Chapitre 1

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Je me demande toujours si les évènements auxquelles nous devons faire face sont les résultats d'actions faites dans une vie antérieure. Enfin j'aimerais le croire. Ça peut être rassurant et expliquer certaines choses. Quoique... Je ne crois pas non plus qu'il existe une force au-dessus de nous qui veille sur notre vie. En tout cas je n'aimerais pas que ce soit vrai. Pire encore, je ne comprendrai pas comment cela est possible. Si une telle chose était véridique, alors j'aimerais rencontrer cette divinité qui régit nos vies et probablement lui mettre mon poing dans sa face. Maintenant à vingt-huit ans, j'ai fini d'y penser. Les choses arrivent parce qu'elles le doivent. Elles font de nous la personne que nous sommes, ce que l'on souhaite montrer de nous aux autres et les choses que l'on souhaite garder secrètes. C'est le destin, des rencontres, des chemins, des voies que l'on prend et qui nous amène là où nous sommes. Ce sont des choix qui dirigent nos vies.

Quand j'étais petite, que quelque chose ne se faisait pas dans mon sens, comme je le souhaitais, je piquais une horrible crise. C'était l'un de mes traits de personnalité, j'étais capricieuse. Mon "père" détestait cette facette de moi, bien qu'il en soit en partie responsable. Finalement j'ai appris à canaliser ce défaut pour en faire une force, une qualité. Mes caprices se sont peu à peu transformés en de la détermination. Et rien n'est plus important en ce monde que la force du mental.

J'étais une jeune adolescente très mal dans ma peau, très renfermée au collège et au lycée. J'avais peu d'ami, voire pas d'ami réellement. J'ai toujours été solitaire. J'ai fini par me réfugier dans les livres et dans la musique. Je n'étais pas aussi performante dans ces domaines que j'aurai aimé l'être. Je me débrouillais malgré mes quelques difficultés littéraires au vu de mon problème de prononciation. J'ai été suivie pendant des années par des orthophonistes. Non, là où j'ai excellé, plus déterminée que jamais c'est dans le sport. Et plus particulièrement dans la gymnastique artistique. C'était d'ailleurs le seul espace où je pouvais être moi-même. J'étais libre. Et puis on grandit. Et finalement nos passions ne sont pas toujours en adéquation avec nos rythme et choix de vie. Arrivée à la faculté j'ai dû arrêter la gymnastique, je suis passée de dix/douze heures par semaine à deux pauvres heures quand mon planning universitaire me le permettait. Et c'est ainsi que tous mes progrès ont été stoppé. Dans la carrière d'une sportive, sans forcément être à un niveau olympique mais avec un excellent niveau régional, se voir réduire ses heures de pratiques signifie la fin. Il est impossible d'évoluer, et il est à peine possible de maintenir ses acquis qui demandent beaucoup d'exercices. Alors ma carrière s'est arrêtée quand j'ai découvert qui j'étais. Parce que oui la faculté a été ma plus grande leçon de vie. J'y ai notamment rencontré les personnes qui deviendraient des piliers dans ma petite existence. Mes amies.

Mes études m'ont poussé à avoir une réelle réflexion sur ma vie. Une remise en question très profonde mais finalement nécessaire pour comprendre qui je suis. Nous avons eu beaucoup de cours de Psychologie, des cours que j'ai adoré et qui me sont utiles au quotidien. Je suis dans le social, je viens en aide à des publics en grande souffrance : enfants, parents, personnes âgées, en situation de handicap, en grande précarité, subissant des violences... Je suis cette petite fourmi qui travaille dans l'ombre pour permettre à ces invisibles d'avoir une place dans une société complètement à côté de la plaque. Tout n'est question que de faire paraître, de faire semblant. Le monde ne tourne plus rond depuis un moment... Mon monde n'est qu'un amas de peines, de douleurs où rien ne tourne rond...

Pour expliquer comment j'en suis à écrire ce ramassis de conneries, qui selon mon psychologue est nécessaire pour tourner la page, je dois remonter forcément en arrière. Plus loin. Soi-disant que ça aide à digérer les choses auxquelles on doit faire face. Personnellement, une petite orpheline qui a survécu en perdant un poumon et demi dans un tsunami lors de ses vacances, ce n'est probablement pas un écrit qui va l'aider. Mais soit, essayons, ça m'occupe. Ce bon docteur Guillaume Boullin me voit une heure par semaine, le jeudi matin, entre deux rééducations. Il est assez jeune, mais il m'est complètement insupportable. Grand, très mince, les cheveux noirs de jais et les yeux bleu clair. C'est en théorie un bel homme, et il sait qu'il plaît. Son nez fin et aquilin, son grain de beauté, juste au-dessus du coin gauche de sa lèvre supérieure pulpeuse et très rose. Cette bouche qui se retrousse légèrement en un sourire niais sur ses dents extra blanche. Toujours tiré à quatre épingles et conduisant une Audi noire toujours flamboyante. Prétention. Le playboy parfait et stéréotypé. Il est insupportable, je ne sais pas si c'est contre moi, mais il a toujours tendance à me prendre de haut. C'est idiot ! Dans une situation totalement différente il serait mon collègue, sur la même marche hiérarchique qui plus est. Je ne suis certes pas psychologue, mais j'en connais un peu plus qu'une simple patiente. Ce n'est pas qu'une question de tourner la page à ce niveau mais de résilience... Je le déteste tout simplement, et je pense que c'est réciproque. Malheureusement nous sommes tous les deux obligés d'assister à ces horribles séances car cela fait partie du programme. Il sera heureux de lire mon écrit et de voir son nom ainsi que le dégoût qu'il me provoque. Il m'est entièrement antipathique et le simple fait de penser à lui m'énerve. Et aujourd'hui nous sommes jeudi. J'ai cherché toutes les excuses possibles pour reporter ce rendez-vous. Si c'était si facile je n'entendrais pas sa voix martelait mon crâne :

The tree of our live - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant