41. Le piège

13 7 1
                                    


Même ceux d'entre nous qui avaient abandonné l'espoir de gagner la guerre en nourrissaient un autre, celui de participer à une vraie bataille, où s'affronteraient deux forces égales.

Realis mit fin à cet espoir.

L'Armada Secunda n'a jamais été bâtie pour vaincre Hélios. Je le crois aujourd'hui. Son rôle était seulement d'unir l'Omnimonde, sans quoi il aurait fini par basculer dans la guerre ouverte.

Adrian von Zögarn, Histoire de la guerre d'Hélios et du rôle mineur que j'y ai joué


« Le pont d'Arcs est ouvert, annonça Fréya.

— Il faut que je le dise à Ivan.

— Nous n'avons pas le temps. De toute façon, la flotte est perdue. Veux-tu fuir, ou veux-tu avancer ? »

Fuir ! Le cri retentit sous le crâne de la pilote, prononcé par un congrès de circuits anciens de son cerveau, d'instincts sauvages et impérieux qui se moquaient qu'elle fût une humaine, un reptile ou un poisson. Fuir sans attendre ! Aux commandes, de Mjöllnir, elle avait le pouvoir d'échapper à la catastrophe.

Fréya aurait pu obéir à cet ordre, mais dans l'IM, le système de contrôle du vaisseau n'entendait que les paroles sincèrement prononcées.

« Que fait le vaisseau des remsiens ?

— Il est en train d'accélérer. Ils l'ont détecté eux aussi. Ils seront à Stella Realis avant le reste de la Flotte. »

Ils ne pourront pas s'en sortir sans nous, songea la servante.

« Allons-y, Fréya. Prépare nos boucliers et affûte nos armes. Nous serons les premiers à Stella Realis. »

La femme en combinaison blanche afficha un sourire ; le vaisseau traversa la flotte vampire comme une flèche et s'engouffra dans le pont d'Arcs.

Le temps ralentit ; l'horloge interne de l'IM n'égrenait plus les secondes que centième par centième.

« Que voyons-nous ? lança Fréya, comme si elle donnait un cours.

— Le soleil est derrière nous, répondit la pilote en marchant dans le vide, suivie par les contrôles holographiques. La planète est à deux milliards de kilomètres. Rien sur le chemin. Si les servants d'Hélios sont dans ce système, ils se cachent, derrière l'étoile ou derrière la planète.

— Et les anneaux ?

— Je ne vois rien dans les anneaux.

— Justement. Ils sont en plein jour, au plus près du soleil. Sa lumière inonde nos capteurs et rebondit sur les astéroïdes et les poussières. Ils sont au milieu de cette soupe de matière. Ils sont ici parce que c'est précisément le lieu où ne nous pouvons pas les voir.

— Mais il leur serait impossible de cacher de gros vaisseaux. »

Une seconde entière s'était déjà écoulée. Mjöllnir s'était avancé de deux mille kilomètres dans la zone des anneaux. Les poussières et les roches s'écrasaient sur son champ d'intégrité structurelle sans endommager sa coque. Les vaisseaux vampires qui viendraient après lui n'avaient pas de tels boucliers protecteurs – ils seraient frappés par une pluie de projectiles.

« Où sont-ils, du coup ? Combien sont-ils ?

— Je l'ignore.

— Realis est un monde inhabitable. Comment de petits appareils auraient-ils une autonomie suffisante pour venir jusqu'ici ?

Nolim II : Le dévoreur d'étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant