toujours à deux cent à l'heure. Avec elle, j'ai l'impression d'avoir un cœur de course, il monte en régime si brusquement et pourtant, parfois, un simple mot d'elle et il se stoppe comme s'il n'avait jamais battu. C'est en pensant à tout ça mais surtout en pensant à elle que mes yeux se ferment pour la nuit et je m'endors paisiblement. Je dors si bien que lorsque mon réveil sonne je sursaute. Il faut dire que je l'ai réglé une demi heure plus tôt pour éviter le genre de surprise de la veille. Je ne sais pas si mon frère a la même méthode de calcul mais on sort de nos chambres en même temps. Il me regarde, ne répond pas à mon bonjour et se dirige immédiatement vers la salle de bain. Il doit encore faire la gueule pour hier. Je le laisse tranquille, je pourrais toujours lui parler au lycée, en dernier recours ce soir. Je prends mon petit déjeuner, ma mère se lève à son tour, s'étonne de me voir déjà levée, et alors que je finis mon bol de lait, la porte d'entrée claque, je présume que c'est mon frère qui part. Ma mère soupire, je vais me doucher à mon tour. En sortant je m'habille rapidement, ma copine arrive, je l'entends sonner à la porte et dire bonjour à ma mère. Elle traverse le couloir silencieusement, arrive près de ma porte de chambre tandis que je me place dos à ma garde-robe, et alors qu'elle ouvre la porte rapidement, je sors de ma cachette. Elle sursaute en criant.

« Putain bébé t'es folle ! »

Maintenant elle voit l'effet de sa blague. Elle m'embrasse et se pose sur le bord de mon lit le temps que je prépare mon sac pour la journée.

« T'as bien dormi ma Titi que j'adore ?

– Oui et toi cœur ? »

Elle me dit que oui, nous échangeons encore quelques banalités puis nous partons pour le lycée. Comme la veille, l'autre couple de la classe vient à notre rencontre, on avance jusqu'à ce que l'on appelle tous maintenant ''notre coin'' et je vois qu'une nouvelle fois, mon frère n'y est pas. Je résiste à l'envie de lui envoyer un message, il faut vraiment que je lui parle, je me dis que je le ferais à la pause. Les cours commencent et en arrivant dans la salle, on peut constater l'absence de Sophie. Elle et Olivier sont encore en train de sécher. J'envoie un texto à ma camarade pour savoir si elle est avec son petit ami, sa réponse est des plus désagréable :

« Qu'est ce ça peut te foutre ?

– J'ai besoin de lui parler.

– Lui veut pas te parler. »

Le prof me regarde, je pense qu'il m'a grillée alors je range mon téléphone, énervée par ce court échange. Pour qui se prenait-elle ? Sa copine ? Sa secrétaire ? Son conseiller familial ? Je compris alors que si je veux parler à Olive, j'ai pas trente six solutions, il faut que je lui envoie directement un message. Je m'occupe de ça dès que la pause sonne, sans même attendre l'accord pour sortir, je reprends mon portable et envoie ''faut qu'on parle. Maintenant !!'' à Olivier. Je n'ai pas descendu trois marches qu'il me répond, il me dit qu'il ne rentrera pas à la maison avant un bout de temps, vu que notre mère n'accepte pas sa relation, il va vivre son histoire ailleurs, je le traite de débile et lui demande de libérer l'appartement pour demain après midi.

« C'est toi la débile Laëtitia là ! Je ne rentrerais pas, jamais ! »

Je le laisse dans son délire, me disant que ma mère n'allait jamais le laisser faire, surtout s'il ne venait plus au lycée, prends ma copine à part du groupe qui s'est rétréci et lui explique la situation. Elle me dit qu'il va se faire descendre, qu'elle n'imaginait pas ça de lui et qu'à parier, elle voyait plus Amélie et Clément faire ce genre de chose. Elle ne manque pas de me rappeler une nouvelle fois que ma mère est hyper cool donc elle me comprend pas la réaction de mon frère. Je ne le comprenais pas non plus, pas parce que ma mère est sympa mais je ne voyais pas quel bien pouvait ressortir de sa petite escapade. Sécher une après midi, je peux comprendre, on a bien mangé, on se sent lourd, fatigué, d'accord. Mais arrêter le lycée pour être vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec sa copine, c'est foutre en l'air son avenir et ça, notre mère ne l'acceptera jamais. 

Mes chroniques de lycée- épisode 2- Ma première foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant