NOUVEAU DÉPART

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     Je ne me suis jamais sentie aussi lourde et courbaturée de toute ma vie. Les quelques gueules de bois que j'ai à mon compteur sont sympathiques comparées à celle que j'ai sur le dos en me réveillant ce matin. Ma tête me paraît trop pesante comme si elle menaçait de se détacher de mon corps. Mes jambes sont encore engourdis de la veille. Quant à mes yeux, ils me brûlent à tel point que je retomberais presque aussitôt dans le sommeil. 

     Il en est hors de question. Je ne veux plus dormir. Je ne veux plus jamais ressentir cette paralysie totale, ce noir effrayant qui m'a engloutit hier soir. Je veux rester éveillée. 

     Ce qu'il s'est passé la veille est encore flou dans ma tête mais je me rappelle des grandes lignes. Je me souviens de la fête et de mon malaise. En revanche, j'ai du mal à comprendre comment je suis arrivée ici. Je n'ai aucun souvenir du trajet. Je me rappelle avoir été dans le canapé du salon. La douleur qui vrillait mon corps tout entier m'est familière, elle aussi. Je revois encore les visages apeurés autour de moi. Je crois que je ne les oublierais jamais, d'ailleurs. 

     Puis, il y a eu la douche. Gabi a prit soin de moi du début à la fin, j'en suis certaine. Je me souviens avoir été dans la baignoire. Il m'a aidé à y entrer puis a rafraîchi ma peau brûlante en faisant attention à chacune de mes réactions. Il s'est montré infiniment délicat et prévenant. Je sens encore ses mains dans mes cheveux mouillés. J'ai quelques souvenirs du moment où il m'a déshabillé et inversement. J'étais nue face à lui mais il n'a pas perdu ses moyens une seule seconde. Il a veillé sur moi. Ensuite, il m'a couché. Je me rappelle avoir ressentir une terreur inimaginable lorsqu'il a voulu quitter la chambre. Je ne voulais pas rester seule. J'avais terriblement peur de moi-même. Je ne sentais plus mes jambes et mes yeux menaçaient de se fermer à tout moment. Je ne voulais pas qu'il m'abandonne. 

     Et il ne l'a pas fait puisque son corps chaud et réconfortant m'enveloppe en ce moment même. Son torse est soudé à mon dos et un de ses bras me tient contre lui. Je sens son souffle dans mon cou. Il me protège même s'il est endormi. 

     Je ne devrais sûrement pas être ici dans ses bras mais, après tout ce qui s'est passé hier soir, je m'en contre-fou. Je me sens en sécurité auprès de lui. Je n'ai peut-être pas une bonne mémoire en ce qui concerne la soirée d'hier mais je me souviens qu'il a prit soin de moi plus que n'importe qui d'autre. Je ne me rappelle pas le moment où il m'a rejoint dans le lit, j'étais déjà endormi, mais je sais qu'il ne m'a pas lâché de la nuit. 

     Je le connais trop bien. Je suis persuadée qu'il a eu autant peur que moi. Je revois encore son regard. L'angoisse à l'état pur suintait de ses iris. Il était terrifié de me voir ainsi. Je peux le comprendre. J'étais moi-même morte de trouille. J'ignore encore comment j'ai fait pour ne pas faire un arrêt cardiaque. Je ne regretterais jamais assez d'avoir bu ce foutu verre. Si je ne m'étais pas conduite aussi inconsciemment, nous n'en serions jamais arrivé là. Rien de tout ça ne se serait produit. 

    L'alcool ? Plus jamais.

     Alors que mon corps épouse parfaitement celui de Gabriel, je me décide à contre-coeur de quitter le lit. J'ai besoin d'aller aux toilettes et de boire un peu d'eau. Ma gorge est sèche et ma vessie commence à me peser. Il faut que je me soulage rapidement. Je n'ai pas envie de m'éloigner de ce cocon rassurant mais il le faut. Mon corps a quelques exigences maintenant qu'il reprend vie. 

     Je repousse délicatement la couette avec mes pieds et me faufile le plus discrètement possible hors de la prise de Gabi. Je fais attention à son bras qui m'entoure fermement et me dégage sans un bruit. Une sensation de vertige s'empare brièvement de moi mais celle-ci disparaît assez vite. Je prends néanmoins le temps de m'habituer à ce réveil spécial. 

Attraction irrésistibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant