Le quai 9 ¾

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        Eugenia Silverthorne était sur le quai 10. Elle regardait partout autour d'elle et n'arrivait à voir qu'une masse informe de Londoniens pressés, courant dans tous les sens, dans l'espoir de monter dans leur train à temps. La plupart d'entre eux portaient de longs manteaux aux couleurs sombres – le noir, le gris et le marron étaient prédominants dans cette scène - mais parfois, une femme un peu excentrique portait une veste de couleur et attirait l'œil, tirant un peu les passants de leur routine monotone. La gare de King's Cross à l'heure de pointe était un festival de bruits et d'odeurs qui se mélangaient et qui permettraient à un aveugle de se représenter parfaitement le paysage : le klaxon d'un train sur le point de partir, un contrôleur qui hue un enfant taquin, un chien arrivé là par hasard qui aboie sur un homme passant un peu trop près de lui, l'odeur de la boulangerie de la gare, qui laisse s'échapper la douce senteur de croissants bien frais, tout juste sortis du four. Tout était si vivant pour celui qui ne voyait pas, mais la réalité était bien plus morne. L'automne s'était abattu sur l'Angleterre. Le ciel estival, d'un bleu clair, avait laissé place aux nuages gris et à la pluie.

        Eugenia Silverthorne était toujours sur le quai 10. Entre ses mains, elle tenait le ticket de train que ses parents lui avaient donné avant de partir. Elle était censée prendre le train au quai 9 ¾. Mais voilà, elle avait beau lever les yeux et chercher désespérément ce fameux quai, elle ne le voyait pas. Il n'était indiqué nulle part, et le Poudlard Express – train à bord duquel elle devait grimper – n'était présent sur aucun des tableaux d'affichage. Elle souffla et s'en voulut de ne pas avoir demandé à ses parents plus d'informations. Mais c'était comme ça. Glenn Silverthorne et Birdie Silverthorne, n'étaient pas ce que l'on pouvait qualifier de "parents aimants". A vrai dire, ils se fichaient pas mal de ce que pouvait bien faire leur fille, à partir du moment où elle ne les embêtait pas. Aussi surprenant que cela puisse paraître, Eugenia n'avait jamais souffert de ce manque d'amour. Elle avait toujours eu l'impression de se suffire à elle-même et bien qu'elle ne fût âgée que de treize ans, elle était déjà bien indépendante. Elle était d'ailleurs allée faire ses achats pour la rentrée seule.

        Nous étions début septembre, et un mois plus tôt environ, une lettre était arrivée au manoir Silverthorne. Ledit manoir était une immense bâtisse, pourvue de grandes fenêtres à croisillons qui laissaient rentrer jusqu'au dernier rayon du soleil. Il y avait toujours là-bas beaucoup de lumière. Tout y était toujours parfaitement rangé. Birdie était comme obsédée par le rangement et passait beaucoup de son temps libre à lancer des récurvite au travers de toute la maison, et ce, même si celle-ci était déjà incroyablement propre. Il avait donc été facile pour Eugenia de remarquer la petite enveloppe scellée d'un cachet rouge qui avait été déposée sur le paillasson, puisqu'aucun objet ne bougeait jamais - à moins que quelqu'un ne le lui ait demandé. Elle avait attrapé le morceau de papier et avait ouvert de grands yeux quand elle avait vu que la lettre lui était destinée. Elle ne recevait jamais rien, hormis une enveloppe avec quelque vingtaine de gallions de la part de sa grand-mère à chacun de ses anniversaires et chacun de ses Noëls, ce qui lui avait permis d'amasser en treize ans d'existence une belle petite somme d'argent - et ce sans compter les dix gallions que lui donnaient tous les mois ses parents en guise d'argent de poche mais qu'elle ne dépensait jamais. Son nom en lettre manuscrites écrit sur la lettre, elle s'était donc permise de l'ouvrir. Elle tomba nez-à-nez avec ce qu'elle avait tant attendu l'année dernière mais qui n'était jamais arrivé : sa lettre d'admission pour Poudlard, l'école de sorcellerie la plus prestigieuse du monde selon la majorité des sorciers. A l'avant de la lettre, un message solennel lui indiquant sa date de rentrée et la félicitant pour sa récente admission. Au dos, une liste de choses à acheter. Eugenia s'était rendue au salon pour annoncer fièrement la nouvelle à ses parents :

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 14, 2020 ⏰

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L'héritière de SerpentardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant