Les premières notes de ''Dreams'' d'Imagine Dragons me tirèrent de mon sommeil. Je mis quelques minutes à réaliser où je me trouvais et ce que je faisais là. Je me fis la réflexion que je n'aurais jamais dû écouter cette assistante sociale. Elle avait beau suivre mon dossier, elle ne me connaissait pas, et ne me comprenais pas. Comment aurait-elle pu quand moi-même j'avais du mal à me cerner ?
Je sentais que ma journée allait être longue, très longue, puisque ma seule compagnie serait ce qui me sert de génitrice, jusqu'à ce que mon frère ne revienne du collège. Oui je sais, c'était hautain de parler de la femme qui m'avait donné la vie et que je devrais aimer plus que tout, des trucs comme ça. Mais je n'étais pas dans le monde des bisounours, et comment pourrais-je l'aimer ainsi lorsqu'elle me prenait de haut et répétait à qui voulait l'entendre qu'elle n'avait jamais voulu de moi. Je me demandais comment aurait été ma vie si elle m'avait laissée dans un orphelinat : pire, aussi compliquée, meilleure ? Ou si j'avais pu vivre avec mon père. Rien que de le connaître aurait pu faire la différence. Je ne savais pas, et ne le saurai jamais. Il y avait certaines choses qu'on ne pouvait changer, malgré toute la bonne volonté du monde. Je m'extirpais de la chaleur des couvertures et ouvris les rideaux épais de ma fenêtre. Après avoir jeté un rapide coup d'œil au ciel, j'optais pour un jean noir et un gros pull informe comme je les aimais, avec une capuche bien large. Je fis un passage par la salle de bain, où je me maquillais légèrement et camouflais les quelques boutons qui me gênaient, avant de descendre. À la cuisine, ma mère préparait des œufs et du bacon, tandis que Ton, l'air endormi, pêchait ses céréales détrempées de lait dans un bol bleu.
- Salut, marmonnais-je.
- Tu ne t'es pas coiffée ce matin ? me répondit ma mère.
Je ne pris pas la peine de répondre et me servis un bol de céréales. Non, je ne m'étais pas coiffée ce matin, effectivement.
- Bah tu ne manges pas de bacon ni d'œuf ? T'es devenue végétarienne ou quoi ?
La remarque de Tony me fit sourire.
- Non ! J'ai juste envie de céréales ce matin, c'est tout !
J'engloutis mon petit déjeuner, avant de remonter à la salle de bain, où j'entrepris de démêler mes longs cheveux. Un rayon du soleil timide de ce matin venait jouer entre mes mèches châtaines, faisant ressortir du blond ou des reflets de cuivre. J'attrapais mon écharpe grise et blanche puis je rejoignis mon frère au bas des escaliers. Il embrassa ma mère avant de partir, et me suivit dans la cour. Je fourrais mon téléphone et mes écouteurs dans ma poche et pris le chemin du métro, Tony sur les talons. La station grouillait d'enfants et d'adolescents en uniformes. Je rentrais dans la rame de métro, écoutant d'une oreille distraite ce que me racontait Ton. Je crois qu'il me parlait du costume qu'il avait choisi pour leur journée d'Halloween. Je sommeillais au rythme des stations, et nous faillîmes rater notre changement de ligne. Au fur et à mesure que nous approchions de Wembley, le métro se remplissait de plus en plus. Les potes de Tony s'étonnaient de le voir ici. La plupart des jeunes s'étaient déguisés. Super comme collège quand même, je n'en connaissais pas un en France qui organiserait de telles journées. Je laissais mon frère devant la grille, sous le regard interrogateur des élèves, se demandant qui je pouvais bien être.
***
Je levais les yeux vers la petite pendule accrochée au-dessus de mon bureau. 15 heures. J'avais passé ma journée à traîner entre le jardin derrière la maison et ma chambre. Je m'étais préparé un sandwich à midi, puisque j'étais seule. Matt travaillait et ma mère avait une réunion pour préparer un acte de charité ou je ne savais pas trop quoi. Il fallait toujours qu'elle fasse bonne figure. Presque 24 heures passées ici et j'avais déjà connu pire. Pas de dispute, pas de porte claquée, on était tous encore en vie. Je décidais de partir plus tôt pour pouvoir flâner dans le centre commercial de Wembley.
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19 Days
Roman d'amourDepuis des mois, Clélie déménage de foyers en familles d'accueils, après avoir fuit le domicile maternel. Ne sachant plus quoi faire, l'assistante sociale chargée de son dossier lui demande de retourner passer deux semaines chez sa mère, à Londres...