Abby m'avait sauvée en nous demandant de repasser à table avant que ça ne soit froid. J'avais participé au repas, riant aux blagues franchement nulles d'Elliot, mais mon sentiment d'être de trop ne m'avais pas quitté avant la fin, et même lorsque nous débarrassions. Là encore, ils m'avaient interdit de faire autre chose que remplir le lave-vaisselle. A partir de ce moment-là, les jumeaux m'avaient embarquée à l'étage et nous avions joués à différents jeux vidéo une partie de l'après-midi. Comme j'étais nulle, Elliot et Jimmy se moquaient de moi. Pour me venger, je lançais une bataille de guilis, comme une enfant de sept ans. N'en pouvant plus de rester à l'intérieur alors qu'il faisait beau, je les poussais à sortir. Il n'y avait pas grand-chose à faire mais aucun de nous trois ne voulait reprendre les transports en commun. Afin continuer sur notre lancée de retour en enfance, en fin d'après-midi nous étions sortis et nous avons achetés des glaces à la camionnette qui déambulait dans le quartier. Elle était d'un bleu délavé, affublée d'un grand panneau sur lequel était écrit « Cuneo ». Autrefois, les couleurs devaient être plutôt voyantes, mais le véhicule avait perdu de sa superbe. Cependant, le véhicule savait se faire connaitre par la musique qui se déversait du haut-parleur fixé sur le toit, annonçant sa présence dans la rue. Le glacier était un homme d'une quarantaine d'années, matte de peau. Un ennuie profond perçait à travers ses yeux très noirs. Apparemment content d'avoir des clients plus âgés que la dizaine d'années, il engagea la conversation, et nous apprîmes qu'il était pakistanais. Il avait rejoint son frère il y avait quelques mois, et le seul travail qu'il avait trouvé ici était dans ce vendeur de glace.
- Ça ne paye pas de mine, mais au moins, ça me permet de payer ma part de loyer. En venant ici, je pensais pouvoir travailler à l'hôpital, mais malheureusement, mon diplôme de médecin ne vaut rien en Angleterre, alors je fais prends ce qu'on me propose. Et si on me paye mieux pour un autre métier, alors je quitte celui que j'avais avant.
Il nous avait ensuite demandé si nous étions frères et sœur. Joueur, Jimmy avait affirmé que oui, mais j'avais fini par démentir. Le glacier avait eu l'air déçu, puis il était reparti, après nous avoir remercié de lui avoir offert un maigre divertissement dans sa longue et fastidieuse journée de travail. Tout en mangeant nos glaces – mangue et chocolat pour moi, chocolat et vanille pour Jimmy et double fruits rouges pour Elliot - nous étions partis nous promener dans le parc Gladstone, au milieu des coureurs, des chiens et des enfants. Bien nous étions en octobre, la température était agréable et le soleil doux. J'avais même fini par enlever mon pull. Nous nous étions allongés dans l'herbe.
- C'est bizarre quand même... commençais-je.
- Si tu parles de toi, oui t'es bizarre ! s'exclama Elliot.
- Dit le mec qui traîne qu'avec des gens chelou ! Non je ne parlais pas vraiment de ça.
- Alors exprime toi, fit Jimmy.
- Bah... Il n'y a que moi que ça choque ? demandais-je.
- On n'est pas dans ta tête, on sait pas de quoi tu parles, me répondirent-ils dans un ensemble parfait.
- Ok... Donc vous trouvez ça normal que je sois là ? fis-je en me redressant sur un coude.
- Bah oui ! T'es cool, et nous aussi ! fit Elliot.
- Ça va les chevilles ? plaisantais-je.
- Bah écoute, tant que mes pieds rentrent encore dans mes chaussures, ça va !
- Non mais ce que je veux dire... On s'est croisé une fois, devant un lycée, que je ne fréquente même pas, il y a à peine quelques jours, et là je me retrouves à manger chez vous.
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19 Days
RomanceDepuis des mois, Clélie déménage de foyers en familles d'accueils, après avoir fuit le domicile maternel. Ne sachant plus quoi faire, l'assistante sociale chargée de son dossier lui demande de retourner passer deux semaines chez sa mère, à Londres...