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Ce matin il faisait froid. Très froid.
Je n'aurai jamais pensé que les températures chuteraient aussi vite. Maman vient de me réveiller, car nous étions enfin arrivées. Si seulement j'avais ma grande écharpe, dans laquelle je me serais enroulée... Mais, évidemment, je l'ai laissée dans ma valise, qui est dans le coffre. Et, bien-sûr, ma mère doit en rajouter :

- Chérie, où est ton écharpe ? Je t'avais dit de la prendre... Un vrai cerveau de garçon !

La discussion s'arrête ici. Maman le sait très bien. Elle sait très bien que je déteste quand elle me compare avec les garçons. D'ailleurs je ne comprends toujours pas.

Je descends de la voiture, gelée. Je regarde autour de moi. Incroyable ! De la neige ! Bon, en même temps, ce n'est pas très étonnant, vu que Steve habite dans les montagnes. Le décor est magnifique. Les gros flocons de neige ne passent pas inaperçus. Les trottoirs sont enfouis sous la neige, tout comme les voitures. Les familles ont fait des bonhommes de neiges, et les passants portent des bonnets, gants et écharpes. Ce décor me fait penser aux rares années de neige passées avec Papa. Les bonhommes de neiges, avec les bras avec les branches des buissons, les caillous du parking et la carotte de la cuisine, où était Maman, chaque année. Papa me poussait dans la neige, je le poussais - avec la force d'une enfant de quatre ans -, aussi, dans la neige. Il me portait dans les airs et j'ouvrais grand la bouche pour attraper les flocons de neige.

- Tu te souviens, quand Papa te poussais dans la neige ? demande Maman.

Je n'avais pas entendu, à cause des écouteurs que j'avais dans les oreilles. Maman me retire un écouteur :

- Chérie ? Tu te souviens de tous ces hivers avec Papa ?

Si je m'en souvenais ? Évidemment. Comment oublier les meilleurs moments de sa vie ? C'est impossible. Imposible.

- Oui, je lui réponds en remettant l'écouteur dans mon oreille.

« Driiing ! »

Ma mère avait appuyé sur la sonnette. Je sentais le souffle de mon nez sur mon sweet, que j'ai enfilé par-dessus mon nez. Eh oui, « comme tous les ados, je soupire » - c'est la phrase que me dit toujours ma mère - et alors ? Voir Steve n'était vraiment pas le meilleur cadeau de Noël.

- Oh ! Mais ce ne serait pas ma nièce adorée par hasard ?! s'exclame Steve.

Je soupire, encore, puis lève les yeux au ciel :

C'est bon, j'ai plus neuf ans, lui dis-je en rentrant.

Je sais que Steve et Maman me regardent, mais je ne dis rien. Maman n'aime pas que je la "provoque".

Je monte les escaliers, puis rejoins ma chambre - la chambre d'amis en temps normaux - pour ranger mes affaires.

Mon téléphone vibre. Ça doit sûrement être Karen :

2 NOUVEAUX MESSAGES :

KAREN : Alors tu es bien arrivée ?! 9 :34

KAREN : J'ai mis l'alarme, normalement tu es arrivée ! 9 :34

Je décide alors de l'appeler :

- Allô ?

- Karen, c'est moi, Ema.

- Ema ! Alors, il s'est passé quoi ? Raconte-moi tout.

Je prends une grande respiration, et je raconte mon long voyage sous un froid glacial. Trente minutes plus tard, je raccroche enfin... Je décide de commencer à écrire dans le carnet que m'a donné Papa, pour écrire ce que je ressentais. Je n'ai jamais écrit dans ce carnet. Mais, il faut que je puisse écrire mes pistes sur le meurtre de mon père.

21 Décembre :

Je suis arrivée chez Steve. Ma mère, est assez contente... Je ne suis là que pour enlever mes doutes sur Steve.

Quelqu'un frappe à la porte :

- Coucou, fait une petite voix, douce et un peu aigüe.

- Charlie, comment tu vas ?

Charlie, c'est ma cousine, la fille de Steve. Elle a 6 ans, et elle est magnifique. Elle me fait penser à sa mère, morte de la même manière que Papa, étranglée...

Peut-être que je n'aime pas Steve, mais Charlie, c'est un petit ange. Elle est encore en pyjama, et décoiffée.

- Ca va, me dit-elle en fermant la porte. Je peux venir dans ton lit, à côté de toi ? me demande-t-elle.

- Oui, bien-sûr.

Elle s'allonge, ferme les yeux, et s'endort.

Charlie est magnifique. Je suis sûre que c'est la petite fille la plus jolie, la plus mignonne, la plus sincère des petites filles. Elle se retourne. Je caresse sa tête et coiffe ses cheveux avec mes mains. Je les pousse sur les côtés, et j'aperçois des bleus plein le cou. « Ô Mon Dieu ! » je pense.

Je sors mon carnet, et écris :

J'ai remarqué des bleus sur le cou de Charlie. Je dois voir si elle n'en a qu'au cou, et l'éloigner de son père.

Je me lève. Je marche sur la pointe des pieds pour éviter de réveiller Charlie.

J'ouvre doucement la porte, pour prévenir ma mère. Je referme la porte, m'apprête à descendre les escaliers. Mais, avant de descendre, depuis le premier étage, j'aperçois Maman dans les bras de Steve. « Ce...Ce n'est pas possible », je chuchote. Je retourne dans ma chambre, désespérée. Mes larmes coulent toutes seules. Je ne peux pas voir Maman dans les bras de cet homme. Déjà qu'il me paraît assez suspect, mais en plus que c'est le frère de Papa... Je ne peux pas y croire.

Je m'allonge à côté de Charlie, je prends mes écouteurs et mon téléphone et écoute Mad World, ma chanson « préférée ».

Je finis par m'endormir, avec mes joues humides. Je rêve de Papa, allongé sur le sol de sa chambre, mort. Je le vois, la bouche ouverte, les traces des coups et de la corde sur le cou, Maman qui pleure, et moi... silencieuse.

Il est 10h30, et Charlie me réveille, en enlevant mes écouteurs :

- Ema, on va manger ? 

Je me lève en m'appuyant sur le coude droit, et frotte mes yeux.

Oui, tu veux que je te coiffes ?

- Tu peux me faire une tresse ?

- Oui, viens.

C'est bon, j'ai réussi à trouver la façon dont j'allais la faire parler.

«Aïe !

- Où est-ce que tu as mal, Charlie ?

- Nulle part.

- Charlie... Je sais que tu as mal. Je t'ai tiré trop fort les cheveux ?

- Non, ce n'est pas toi. J'ai mal partout.

Je pouvais commencer à lui poser des questions :

- Charlie, pourquoi tu as des bleus sur ton cou ?

- Je suis tombée.

- Charlie, est-ce que ton père...

- Papa ?

- Il te frappe ?

Charliea les larmes aux yeux. Elle fixe le sol, et ne dis rien.

FiN dU cHaPiTrE !

Un Hiver GlacialOù les histoires vivent. Découvrez maintenant