Prologue, par Michael Roch

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Autour de 4 heures du matin, le bureau de l’inspecteur Varosky n’était plus qu’un aquarium de fumée. Perdu dans sa réflexion, il avait enchaîné clope sur clope et paquet sur paquet sans que les effets du tabac n’arrivent à débloquer la moindre étincelle d’intuition. L’affaire du Walrus Institute démarrait mal. Il n’y comprenait rien. Des gribouillis, ce qu’il venait de survoler. Des fiches dépareillées sans queue ni tête et en partie cramées. Selon lui, ces textes ne valaient pas la peine d’avoir été protégés par ce cadavre non identifiable, retrouvé dans les restes de l’incendie du W.I.

Varosky soupira. Il manquait un maillon. L’histoire du Walrus Institute était encore trop mystérieuse et intangible. L’inspecteur s’empara du combiné du téléphone, au coin de la table. Il s’apprêtait à appeler l’équipe en place sur la scène de crime lorsque la porte du bureau s’ouvrit. Natacha Goddamn, lieutenante de la brigade, entra en toussant, puis ressortit de la pièce en se couvrant le nez. Elle appela l’inspecteur depuis le couloir. Varosky sortit à contrecœur, et après avoir ouvert une fenêtre.

— Il y a des moustiques, faites vite.

— Ils ne vous tueront pas d’un cancer.

— Faites vite, j’ai dit.

— En fouillant les décombres de l’immeuble, nous sommes tombés sur un coffre-fort. Il contient d’autres feuillets.

— Vous l’avez déjà ouvert ?

— Il est en bas, au labo.

L’inspecteur grogna. Il détestait ne pas être mis au courant en premier lorsque d’éventuels indices surgissaient. Il suivit sa collègue jusqu’au département en question.

Sur une table large, le coffre de métal avait été déposé avec précaution. Des zones charbonnées parcouraient les parois. Ces dernières avaient résisté aux flammes. Les techniciens du laboratoire l’avaient ouvert à la scie circulaire, sans en abîmer le contenu : une énorme pile de feuilles volantes. Varosky tourna de l’œil ; il n’aimait pas la lecture. Goddamn voulut le rassurer :

— Elles sont numérotées. On en a déjà sorti un petit paquet.

Elle guida son supérieur vers une autre grande table sur laquelle les feuillets avaient été étalés les uns à côté des autres. Au-dessus d'eux, un appareil de capture numérique flottait au bout d’une perche.

— Nous avons installé la D-loupe, expliqua Goddamn. Vous pouvez la positionner au-dessus du manuscrit qui vous intéresse et le lire grâce à cet écran-là. Ne touchez pas les feuilles, nous n’avons pas encore prélevé les empreintes.

— Vous déconnez. Déjà que j’ai du mal avec la lecture sur papier. Vous voudriez que je lise sur un écran aussi lumineux que l’explosion d’une supernova ?

— C’est un écran E-Ink.

— Je m’en contrecarre.

— Ça veut dire qu’il ne vous causera aucun mal de tête. Allumez-le, vous verrez.

Varosky grogna de nouveau. Il appuya sur le bouton ON et fut un instant surpris du résultat gris sur ton gris. La D-loupe avait été positionnée au-dessus du premier feuillet. Il n’avait plus qu’à s’y pencher.

Walrus Institute 2: Monsters !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant